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Le Grand Homme : deviens ce que la vie a fait de toi

Comment savoir de quoi on est capable ? Comment grandir quand son père est absent ? Le Grand Homme, mélodrame réalisé par Sarah Léonor, amplifie les réalités contradictoires qui constituent la toile de fond de chacun de nos choix. C’est ainsi que ce petit film monte en puissance pour jouer très rapidement dans la cour des grands…

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Intégrer le deuil comme un fortifiant pour mûrir (Photo Les Films Hatari)

Sur fond de guerre, d’immigration, d’expatriation et de question d’identité, la problématique centrale de la relation père-fils abordée par Sara Léonor dans Le Grand Homme prend une ampleur étonnante. Les thématiques fondamentales sont nombreuses, mais le film reste simple et va à l’essentiel de son propos dans le silence de nombreux dialogues sans mot où ne résonnent que les émotions.

« Homme, deviens ce que tu es » (Nietzsche)

Dans ce scénario original et à tout moment surprenant, le rapport au père se fait dans l’absence, la relation à la mère-patrie se joue à l’étranger dans un pays en guerre, alors que l’attachement aux femmes se dit en creux. Transfert, déplacement, refoulement, identification, affection par procuration, et confusion entre le moi et l’autre ; le nom du père devient la perte de soi, et la mort de l’autre devient la renaissance possible d’un moi blessé.

Comment grandir sans père ? (Photo Les Films Hatari)

Tous les plans sont comme nimbés d’une tendresse bourrue à l’égard de chacun des personnages qui s’expriment le plus souvent dans la langue de l’indicible, alors que les visages parlent avec l’accent de la douleur, de la nostalgie et de la force incomparable des amitiés indéfectibles. La notion de famille s’élargit alors que celle de terre d’asile tend à se rétrécir dans la cruauté d’une administration sans cœur. L’enfant et l’adulte se retrouvent chaque fois dans un face à face ou rien n’est naturellement donné, tout est à arracher aux griffes d’un destin impitoyable.

« L’existence précède l’essence » (Sartre)

Un grand homme est celui qui est capable de penser l’ordre des choses tel que la vie le lui suggère et ce, à partir de la conscience de sa finitude. Cet ordre si simple en apparence, se complexifie très rapidement dès le moment où l’on réalise que la liberté d’action dont chacun rêve, ne peut s’exercer aux dépends de ce que vivent nos proches. La relation très émouvante des deux légionnaires prêts à mourir l’un pour l’autre, tout comme celle de ce père qui s’expatrie cinq ans dans le but de donner une terre d’asile à son fils, ne respirent à aucun moment le sacrifice ou l’obligation. L’émotion des situations sobres et dignes est portée par l’authenticité qui émane de chaque acteur, malgré le fait que le réalisme ne soit pas forcément au rendez-vous.

La force de ce film qui déploie de façon tout à fait particulière l’évolution d’un homme (ou d’un enfant) qui choisit de devenir « grand », est de laisser la simplicité donner la mesure des moments clé de l’existence. Sans verser dans le tragique ou dans un pathos vendeur, la mort, le deuil, et les pires blessures s’intègrent à la vie de celui qui fait de son attachement à l’autre le sens de chaque combat.

À voir au cinéma Star à Strasbourg. Séance spéciale avec la réalisatrice Sarah Léonor ce lundi 25 Aout, au Star, à 20h15.


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