L’élection au fil du tram A

8h à Hautepierre : arrêt Dante

Le soleil perce timidement sur l’arrêt Dante. Malgré l’heure matinale, il y a déjà quelques personnes dans le gymnase de la maille Éléonore. Des « a voté » rebondissent sur le terrain de basket. La ligne rouge de milieu de terrain sépare les bureaux de vote n°602 et 618.

M. Temoréré, tout juste la trentaine, habite le quartier depuis quatre ans, il a l’habitude de se lever tôt :

« Je me lève tous les jours à 5h du matin. Je suis conducteur d’engin sur les chantiers. Aujourd’hui, c’est la première fois que je vote, avant j’étais dans la légion étrangère, j’étais sur des terrains d’opération, je ne pouvais pas aller voter. Mais c’est important de voter pour qu’on puisse changer les choses »

À la maille Éléronor, 50% des habitations sont des les logements sociaux. Dans le quartier, le revenu médian est de 713,80 € nets par mois. 60% des travailleurs sont ouvriers. En ce dimanche matin, il y a quelques cernes sous les yeux des plus matinaux. Quelques-uns partent travailler, d’autres ont une activité qui les attend, un match de foot, ou tenir la buvette d’une compétition de canoë-kayak.

À 9h30 les gens sont un peu moins pressés. M. Buna, la vingtaine, habite ici depuis1999, il suit l’actualité politique de près :

« Je suis allé voter ce matin pour pouvoir suivre le déroulement à la télé après. Pour moi aller voter, c’est un devoir et un plaisir. Avant la politique ne m’intéressait pas, mais en devenant plus vieux c’est un domaine qui m’a tenu de plus en plus à cœur. Je vais voter à chaque élection maintenant. Plus tard, j’aimerais m’investir, m’inscrire dans un parti. Si les gens veulent que ça change, ça changera. »

M. Tangourd, pâtissier, est venu avec sa compagne qui attend leur premier enfant, une fille. Comme elle n’a pas encore été naturalisée elle ne peut pas voter aujourd’hui. Lui ne vote pas à tous les scrutins. Ce blond à l’air goguenard explique pourquoi il est venu ce matin :

« Parce que les gens dorment ! Il y a moins de monde. Je ne vote que pour les présidentielles. La raison , c’est que Le Pen au deuxième tour en 2002, ça m’a beaucoup marqué. Je n’ai pas envie que ça se reproduise. Avant je ne votais pas du tout. »

11h à la Petite France, rue de la Monnaie, arrêt Langstross Grand Rue :

Dans l’école Saint-Thomas il y a foule. Une longue file d’attente devant les isoloirs des bureaux n°204 et 205 et sous les moulures de l’établissement. Une équipe de France 3 interroge les gens à la sortie des urnes. L’endroit est très télégénique. Dans ce quartier les prix du mètre carré varient entre 2360€ et 3400€.

Georges Mary, né en 1936, ancien proviseur du lycée Émile Mathis à Schiltigheim, est revenu habiter dans le quartier depuis treize ans :

« J’attends ma femme, Nicole, pour aller voter, j’étais juste venu dire bonjour. Je suis étonné du monde qu’il y a, d’habitude il n’y en a pas autant… Moi, je vais voter à chaque élection, il faut profiter de la liberté qui nous est offerte, même si j’estime que le candidat que j’ai choisi est le moins pire. Je trouve dommage qu’aucun n’ait osé aborder les sujets de société en profondeur. Ils n’ont pas assez confiance dans la clairvoyance du peuple. »

Delphine et Lionel, habitent ici depuis un an. Jeune couple pacsé, elle est professeur des écoles, lui rédacteur dans une boîte de communication :

« On n’a pas voté pour le même candidat, explique Delphine. Moi, je me suis décidée ce matin. »

« Moi, je me suis décidé il y a trois ou quatre jours, répond Lionel derrière ses lunettes aux branches vertes. »

Il y a plusieurs parents qui viennent avec leurs enfants. Certains les laissent s’amuser un peu dans l’aire de jeu. Françoise Kempf, maman d’une fille de deux ans, la trentaine est sortie de chez elle un peu avant midi :

« C’est l’heure de descendre prendre le café, c’est pour ça que je viens à cette heure. Je vais voter à chaque élection, sinon je m’arrange pour faire une procuration. Pour ce scrutin j’ai pris ma décision il y a plus de six mois. »

Illkrich-Graffenstaden, complexe sportif. (Photo RD)

14h, Complexe sportif Lixenbuhl, arrêt Illkirch-Lixenbuhl :

À Illkirch-Graffenstaden, l’abstention avait été l’une des plus élevées de la CUS en 2007. 20,63% des inscrits ne s’étaient pas déplacés pour voter (contre 18,04% pour l’ensemble de la CUS). Les averses se succèdent mais n’arrêtent pas le ballet des voitures sur le parking. Une fois garés, les conducteurs se dirigent droit vers la salle de danse où se trouvent les bureaux n°8 et n°10. Ici, 42,7% des ménages sont propriétaires de leurs logement contre 26,3% des ménages strasbourgeois.

M. Genevrier et Mme Boisson, jeune couple pacsé, font partie des propriétaires illkirchois :

« Ça fait un an qu’on habite ici, indique Mme Boisson. Aujourd’hui, comme d’habitude j’ai voté par défaut. J’ai une direction, je sais vers qui je tends, mais je me suis décidée il n’y a qu’une semaine. L’espoir fait vivre. »

M. Genevrier, originaire de Saint-Étienne, supporter des Verts (l’équipe de foot), va voter à chaque scrutin :

« Je vais voter à chaque fois qu’on me demande mon avis, sinon j’ai pas le droit de me plaindre. »

Le couple a un enfant de trois ans et le deuxième devrait arriver dans un mois et demi.

Madame Marie est venue avec son fils. Employée de banque, les cheveux bruns frisés, elle porte des boucles d’oreille en or discrètes. Elle habite dans la commune depuis cinq ans :

« C’est dommage, cette année on a reçu les programmes l’avant-veille des élections. Je les lis tous et je fais mon choix en fonction du programme. Ce n’est pas un choix par défaut. »

Sur le skate park quelques pré-ados roulent sur les rampes en trottinette. Les averses ont cessé.