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Let’s dance, une compilation de circonstance

Avec Let’s Dance !, éclectique programme de trois pièces chorégraphiques, le Ballet du Rhin saisit l’occasion de la présidence britannique du Conseil de l’Europe pour un coup de projecteur sur la danse anglaise. De la belle ouvrage un tantinet décousue.

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Christelle Molard-Daujean et Renjie Ma dans Le Jardin aux lilas d'Antony Tudor (Photo : Jean-Luc Tanghe)

Les chorégraphes anglais sont les grands absents des plateaux hexagonaux, et donc strasbourgeois. On se réjouissait donc que le Ballet du Rhin saisisse l’opportunité de la saison Sooo British, proposée par la ville de Strasbourg, pour concocter un programme 100% britannique.

La bonne idée de Bertrand d’At, directeur du Ballet, est d’ouvrir le programme éclectique par un peu d’histoire de la danse et une pièce rarement montrée. Le Jardin aux lilas, créé en 1936 sur une partition du compositeur français Ernest Chausson, est l’une des œuvres majeures d’Antony Tudor, qui émigre quelques années plus tard aux Etats-Unis. Une pièce délicate, un chassé-croisé amoureux dans un jardin nocturne, un Raison et sentiments chorégraphique, qui ouvrit à l’époque une brèche : celle du théâtre dansé, qui fait florès quelques décennies plus tard. Loin des ballets à grand drame où prime la performance des danseurs et où les émotions s’expriment encore par le biais de la pantomime, Le Jardin aux lilas est un jeu de regards tout en retenue plus qu’un impressionnant jeu de jambes, qui exige des qualités d’acteurs plus qu’une virtuosité technique… qualités que les danseurs du Ballet déploient ici avec grâce.

Alexandre Van Hoorde et Boyd Lau dans Many de Thomas Noone (Photo : Jean-Luc Tanghe)

Chez Thomas Noone, jeune chorégraphe anglais installé à Barcelone, l’émotion passe en revanche par une danse physique, animale. Many (beaucoup), c’est le groupe, un rassemblement d’êtres qui se structure en une société dans laquelle l’individu seul (formidable Jean-Philippe Rivière !)* ne parvient jamais à s’intégrer. Devant une immense paroi rouillée qui évoque une décomposition inéluctable, elle se déchire et se rassemble avec une belle énergie, ses unions et affrontements stylisés portés par la lancinante musique de Philip Sheppard.

Jean-Philippe Rivière et Baptiste Gahon dans Tea for six (or ten) de Mathieu Guilhaumon (Photo : Jean-Luc Tanghe)

De la retenue edwardienne de Tudor à l’énergie expressionniste de Noone, Let’s Dance ! s’appuie ainsi sur un diptyque intéressant, que d’At choisit de compléter par une commande passée à l’un de ses danseurs du Ballet, à qui il impose la musique de Purcell. Mathieu Guilhaumon s’empare des images d’Épinal que véhicule dans l’imaginaire collectif la perfide Albion, pour « leur faire raconter autre chose » et « interroger » les liens entre tradition et modernité. Au final, Tea for six (or ten) est une série de saynètes déclenchées par l’arrivée d’un objet : tapis de roses, couronne, parapluie, horloge, tasse à thé… tout y est ! Composée sur mesure pour ses complices, la pièce de Mathieu Guilhaumon déploie une danse élégante et généreuse qui ne manque pas d’humour, et a le mérite de révéler les personnalités qui forment ce corps de ballet toujours bien huilé. Mais elle aura sans doute bien du mal à exister en dehors de cette soirée. On aurait aimé que la troisième pierre de l’édifice contribue à construire un vrai regard sur la scène anglaise. Le tout reste un peu lisse et, au finale, Let’s dance ! relève un peu de la compilation de circonstance, à l’image de la programmation Sooo British dans laquelle elle s’inscrit. Une assiette anglaise, en somme, au demeurant impeccablement exécutée.

* La distribution des rôles varie suivant les représentations

Bande-annonce du spectacle (images de répétitions) – réalisation : Ballet de l’Opéra National du Rhin

Prochaines représentations de Let’s Dance ! , ce soir (17 février) et demain (samedi 18) à 20h et le 19 à 15h à l’Opéra de Strasbourg
Réservations : 0825 84 14 84 (0,15 € / min)
www.onr.fr 


#Ballet du Rhin

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