Dans les années 50, les affichistes comme Jacques Villeglé sont les premiers à s’intéresser au potentiel des surfaces initialement destinées à la publicité. La récupération des panneaux avec leurs couches d’affiches superposées et lacérées constitue un regard détaché et critique sur la société de consommation. Plus tard, le street art dans toute sa diversité squattera les murs de l’espace public et remettra en question la notion d’artiste, de musée, et de marché. Mais alors, que veulent les artistes de Plakat Wand Kunst ?
La pub devient art
Tout a commencé au début des années 80, à Karlsruhe. La peintre Angela Jung Eichhorn aperçoit des ouvriers en train de démonter l’un des deux panneaux publicitaires plantés devant sa maison. Elle les convainc de n’en rien faire, et s’approprie la surface avec une œuvre personnelle. Le vis-à-vis avec l’autre panneau détermine le propos initial de ce qui deviendra le groupe PWK : une critique de la publicité, une volonté de donner à voir l’art pour l’art, gratuitement. Mais rapidement, ce principe évolue et s’élargit, comme l’explique Gundula Bleckmann, l’une des artistes du groupe :
« Nous voulons que l’art vienne à la rencontre du public, de tous les publics, même ceux qui ne sont pas habitués à aller au musée. Nous exposons souvent dans des jardins, des universités, … Nous avons gardé le format de l’affiche publicitaire allemande (2,60 X 3,60 m) comme unique contrainte. »
Les panneaux sont fabriqués par les artistes et installés dans des cadres autorisés, comme depuis plusieurs années au Jardin des Deux-Rives. Point d’illégalité, mais une position assez originale par rapport aux expositions en extérieur, d’habitude plutôt tournées vers la sculpture ou l’installation.
Un lien transfrontalier
Pour l’exposition Faire le mur, Zone d’Art a choisi, dans une parité parfaite, 4 allemands et 4 français, 4 hommes et 4 femmes. Chacun a sa pratique personnelle, et les expositions PWK sont l’occasion de se retrouver régulièrement lors d’exposition dans plusieurs pays européens. Des œuvres de plus petit format sont à découvrir à l’intérieur dans la galerie « Le Couloir », où l’on peut jouer à déceler les différences introduites – ou pas – lors du passage au grand format.
PKW n’est pas un groupe fermé, au contraire : chaque exposition est l’occasion d’inviter au moins un artiste. Ici, c’est l’incontournable plasticien strasbourgeois Nicolas Schneider, qui a appliqué sa technique d’agrandissement de croquis au lavis sur un support inattendu : la fibre de verre. Résistante aux intempéries, elle offre une matérialité proche du papier aquarelle.
Zone d’Art est installée parmi un ensemble de bâtiments, anciennement usine de sous-vêtements Triumph, où les partenariats avec les entreprises voisines se développent. Sylvie Villaume, l’une des exposantes et fondatrices du lieu il y a une quinzaine d’années, s’en réjouit :
« Les voisins nous ont prêté leurs murs pour l’exposition. Les employés et les clients sont ainsi confrontés à l’art, ça ne peut pas faire de mal ! De plus, depuis le changement de tracé de la route pour Kehl, nous avons de plus en plus de curieux qui s’arrêtent. »
Dans cette zone en mutation qu’est le Port du Rhin, Zone d’Art a pour sûr son rôle a jouer. Ses vingt ateliers d’artistes – des plasticiens, mais aussi une costumière et des musiciens – seront visitables lors des Ateliers Ouverts en mai, avec quelques surprises au programme.
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