Après l’essaimage du concept de « zone à défendre » (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes à Sivens, Roybon, Oléron et Agen, les « zadistes » (ou affiliés) ont une nouvelle cible et celle-ci sera de taille : le Centre de stockage profond de déchets radioactifs situé à Bure, en Lorraine (voir notre dossier).
« Plus Bure sera leur chute »
Sur un site web de la galaxie des opposants à ce projet, « vmc.camp » et intitulé « Plus Bure sera leur chute – Camp International de rencontres et d’action du 1er au 10 août« , on trouve, traduit en anglais, allemand, espagnol, italien et même en russe, des cartes, des listes d’actions prévues, un agenda, des conseils de covoiturage, un mini-hôpital de campagne…
Le collectif VMC est « né de multiples rencontres croisées depuis quelques années au fil des camps NoBorder, des Camps Action Climat, de la lutte à Notre Dame des Landes, au Val Susa, au Chefresm et à Valognes. [Ses membres ont] en commun la détermination de faire tomber le capitalisme et toute forme de gouvernement autoritaire ».
Comme pour les contre-sommets internationaux (G8/G20/OTAN…), les activistes français voient les choses en grand et se préparent à accueillir des militants venus de toute l’Europe. L’objectif de l’opération est sans ambiguïté : débattre et se rencontrer, mais aussi occuper, construire et « défendre » le terrain, c’est à dire créer une nouvelle ZAD, et in fine empêcher le stockage de déchets radioactifs dans le sous-sol de la Meuse.
Gendarmes et militants déjà présents
Outre les gendarmes déjà très visibles sur le site, les premiers militants sont arrivés mi-juillet pour débuter le montage du campement (situé à 5 km du village de Bure), renforçant ceux déjà présents dans la « Maison de la Résistance« . À quelques jours du début des festivités, les troupes s’organisent encore beaucoup sur Internet.
On apprend sur le site vmc.camp que le « village » est situé sur un terrain privé « appartenant à des personnes solidaires de la lutte contre le Cigeo (Centre industriel de stockage géologique) », comment accéder à la zone (les gares les plus proches étant celles de Joinville, à 17 km, ou celle de Saint-Dizier, à 40 km), la présence d’une « équipe médicale et juridique » et que les organisateurs ne prendront en charge « ni la vente d’alcool, ni la mise en place d’une scène de concerts ».
D’après le programme « officiel », les premiers jours du mois d’août seront consacrés au montage :
« Le camp est un espace autogéré qui repose sur l’implication de chacun-e dans les tâches courantes. Venir à ce camp, c’est participer à son fonctionnement ».
Durant toute la semaine de mobilisation, une assemblée générale quotidienne est prévue, des repas seront assurés par des cantines (« véganes » et végétariennes) le midi et le soir (à prix libre), et il y aura même une partie du campement qui sera « non-mixte ». Des dizaines de discussions thématiques sont prévues toute la semaine : « Retour sur les mobilisations internationales », « Calais Migrants Solidarity et le réseau No Border », « Réunion internationale pour organiser la COP 21« , « Regards croisés sur les luttes NDDL et du NO-TAV« , etc.
Une importante capacité de mobilisation
Les relais militants qui peuvent donner de l’ampleur à cette mobilisation sont nombreux, à commencer par l’activation des réseaux disséminés dans toute la France et construits depuis trois ans autour des comités de soutien à la mobilisation contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (dont celui d’Alsace, très impliqué dans la mobilisation contre le Cigéo).
Viennent ensuite les organisations écologistes anti-nucléaires dites « classiques » (comme les membres du réseau Sortir du Nucléaire), dont il ne faut pas négliger les capacités de mobilisation car il s’agit pour la plupart de structures anciennes et bien structurées en Alsace. Elles ont organisé avec succès de nombreuses manifestations et actions contre la centrale nucléaire de Fessenheim (notamment à Colmar), la plupart du temps en coordination avec leurs équivalents allemands.
Sans parler des organisations comme Greenpeace ou ceux qui s’opposent depuis longtemps au passage des « Trains castor » contenant des déchets nucléaires, en France comme en Allemagne. Ces organisations sont capables de mobiliser à elles seules plusieurs milliers de manifestants dans le grand Est.
Sur place, le collectif « Bure : Stop !« , qui s’est aussi appelé « Bure Zone Libre (BZL) », « né des collectifs qui regroupent l’ensemble des associations opposées à l’enfouissement des déchets radioactifs à Bure », a été fondé en 2004. « Il a pour pour objectif d’acheter et d’animer un lieu de résistance autour du territoire de l’Andra (Agence nationale pour la gestion de déchets radioactifs) ». L’association BZL, présente sur le terrain depuis dix ans, aurait compté plus de 350 adhérents dès 2008.
Des similitudes opérationnelles entre Bure et Notre-Dame-des-Landes
Il y a de nombreuses similitudes entre Bure et Notre-Dame-des-Landes : la répartition des rôles à Bure et celle des collectifs et des associations à Notre-Dame-des-Landes, par exemple. « Bure : Stop ! » tient un rôle similaire à celui de l’association « Acipa » en agissant principalement sur le terrain juridique et administratif depuis de nombreuses années.
De son côté, le « Collectif VMC » reprend le rôle des zadistes en organisant l’occupation et la « défense » physique du territoire. Dans les deux cas, une partie de la population locale soutient la mobilisation et les militants, ce qui va compliquer la gestion de la situation par les forces de l’ordre.
Le but de ces dix journées d’occupation du terrain semble être de mettre en place les conditions d’une occupation durable et d’en renforcer au maximum la défense, si d’autres campements satellites ne sont pas construits. Ces constructions demandent beaucoup de main d’œuvre mais à Notre-Dame-des-Landes, plusieurs milliers de personnes ont érigé un petit village en moins d’une après-midi. L’occupation de Bure doit durer 10 jours de plus.
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : Bure, tout ce qu’il faut savoir sur le projet d’enfouissement des déchets radioactifs
Sur Rue89 Strasbourg : Bure, la chronologie
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