Rue de Picardie à la Meinau, une dizaine d’élus socialistes attendaient ce matin François Hollande. Venu ici parler de politique de la ville, après un petit tour dans ce quartier populaire, et surtout avant un débat – qu’on imagine d’avance de haute volée – avec le philosophe Peter Sloterdijk, dans le cadre des Journées de Strasbourg. A la suite d’un bus de la CTS, affrété spécialement et rempli de journalistes, la voiture du candidat se gare sur le terre-plein en friche. Immédiatement, c’est la cohue. Une cohue comme ici l’on connait que lors des visites (fréquentes) du président Nicolas Sarkozy. Seules différences : ce sont les élus socialistes – le maire Roland Ries, le président de la CUS, Jacques Bigot, une nuée d’adjoints…, qui entourent le favori de la Présidentielle, et non la masse des élus UMP locaux. Et pas un car de CRS, ni un policier à l’horizon.
Leur présence serait de toute façon superfétatoire, puisque le quartier est on ne peut plus calme. Sous le soleil, quelques habitants gravitent de loin autour du cortège. De rares audacieux osent un « allez M. Hollande, vous allez gagner ! », au balcon d’immeubles de logements sociaux. Ici, l’accueil est chaleureux, le candidat PS semble porter les espoirs des gens du quartier – de ceux qui s’expriment en tout cas.
Au Salon de thé, un accueil bon enfant
Tout au long de la visite, télés et radios ne quittent pas François Hollande, qui marche tranquillement, entouré d’un staff aux aguets. Là, il se fait expliquer la restructuration du quartier, rythmée par les démolitions-reconstructions. Ici, il entre au Salon de thé (bar PMU) de la rue de Normandie, et y reçoit, assurent ceux qui en ressortent, un accueil bon enfant. Puis arrive aux abords du théâtre Pôle sud, où l’attend un aréopage de candidats bas-rhinois aux élections législatives.
Avant qu’il ne monte sur la scène, habituellement fréquentée par des compagnies de danseurs, aux premiers rangs, les esprits des élus s’échauffent. « Non, je ne bougerai pas d’ici », s’énerve le conseiller municipal Paul Meyer, à l’adresse d’un membre du cabinet, en charge de l’organisation de l’évènement. « Lui, il reste, alors moi aussi. » Ambiance. « Toujours une brochette de costumes devant », s’agace quant à elle Souad El Maysour, une autre élue, reléguée au deuxième rang.
Puis vient le discours. Plus à l’aise devant cet auditoire conquis qu’hier soir, sur France 2 face à Jean-François Copé, Hollande décline quelques-uns de ces engagements de campagne : création d’un ministère de l’égalité territoriale, sorte de super organe d’aménagement du territoire, l’encadrement des hausses de loyers à chaque changement de locataires, la construction intensive de logements sociaux, le déplafonnement du livret d’épargne jusqu’à 30 000€, la rénovation thermique de 600 000 logements privés, l’accueil en classes préparatoires aux grandes écoles d’élèves des quartiers populaires, la prise en compte d’une « clause d’insertion » dans le choix des entreprises répondant aux appels d’offres des collectivités…
« Débattre avec un philosophe, ça me change »
Mais déjà, le candidat est en retard et attendu ailleurs. Alors que les journalistes parisiens remontent dans le bus, direction le centre-ville, le candidat dans sa voiture rejoint l’Opéra où il doit débattre avec le philosophe allemand Peter Sloterdijk. Avec 35 minutes de retard, et après avoir échangé avec quelques employés de l’usine de papeterie à vendre Stracel, il s’installe aux côtés du flamboyant essayiste.
Là, une intense discussion s’installe sur les questions de « promesses » aux populations, de « rêve français », d’espérance et de refondation de la démocratie. A noter qu’en préambule, il a remarqué, goguenard : « Je remercie le Nouvel Obs de m’avoir invité à débattre avec un philosophe, ça me change ». Rires. L’auditoire est conquis et ne sera pas déçu par la qualité des échanges.
A 14h30, Claude Weill, directeur de la rédaction du Nouvel Observateur, clôt l’échange. Hollande glisse quelques mots à l’oreille de son contradicteur allemand. Puis s’éclipse, un petit sourire détendu aux lèvres. Strasbourg, ça c’est fait.
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