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Le planning familial ouvre une cagnotte pour les Strasbourgeoises qui doivent avorter aux Pays-Bas

De nombreuses femmes sollicitent le planning familial 67 et demandent une Interruption Volontaire de Grossesse hors délai légal. L’association lance un fond de solidarité pour leur permettre de payer l’IVG et le voyage aux Pays-Bas, où l’avortement est autorisé jusqu’à 22 semaines de grossesse, contre 14 en France.

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Le Parlement a adopté, le 23 février 2022, une proposition de loi qui allonge le délai légal pour l’intervention volontaire de grossesse (IVG) en France. Il passe de 12 à 14 semaines de grossesse. « C’est bien, mais c’est loin d’être suffisant. On est entourés de pays qui font bien mieux », résume Éléonore, une Strasbourgeoise qui a dû avorter à Amsterdam à 19 ans, après avoir appris qu’elle était enceinte de 14 semaines justement. Le délai légal pour l’IVG est de 22 semaines aux Pays-Bas et de 24 semaines en Angleterre.

Une cagnotte pour des IVG hors délai français

Vendredi 4 mars, le planning familial du Bas-Rhin a mis en ligne une cagnotte de solidarité pour aider les femmes qui doivent avorter hors délai dans d’autres pays. « Malheureusement, cette démarche risque de rester utile encore longtemps. Les choses avancent très lentement. Le bras de fer a été rude à l’Assemblée nationale (avec l’opposition à l’allongement du délai des députés de droite, NDLR) pour ce petit acquis », estime Claire, animatrice au planning familial à Strasbourg. Elle est régulièrement contrainte d’accompagner des Strasbourgeoises dans leurs démarches pour qu’elles puissent avorter hors délai aux Pays-Bas :

« Nous avons deux cas récurrents : les femmes qui ont fait un déni de grossesse au-delà de 12 ou 14 semaines, et les personnes dans des situations sociales difficiles, qui subissent des violences ou des viols par exemple. Une multitude de raisons peuvent les pousser à avorter. Il s’agit souvent de femmes jeunes ou précaires, qui n’ont pas les moyens de payer l’IVG non remboursée à l’étranger et le voyage. »

Les femmes qui veulent avorter hors délai doivent débourser rapidement une grosse somme d’argent. Photo : New voices / public domain / cc

Un soutien financier indispensable

Le planning familial dispose d’une liste des cliniques des autres pays qui pratiquent l’IVG, avec le prix des interventions. Aux Pays-Bas, elles coûtent entre 780 et 965 euros selon le stade de la grossesse. « Avec le trajet et l’hébergement, un avortement hors délai pour une Strasbourgeoise qui va aux Pays-Bas coûte jusqu’à 1 400 euros », indique Claire.

L’IVG d’Éléonore date de janvier 2009. En 2022, à 35 ans, elle en parle sereinement. Quand sa gynécologue lui a annoncé qu’elle avait fait un déni partiel de grossesse et qu’elle était enceinte depuis 14 semaines, elle avait 19 ans. « Je n’étais pas prête, ni matériellement, ni psychologiquement, pour accueillir un enfant. J’étais effondrée, écrasée par l’événement », confie-t-elle.

Une animatrice du planning familial l’a alors orientée vers une clinique des Pays-Bas, où l’intervention lui a coûté « 812 euros ». Elle raconte qu’elle a pu réunir, en mobilisant toutes ses ressources, 600 euros, et prendre en charge le trajet. Le planning familial lui a fourni une aide de 212 euros. « À Amsterdam, il neigeait. Je me préparais à dormir dans la gare la veille de l’avortement, mais des Hollandais m’ont accueillie chez eux parce qu’ils m’ont vue seule », relate-t-elle.

Chaque année, entre 3 et 5 000 Françaises obligées d’avorter à l’étranger

Aujourd’hui, malgré l’allongement du délai, Éléonore aurait vécu la même situation puisque son déni de grossesse a duré 14 semaines. Il y a aussi des femmes qui découvrent qu’elles sont enceintes depuis 19 ou 20 semaines. D’après Claire, du planning familial, le cas d’Éléonore est loin d’être isolé :

« L’antenne Grand-Est du 08 00 08 11 11, numéro de conseil du planning familial, a compté 43 appels en 2021 pour des IVG hors délai. La même année, au planning familial de Strasbourg, dont le centre se trouve au 13 rue du 22 novembre, nous avons accompagné sept femmes jusqu’au bout de leurs démarches pour qu’elles bénéficient d’une IVG hors délai aux Pays-Bas. Il y a aussi de nombreuses femmes qui se débrouillent seules, en trouvant les informations sur internet. »

L’association estime qu’en France, entre 3 000 et 5 000 femmes sont obligées d’avorter dans d’autres pays. « Et il y a aussi toutes celles qui ne peuvent pas se le permettre, et qui n’avortent pas, d’où la nécessité de visibiliser notre fond de solidarité », ajoute Claire :

« Il faut que les femmes sachent que cette possibilité existe, pour qu’elles la prenne en compte dans leur réflexion si elles apprennent qu’elles sont enceintes. »

« Le planning familial limite la casse »

Le planning familial demande que le délai pour l’IVG en France soit au moins de 22 semaines, comme aux Pays-Bas. Aussi, en théorie, au cas par cas, en France, un collège de médecins peut valider une demande d’IVG hors délai sur la base de critères psychologiques et sociaux. « Pour l’instant, ce collège n’offre la possibilité d’avorter hors délai que dans de très rares cas, et la démarche est longue. Nous demandons que cette solution devienne opérationnelle », observe Claire. Éléonore dénonce l’absurdité de la situation en France :

« Les femmes avortent, que ce soit légal ou pas. Là, au final, la situation en France empêche juste celles qui voudraient mais qui n’ont pas les ressources de faire le voyage. Et le planning familial est obligé de limiter la casse, depuis des années. Tout aurait été tellement plus simple si j’avais été prise en charge à Strasbourg. »


#IVG

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