Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Les bonnes idées trop rapidement retoquées du budget participatif

68 initiatives jugées « faisables » sur 213 propositions, c’est le bilan du premier budget participatif de Strasbourg, qui promet de partager un million d’euros entre les projets sélectionnés. Jusqu’au 30 avril, les citoyens peuvent voter en ligne pour leurs favoris parmi ces « finalistes ». Passage en revue des projets retoqués et des raisons avancées.

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89 Strasbourg, abonnez-vous.


Plus de 200 Strasbourgeois ont proposé des idées pour notre ville, mais seulement un tiers sont soumises au vote en ligne des habitants. Ainsi, 118 projets ont été écartés par la collectivité. La plupart sont qualifiés d’un sec « non recevable » car leur réalisation dépasserait le budget maximum de 100 000€ par initiative. Par ailleurs, limiter le budget participatif au « budget d’investissement » de chaque projet n’a pas été compris par tout le monde. Les investissements sont des dépenses uniques, travaux, outillage ou matériel et s’opposent au « budget de fonctionnement », qui correspond à des dépenses régulières, comme les salaires ou les loyers. Enfin, quelques dossiers relèvent de terrains privés, ou ne dépendent pas des pouvoirs de la commune.

Malgré la pertinence de plusieurs projets, les citoyens n’ont pas la possibilité de donner leur avis sur ces initiatives. C’est dommage puisqu’il s’agit d’une mine de bonne idées, qui auraient mérité que la collectivité s’y intéresse… On le fait pour elle.

Un café servi par des personnes porteuses de handicap

Voilà une idée originale, qui aurait permis de travailler pour une meilleure intégration des personnes handicapées. Le concept était de proposer des pâtisseries et des boissons dans un salon ou un café employant des personnes handicapées, avec l’aide de bénévoles du quartier Gare-Centre. Comme le résumait l’initiatrice, le projet était de « faire découvrir aux clients la richesse que peuvent apporter des personnes un peu différentes. » Mais la municipalité l’a écarté d’un cinglant : « Le projet relève du budget de fonctionnement et non d’investissement (critère de non recevabilité). »

Accueil et intégration de jeunes réfugiés mineurs

Accueillir les jeunes réfugiés et les intégrer, c’est ce que proposait Thomas Wender dans le cadre du budget participatif. Il déplore l’absence d’hébergement ou de scolarisation pour ces mineurs arrivés en France sans leurs parents. Le projet, estimé par son initiateur à 45 000€, visait à rénover les locaux du Centre Bernanos, qui accueillent 28 réfugiés, avec la collaboration de 200 bénévoles. Une demande qui n’a pas été prise en compte par la collectivité, la qualifiant « d’initiative privée ». Malgré tout, elle devrait être portée à la connaissance des services compétents de la ville grâce à la ténacité des porteurs de ce projet (voir ici leur page Facebook)…

Les locaux du Centre Bernanos accueillent 28 réfugiés, mais ils ont besoin d’être remis aux normes.

Une salle de spectacles par et pour les habitants

Une salle de spectacles citoyenne, pour rendre la culture accessible. L’idée : créer un complexe ouvert dans Strasbourg (dont l’emplacement n’est pas précisé), pour diversifier l’offre culturelle. L’infrastructure serait à la disposition des habitants et des associations locales, qui en assureraient la programmation. Une organisation faite maison par les usagers, qui permettrait de développer le lien social et de favoriser la rencontre entre les citoyens et de nouvelles formes d’art. Ce projet, qui rappelle l’ancienne configuration du Hall des Chars,  est passé à la trappe car jugé trop coûteux par la collectivité. Dommage parce qu’il aurait été intéressant de voir naître un lieu culturel, dont la programmation aurait été coproduite par des habitants… Ne serait-ce que pour expérimenter ce que ça pourrait donner.

Composter les déchets verts

Pas de bacs de compostage à proximité de chez vous ? Le projet d’Audrey K. était de mettre en place des composteurs dans chaque parc, square ou coin de verdure pour former le public à leur utilisation, souvent méconnue, et réduire ainsi drastiquement les déchets ménagers. Dans l’idéal, l’initiatrice aimerait une collecte à domicile des déchets verts. En attendant, l’idée serait de distribuer des lombricomposteurs, c’est-à-dire des boîtes avec des vers qui mangent les déchets végétaux, gratuitement dans tous les immeubles, écoles ou bâtiments publics. Tout cela dans le but de moins polluer l’air, ce qui bénéficierait à tous les Strasbourgeois surtout alors que l’incinérateur de la collectivité est à moitié en panne

Cette initiative est jugée non recevable, car trop chère et un budget qui relèverait du fonctionnement. Pourtant un projet beaucoup plus ciblé, un compost au quartier Laiterie, a lui été jugé recevable et estimé à 200€.

Dans Strasbourg, plusieurs immeubles ne disposent pas encore de composteurs.

Inciter à l’isolation du bâti ancien en location

Le bâti ancien représente une large part du patrimoine architectural de Strasbourg. L’isolation thermique de ces appartements, souvent en location, aurait bien besoin d’une rénovation. Ce projet avait pour objectif de mettre en place un service, au niveau de la Ville, qui puisse répondre aux interrogations des propriétaires et locataires. Mais surtout, les inciter à la rénovation, afin de lutter contre le gaspillage d’énergie et donc le réchauffement climatique. L’étude de la collectivité s’est soldée, ici aussi, par une simple phrase : « Le projet relève du budget de fonctionnement (critère de non recevabilité). Le porteur peut prendre contact avec energivie.info. » (Bonne chance !) Brigitte R. a listé une dizaine de questions sur le sujet, auxquelles aucune réponse n’a été apportée.


#démocratie participative

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles
Partager
Plus d'options
Quitter la version mobile