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Les gérants des Coop pas emballés par Casino

Hier soir à la Maison des syndicats, environ soixante gérants de supermarchés Coop sont venus s’informer sur leur probable avenir: un transfert sous la marque Casino. Actuellement salariés, ils pourraient devenir gérants-mandataires, non salariés, et voir leur rémunération directement dépendre de leur chiffre d’affaires. Une perspective qui les terrifie, compte-tenu des conditions sociales du groupe Casino décrites hier soir par les syndicats.

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Des gérants de Coop Alsace entrevoient abasourdis leur avenir. Au premier plan, Eddy Vernalde, gérant d'un Casino. (Photo PF)

C’est l‘association de soutien aux Coop d’Alsace qui a été à l’initiative de la réunion d’hier soir à la Maison des syndicats: les gérants des 151 magasins de proximité et des 22 supermarchés du groupe Coop étaient invités à rencontrer les porteurs de l’association et des représentants des syndicats. Plus d’une soixantaine de gérants s’est déplacée de toute l’Alsace, une forte participation qui témoigne de l’inquiétude grandissante au sein de cette catégorie du personnel, en première ligne face aux clients et face aux salariés, et pourtant laissée dans le flou sur son avenir. Le groupe Coop négocie actuellement un plan de sauvetage qualifié de « plan de la dernière chance« , dans lequel le groupe Casino est appelé en chevalier blanc pour sauver « la proxi » comme ils disent, c’est à dire les Point-Coop familiers des bourgs alsaciens.

Mais la personne la plus écoutée de la soirée a été Antoine Ferreira, du pôle juridique de la CGT-Casino. Ce combattant des contrats de travail, bête noire du groupe Casino comme il se décrit lui-même, a un talent particulier pour asséner de terribles prédictions qui tranchent avec son accent basque rocailleux. Selon lui, l’avenir des gérants de Coop-Alsace est très sombre:

« Les gérants vont être les premières victimes de la casse du groupe-Coop. Vous allez vous retrouver avec des contrats non-salariés, tout en ayant un lien de subordination à la hiérarchie, ce qui est en soi contraire au Code du travail. Vous allez devoir combler les pertes éventuelles sans pour autant profiter directement des bénéfices, que vous devrez transférer plus haut. L’amplitude horaire de votre semaine de travail va doubler et votre revenu va être divisé par deux puisqu’il sera indexé sur votre chiffre d’affaires. »

Témoignage glaçant d’un gérant de Casino

Le gérant du supermarché Casino de Bischheim, Eddy Vernalde, a confirmé ces propos par son témoignage qui a glacé le sang de l’assistance:

« Je travaille 70 heures par semaine et je gagne 789€ par mois avec un appartement de fonction, lorsque mon chiffre mensuel est inférieur à 35000€. Et encore je suis un privilégié, car je ferme à midi. Les nouveaux magasins sont incités par Casino à ouvrir en continu de 7h à 19h et le dimanche matin ! Leur stratégie est simple: presser les gérants comme des citrons et en changer régulièrement. Ce qui intéresse Casino dans cette opération, ce sont vos magasins, ces pépites de proximité, mais certainement pas le sauvetage de votre situation personnelle. »

Les gérants présents ont reçu ces informations comme des coups de massue, eux qui travaillent déjà beaucoup et doivent assumer auprès des clients l’envol des étiquettes décidé plus haut. Ils ne se sentent pas responsables du naufrage du groupe et bien démunis face aux changements qui se préparent. Peu ont accepté d’être interviewés à l’issue de la réunion, certains allant même jusqu’à accuser la direction d’avoir envoyé ses espions… Quelle que soit l’issue du plan de sauvetage, une entreprise de refondation sociale sera nécessaire pour ressouder ce groupe d’environ 3000 salariés.

Un gérant d’une supérette du nord de l’Alsace:

« Bien sûr que je suis inquiet. Je suis salarié actuellement, je gagne 1600€ nets par mois. Je ne sais pas ce qu’il va advenir de moi, on ne nous a rien proposé, on ne m’a rien dit et ma situation peut évoluer du jour au lendemain ! Je travaille déjà plus de 50h par semaine, je veux bien faire des sacrifices mais… Je ne vois pas pourquoi on devrait changer d’enseigne. La marque Coop est forte en Alsace, les clients y sont attachés. Il va falloir qu’on s’en sorte tout seuls, je vais étudier les plans proposés par l’association de défense et des syndicats. Jusqu’à présent, je n’avais pas pris le temps de m’y intéresser, mais je crois qu’il va falloir s’y mettre. »

L’association de défense a appelé les gérants à organiser des « Apéros-Coop » pour mobiliser les clients et les sociétaires, et à faire circuler une pétition.

Pour aller plus loin :

Une interview vidéo d’Antoine Ferreira sur le futur des gérants de Coop-Alsace


#Alsace

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