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La fusion des agences alsaciennes bloquée

Il était question de fusionner les agences de développement économique et touristique d’Alsace. Mais le « non » au référendum sur la collectivité unique a brisé cet élan. Les élus ne sont plus guère prêts à lâcher quoi que ce soit pour que ce rapprochement ait lieu. Rue89 Strasbourg publie les rapports d’audits sur ces six agences.

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Guy-Dominique Kennel, président du conseil général du Bas-Rhin, Philippe Richert, président du conseil régional d’Alsace et Charles Buttner, président du conseil général du Haut-Rhin pendant la campagne du référendum sur la collectivité unique (Photo Claude Keiflin)

Plus de 30 millions d’euros d’économies sur cinq ans, voilà ce que la fusion des trois agences économiques (Adira, Cahr et Alsace International) et des trois agences touristiques alsaciennes (comité régional du tourisme et les deux associations départementales) apporterait. Ce chiffre invérifiable avait été lâché par le président du conseil régional Philippe Richert lorsqu’il était pressé d’indiquer quelles économies seraient tirées d’une fusion des collectivités territoriales.

Après l’échec du référendum alsacien du 7 avril, la fusion des agences n’a pas été abandonnée officiellement mais l’ambiance autour de ces négociations a été sévèrement plombée. Les présidents des trois collectivités territoriales se sont réunis mardi 2 juillet pour la première fois depuis le référendum, ils ont évoqué brièvement le sujet… pour le repousser.

Les Bas-Rhinois fatigués par les Haut-Rhinois

Car Philippe Richert et Guy-Dominique Kennel, président du conseil général du Bas-Rhin, ne sont plus prêts à accepter n’importe quel compromis avec le Haut-Rhin pour permettre la fusion. Et ce, d’autant que Charles Buttner, président du conseil général du Haut-Rhin, envoie de nouveau des signaux contradictoires : en juin, il a déclaré devant des élus régionaux à Paris qu’il n’était plus question d’une « fusion » des agences économiques mais plutôt d’un « rassemblement » des compétences, avec un comité de pilotage basé à Colmar.

Ben voyons ! Selon plusieurs observateurs, Guy-Dominique Kennel se serait étranglé lorsqu’il a appris la nouvelle position de son homologue haut-rhinois. L’actuel président de l’Adira apprécie son outil de développement économique, il s’implique personnellement dans la gestion des affaires, il est en relation constante avec le directeur général, Vincent Froehlicher. Guy-Dominique Kennel ne voit donc plus bien quel avantage il y aurait pour les Bas-Rhinois, à fusionner avec le Haut-Rhin, qui de toutes façons regarde vers Bâle et la Suisse.

Quant à Alsace International (AI), l’agence de la Région, son activité est indépendante de celle des agences départementales, comme l’ont confirmé deux audits commandés par les trois collectivités territoriales. Ainsi, l’étude du cabinet Cofimé note :

« Les missions d’AI sont très spécifiques et ne recoupent pas celle des agences départementales, avec la prospection à l’international, la tenue d’un réseau de correspondants dans 11 pays, sauf pour la promotion de l’Alsace dans le monde… »

Consulter le rapport Cofimé sur les agences économiques

Ces rapports (voir ci-dessous pour les cinq autres) ne sont guère éclairants, mais ils relèvent qu’aucun obstacle juridique n’empêche la fusion des agences, autant économiques de touristiques. Il ne manque donc que la volonté politique. Comme le note un proche du dossier :

« Les points de blocage sont les mêmes que pour la fusion des collectivités. Où seraient les sièges de ces entités ? Charles Buttner demande qu’ils soient dans le Haut-Rhin, les Bas-Rhinois ne sont pas d’accord. Et puis, fusionner les agences reviendrait à se séparer ou à rétrograder au moins 4 directeurs, qui n’ont pas démérité. Mais le problème de fond est que les élus des différentes collectivités ont assigné des objectifs différents aux agences et qu’ils ne sont pas prêts à perdre ces leviers. »

« Des postes pour les élus de la majorité alsaciennes »

Pour Pernelle Richardot, élue PS d’opposition au conseil régional, il n’y a pas à tergiverser :

« La fusion des agences est possible, on le dit depuis plus de 10 ans. Si ça bloque, c’est à cause des forts taux de rémunérations qui existent dans ces agences, dont les postes sont parfois proposés à des élus, comme Monique Jung et Roland Danesi, qui sont tous les deux vice-présidents du conseil régional et respectivement directeurs adjoints à l’Adira et directeur administratif du Cahr. Je note aussi que les rapports pointent que ces agences sont opaques, aucune n’est en mesure de fournir un « reporting » formalisé de leur activités aux élus. »

La question de l’efficacité des agences n’est pas abordée dans les rapports, mais elle est de toute façon difficile à mesurer. Pour les agences économiques, chacune d’entre elles fait valoir chaque année lors de la remise de son bilan d’activités un nombre d’emplois créés ou sauvegardés grâce aux investissements internationaux qu’elles auraient contribué à conclure. Quant aux agences touristiques, elles s’appuient sur le nombre croissant de touristes en Alsace.

Aller plus loin

Sur Rue89 Strasbourg : consulter les rapports Cofimé et Grant Thornton sur les agences économiques, Cofimé et Bernheim sur les agences touristiques.

Sur L’Alsace : Pourquoi la fusion des agences économiques est encore bloquée


#Charles Buttner

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