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L’association La Station au cœur d’une affaire de violences sexuelles

Dédiée à l’accueil des personnes LGBTI, La Station a été contrainte de fermer ses locaux en mars dernier. Une personne de l’association est accusée de violences sexuelles.

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C’est une présidente dans la tourmente. Garance Coquart-Pocztar a débuté son mandat de présidence de l’association La Station à la fin du mois d’avril, en pleine crise interne. « Il fallait bien que quelqu’un se charge de cette mission ! », sourit timidement la jeune femme de 30 ans, autrice de bandes-dessinées. L’association, qui regroupe une soixantaine de bénévoles et une centaine d’adhérents, dédiée à l’accueil des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans et intersexes (LGBTI) à Strasbourg, connaît en effet une crise sans précédent depuis sa création il y a 13 ans. Le lieu est même fermé depuis le 21 mars. En cause : des accusations de violences sexuelles en interne, comme l’ont évoqué les Dernières nouvelles d’Alsace le 24 avril.

Le local de La Station, centre d’accueil des personnes LGBTI à Strasbourg, est fermé depuis le mois de mars, en raison d’un signalement pour des violences sexuelles. Photo : CS / Rue89 Strasbourg

Un sondage interne classique qui se transforme en signalement de violences sexuelles

Garance Coquart-Pocztar raconte qu’en février, alors que l’association lance « un sondage interne pour voir la qualité de l’accueil et ce qu’en attendent les bénévoles », un signalement alerte les instances dans les réponses. Il s’agit « d’un signalement de violences sexuelles », déclare Garance Coquart-Pocztar, « que l’on a évidemment pris très au sérieux, immédiatement ».

Y a-t-il eu plusieurs victimes ? Les victimes, les auteurs ou les autrices sont-elles des bénévoles ou des salariées de l’association ? De quelle nature sont les faits signalés ? « Nous ne répondons pas à ces questions, afin de protéger les victimes », coupe assez vite la présidente de La Station.

Un appel à témoins sur les réseaux sociaux en parallèle

Mais l’info a tout de même dû fuiter, puisque le 9 février, Ouvrons les Guillemets publie sur Facebook un appel à témoins à ce sujet. L’association qui lutte contre les violences sexistes et sexuelles, interpelle ses abonnés et demande si quelqu’un a « été victime ou témoin de faits de violences par une personne membre ou ayant été membre de l’Association strasbourgeoise La Station ».

Le message fait rapidement le tour du monde associatif strasbourgeois, mais aussi des élus.

La Ville également alertée par les associations accueillies à La Station

Floriane Varieras, adjointe à la maire de Strasbourg en charge des solidarités, du soutien aux personnes vulnérables, et de la lutte contre les discriminations, raconte ainsi avoir découvert l’existence d’un signalement de violences sexuelles à La Station sur les réseaux sociaux. Mais l’élue assure que l’association avait prévenu une chargée de mission de la Ville avant les publications. Floriane Varieras a également reçu, dans le même laps de temps, un mail d’alerte :

« Plusieurs associations nous remontaient des dysfonctionnements à La Station. Les trois quarts de la lettre pointaient des dysfonctionnements structurels, comme un problème de porte fermée alors qu’elles étaient censées y faire des réunions. Des choses qu’on voit dans beaucoup d’associations. Mais à la fin, il y avait un paragraphe différent. On y apprenait qu’Ouvrons les guillemets avait reçu des témoignages qui faisaient état de violences, qui auraient été subies au sein de l’association. »

Début mars, une réunion est organisée entre les services de la Ville et ces associations. « À la lecture du témoignage fait lors de cette réunion, je suis un peu choquée, et je me dis qu’il faut faire quelque chose rapidement », commente l’élue. Contactée, l’association Ouvrons les guillemets n’a pas répondu à nos questions.

Sur la porte de La Station, une petite affichette annonce la fermeture du local pour une durée indéterminée. Photo : CS / Rue89 Strasbourg

Fermeture de La Station et enquête interne

Dans les jours qui suivent, Floriane Varieras se rend au conseil d’administration de La Station. La Ville de Strasbourg subventionne l’association à hauteur de 40 000 euros par an. Une subvention qui existe depuis la création du lieu il y a 13 ans, et qui permet de payer le local, et le salaire de l’unique salariée. C’est d’ailleurs la plus grosse subvention à une association LGBT, explique l’adjointe à la maire :

« Lors de cette discussion avec les membres du CA, je leur ai dit qu’en tant que financeurs, on avait besoin de gages de prise en compte de cette alerte, et qu’on voulait voir ce qu’ils allaient mettre en place. J’ai quitté la réunion, puis j’ai vu après qu’ils avaient décidé la fermeture de l’accueil tout venant, le temps d’identifier les problèmes, et de s’assurer qu’ils ne puissent plus avoir lieu. »

Floriane Variéras a effectué un signalement à la procureure de la République de Strasbourg, selon les DNA. De son côté, La Station a informé la Ville qu’elle va mener une enquête interne, et qu’elle se fera accompagner par une structure spécialisée, Egae. Une sage décision, selon l’élue aux solidarités : « Je trouve que c’est bien d’avoir cet accompagnement, organisé, et extérieur à l’écosystème strasbourgeois. »

« Il est crucial de garder un lieu LGBT à Strasbourg »

Garance Coquart-Pocztar semble déterminée à ce que l’enquête interne soit efficace et menée avec rigueur. La jeune femme explique que toutes les membres du conseil d’administration sont touchées par cette affaire, et qu’elles en attendent une résolution à la hauteur de la gravité de la situation :

« C’est sûr que pour une association qui lutte contre les discriminations, c’est dur de se rendre compte qu’il peut y avoir des agressions ou du harcèlement. C’est aussi pour ça qu’on se fait accompagner par une structure extérieure. Il y a un double enjeu pour nous, car quand on parle de personnes LGBT, ce sont souvent des personnes qui peuvent déjà être précaires, en difficultés, et qui subissent des discriminations. Donc si en plus, il se rajoute une violence sexuelle ou sexiste dans nos locaux, c’est grave. »

Accueil de demandeurs d’asile LGBT

La présidente de La Station persiste à croire en l’importance de ce lieu unique à Strasbourg, malgré la crise qu’il traverse et les problèmes qui ont pu être les siens depuis plusieurs années (avec huit présidents ou présidentes différentes en six ans). Floriane Varieras (dont la compagne intervient au nom de La Station pour des missions scolaires, sans faire partie de l’équipe dirigeante) souligne également le rôle à part de l’association :

« Malgré ces perturbations, La Station remplit des missions que personne d’autre ne fait à Strasbourg, comme l’accompagnement et l’accueil des personnes demandeurs d’asile LGBT, leur accompagnement juridique, les interventions en milieu scolaire, le côté café associatif… Ce sont des missions hyper importantes à Strasbourg. »

Du côté des associations proches de La Station, le mot d’ordre est l’attente de la fin de l’enquête interne. Mathieu Wurtz est président de l’association Festigays :

« Il faut que l’enquête soit menée à son terme, et que la justice gère cette affaire. On espère qu’à terme La Station puisse rouvrir ses portes. »

La Station assure qu’aucune plainte n’a pour l’instant été déposée. Interrogée à ce sujet, la procureure de Strasbourg n’a pas répondu à nos questions.


#La Station

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