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Les chambres en cités U ne séduisent plus

La rentrée approche et certains étudiants n’ont pas encore trouvé de logement. Si plusieurs solutions s’offrent à eux, la moins chère reste la location d’une chambre en cité universitaire dont le prix est bien plus abordable que le loyer d’un studio. Mais les bâtiments et les équipements sont vétustes, les espaces communs dégradés et les chambres étriquées. A chaque rentrée, il reste des logements vides.

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La cité universitaire de Paul Appell est la plus grande de Strasbourg avec environ 1 000 logements. (Photo : Jérémie Nadé)

Les 45 000 étudiants strasbourgeois se sont tous plus ou moins posé la question : où et comment se loger pour ses études ? Si certains décident de rester chez leur parents, d’autres, par obligation ou par choix, doivent trouver un logement. Pour ceux qui n’ont pas les moyens de faire appel au parc privé, le Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) de Strasbourg est la solution la plus économique et propose des chambres ainsi que des studios à des prix plus abordables que ceux proposés par les agences immobilières.

Pour 149 euros par mois, les étudiants peuvent bénéficier d’une chambre de 9 m² (la taille minimum légale) avec lavabo. Celle-ci peut être équipées de sanitaires mais très souvent, ces derniers sont communs à tout l’étage, comme la cuisine. Les studios sont plus grands mais les loyers, aux alentours de 350-500 euros s’approchent de ceux du marché.

Une offre insuffisante mais des logements vides

Contrairement a une idée reçue, les logements du Crous ne sont pas réservés aux boursiers même si ceux-ci sont prioritaires pour l’attribution d’un logement. Mais les places sont limitées comme l’explique Bruno B., membre du syndicat SUD Etudiant :

« Strasbourg compte trois grandes cités universitaires : Paul Appell, juste à côté de la fac, Robertsau et Alfred Weiss à Neudorf. Il y a ensuite des cités plus petites autour de la fac où les logements sont semi privés  ce qui fait environ 5 000 logements (chambres ou studios) disponibles pour près de 45 000 étudiants. Il n’y a donc pas de quoi satisfaire toutes les demandes. « 

Pourtant chaque année, il reste des logements vides. Pour Joannie Crinon, élue Afges au conseil d’administration du Crous, il y a deux explications à cette situation :

« Si des logements restent vides, c’est déjà parce que certains, comme les studios, sont trop chers pour les étudiants. Ensuite les demandes sont satisfaites au mois de juin et de juillet. Les retardataires sont mis sur liste d’attente et doivent patienter jusqu’en septembre avant de recevoir une réponse. Pour beaucoup d’entre eux, c’est trop tard et ils trouvent une autre solution avant d’avoir la réponse du Crous. »

La cité de Paul Appell est composée de cinq bâtiments (Photo : Jérémie Nadé)

Les dossiers doivent en effet être envoyés très tôt, entre janvier et avril de l’année universitaire précédente, ce qui n’est pas toujours pratique pour les étudiants ou futurs étudiants comme le précise Joannie :

« C’est vrai que pour les néo-bacheliers, c’est compliqué de se projeter aussi loin dans l’avenir mais c’est surtout à cause de contraintes techniques, le Crous doit traiter de nombreux dossiers. Pour ceux qui sont déjà étudiants, c’est beaucoup moins problématique. »

Des chambres rénovées mais avec une augmentation du loyer

Mais le problème des cités universitaires n’est pas seulement quantitatif, le confort peut être assez rudimentaire comme le rappelle Bruno :

« Paul Appell est la moins catastrophique notamment par rapport à Robertsau qui est dans un état lamentable. Mais malgré ça, de nombreux logements ne sont pas rénovés non plus à Paul Appell. Et quand ils le sont, la revalorisation est toujours accompagnée d’une augmentation du loyer alors que les bourses n’augmentent pas. »

Il suffit en effet de se rendre à Paul Appell pour voir qu’il existe de grandes disparités dans les logements proposés.  Cette cité universitaire est la plus importante du parc strasbourgeois avec plus de 1 000 chambres réparties sur 6 bâtiments. Le bâtiment D a été récemment rénové et les quelques locataires présents pendant l’été, comme Kévin étudiant à l’Insa (Institut national des Sciences appliquées), ne semblent pas se plaindre :

« Je me suis installé ici parce que je n’avais le choix vu les prix des logements privés. Mais on est plutôt bien ici et j’ai connu pire dans d’autres cités universitaires comme quand j’étais étudiant à Orléans. »

Les chambres du bâtiment D ont toutes été rénovées (Photo : Jérémie Nadé)

Mounir, étudiant en droit, est lui aussi locataire du bâtiment D :

« Au niveau des structures tout est nickel mais les chambres sont vraiment petites. Je paye 210 euros et je trouve ça cher pour une pièce de 9 m². Avant j’étais dans le bâtiment F, ils m’ont placé ici parce qu’ils le ferment pendant l’été, et pour le même prix j’étais logé dans 16 m², je n’ai même pas pu prendre toutes les affaires que j’avais dans mon ancienne chambre. Par contre, les bâtiments B et C sont catastrophiques. J’ai des amis qui y habitaient et les chambres sont vraiment vétustes. »

Invasion de punaises et de serviettes hygiéniques

Il suffit de pousser la porte du bâtiment B pour comprendre de quoi il parle. A part les sanitaires, les bâtiments n’ont pas été refaits depuis longtemps et les chambres sont en bien plus mauvais état. Amza, étudiant d’origine algérienne en statistiques, fait la liste des problèmes :

« Le plus gros souci c’est les punaises, je ne sais pas d’où elles viennent mais il y en a partout. L’année passée, il y avait également très souvent des coupures d’eau ou d’électricité. Les chambres sont aussi très mal isolées. On entend tout ce qui se passe à l’extérieur et il fait assez froid en hiver. »

Tandis que celles du bâtiment B sont beaucoup plus vétustes (Photo : Jérémie Nadé)

Amadou, venu de Guinée pour faire une licence en Math-info, critique plus la vie en communauté rendue obligatoire par les sanitaires et les cuisines communes :

« On voit toutes sortes de choses. A mon étage, je retrouvais très souvent des serviettes hygiéniques par terre dans les toilettes. Pour les cuisines, le plus embêtant c’est qu’en hiver, elles ferment à 20h. Or je travaille, je livre des pizzas le soir. Quand je rentre, je ne peux plus me faire à manger. D’autant qu’il est interdit d’avoir un plaque électrique ou un micro-onde dans sa chambre. »

Pour l’Afges, l’offre d’hébergement du Crous n’est tout simplement plus adaptée aux pratiques des étudiants :

« Il faudrait faire des colocations afin de se battre contre l’isolement des étudiants, en plus ça permettrait de réduire les coûts de logement. »

Une idée qui n’est pas partagée par SUD Etudiant qui pense qu’il faudrait en priorité s’occuper du coût du loyer et de la qualité des chambres :

« Les cités universitaires sont déjà de grandes colocations, donc ce n’est pas vraiment  le problème. Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est une vraie politique de l’Etat sur le logement étudiant et sur les loyers. Parce que l’on sait que les APL ne sont pas une solution, quand elles augmentent, les loyers augmentent également. Il faut fournir un accès simplifié et honnête au logement étudiant en créant des résidences universitaires qui soient vraiment de qualité. »

Note : contactée, la direction du Crous n’a pas répondu à nos sollicitations.


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