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«Le ministère de l’Enseignement supérieur veut de moi, celui de l’Intérieur non»

Victime de la récente circulaire Guéant, Farid Slimani, Algérien de 28 ans, docteur en pharmacologie, pourrait être expulsé mi-mai. La Ville de Strasbourg et l’UdS soutiennent cet ancien étudiant strasbourgeois dont les études ont été en partie financées par la France, et qui est aujourd’hui courtisé par les plus prestigieux laboratoires français.

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Après un master et une thèse en pharmacologie financée par la France, Farid Slimani pourrait être expulsé à la mi-mai. (Photo MMo)

«Si je veux rester, c’est pour défendre l’honneur de la France. C’est pour lui rendre ce qu’elle m’a donné pendant mes études.» A 28 ans, Farid Slimani, docteur en pharmacologie algérien, est expulsable. Le 15 mai prochain, il devra, sauf rebondissement, avoir quitté le territoire français, après sept années de brillantes études dans la capitale alsacienne.

Victime de la circulaire Guéant, il s’est récemment vu notifier le non renouvellement de son titre de séjour, comme de nombreux étudiants étrangers de l’Université de Strasbourg (UdS) ces derniers mois.

Reçu 11e sur 200 à un concours national

Arrivé en 2005 en provenance d’Alger, où il exerçait alors la profession de pharmacien, Farid Slimani décide de rejoindre Strasbourg pour y faire un master de Pharmacologie:

«J’ai toujours été intéressé par la recherche. J’avais entendu parler de l’Université de Strasbourg et de sa très bonne réputation dans ce domaine. Et on trouve à Strasbourg quelques uns des laboratoires les mieux cotés. Ajouter à tout cela le coût de la vie et la situation géographique, et vous comprendrez que je n’aie pas hésité longtemps.»

En 2007, Farid Slimani obtient sans difficultés son master. Il décide alors de participer à un concours national organisé par le ministère de l’Enseignement et de la Recherche qui ouvre droit à une thèse. Il est reçu 11e sur 200, et obtient un financement ministériel dans un laboratoire alsacien.

Pendant trois ans, tout se passe pour le mieux. L’étudiant algérien fait ses recherches, progresse dans sa thèse. En juillet 2010, ayant des promesses d’embauche de laboratoires, il demande un certificat de résidence de dix ans.

«L’idée était de terminer ma thèse sereinement et surtout de poursuivre mes recherches ici en France. Mais la préfecture a refusé en m’expliquant que mon statut d’étudiant ne permettait pas l’obtention de ce type de certificat.»

D’étudiant à salarié, de salarié à scientifique

Farid Slimani, qui est aussi porte-parole du CRE (conseil des résidents étrangers) de Strasbourg, sollicite alors le maire de la ville, Roland Ries, ainsi que son directeur de cabinet, Patrick Pincet.

«Ils m’ont soutenu et ont chacun envoyé, en leur nom, une lettre au préfet pour défendre ma situation. Malheureusement, il n’y a eu aucune réponse favorable.»

Problème, dans le cadre de sa thèse, l’étudiant en pharmacologie doit travailler plusieurs mois à plein temps en milieu hospitalier, ce que ne lui permet pas son titre de séjour. Il fait alors, en octobre, une demande de modification de statut, pour passer d’étudiant à salarié. Il doit attendre le mois de mars 2011 pour enfin avoir une réponse positive. Soulagé, Farid Slimani peut terminer sa thèse.

«Si je suis expulsé le 15 mai en Algérie, tout ce que j’ai fait n’aura servi à rien!»

Il la soutient le 4 octobre 2011 et obtient les félicitations du jury. Il devient docteur en pharmacologie et est immédiatement courtisé par plusieurs grands laboratoires français en raison de la qualité de ses recherches. Pour terminer celles-ci, Farid Slimani doit à nouveau changer de statut pour pouvoir rester en France.

«Cette fois, il fallait que je passe de salarié à scientifique. J’ai donc dû faire une nouvelle demande à la préfecture. Mais au lieu de me donner une année complète, ils ne m’ont donné que six mois. Ils ont estimé que le contrat me liant au laboratoire pour lequel je fais mes recherches se terminant mi-mai, rien ne justifiait que je reste plus longtemps en France.

Mon contrat s’arrête le 14 mai, et je dois quitter le pays le 15 mai. Mais je n’ai pas terminé mes recherches! Il faut encore que je rédige les résultats de celles-ci, que je publie, que des confrères me fassent part de leurs observations, me conseillent pour la suite. Si je suis expulsé le 15 mai en Algérie, tout ce que j’aurai fait n’aura servi à rien!»

«En Algérie, je redeviendrai simple pharmacien»

Aujourd’hui, Farid Slimani espère que le réexamen de son cas par la préfecture. Alain Beretz, le président de l’UdS, devrait lui apporter son soutien.

«J’ai déjà de nombreuses offres de laboratoires pour poursuivre mes recherches, mais les récentes circulaires Guéant compliquent mon cas. Avant de me signer un contrat, les employeurs demandent à ce que j’aie un titre de séjour en règle. A la préfecture, on me dit l’inverse: il faut que j’aie un contrat pour qu’il me renouvelle mon titre de séjour.»

Si aucune solution n’est trouvée d’ici le 15 mai, Farid Slimani sera expulsé en Algérie, «pays où la recherche pharmacologique est au point mort». «Je n’aurai pas d’autre choix que de redevenir pharmacien.» Avec en poche une thèse financée par la France.

«C’est sans doute ce que je ne comprendrai jamais: le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche veut de moi, le ministère de l’Intérieur non.»


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