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Food trucks pour étudiants et mesures réchauffées : le grand flou du pacte des solidarités dans le Grand Est

Présentée par la préfète du Grand Est mercredi 25 octobre, la déclinaison locale du pacte des solidarités reste floue. Les mesures concrètes sont peu nombreuses et le montant global de l’engagement de l’État n’est pas encore connu.

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Comme Mohammed, rencontré lors d’un reportage en décembre 2022, de nombreuses personnes cumulent des heures d’intérim sans pouvoir dépasser le seuil de pauvreté

Sous les moulures dorées de l’hôtel préfectoral, le directeur général adjoint de l’Institut national de la statistique (Insee) Grand Est, Vivien Heim, a présenté mercredi 25 octobre deux analyses de la pauvreté dans la grande région.

Au total, 764 000 personnes, soit 14,5% de la population du Grand Est, vivent avec un revenu sous le seuil de pauvreté, fixé à 1 120 euros nets par mois pour une personne seule. Une autre étude a établi qu’en 2019, dans le Grand Est, 8% des travailleurs vivaient dans un ménage pauvre. Au total, 339 000 ménages du Grand Est soit environ 764 000 personnes, sont considérées comme pauvres.

Le diagnostic de l’Insee est clair mais face à cette situation, les mesures gouvernementales restent beaucoup plus floues.

Rien de tel que les moulures dorées de l’hôtel préfectoral pour aborder la la pauvreté dans la Région Grand Est. Photo : Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc

Un « plan de gestion de la pauvreté »

Les annonces gouvernementales en matière de lutte contre les inégalités étaient attendues depuis janvier. Après plusieurs reports, la Première ministre Élisabeth Borne a présenté le pacte des solidarités le 18 septembre. Il doit être contractualisé au niveau régional et local d’ici la fin 2023. Le plan déçoit pour l’instant les fédérations et associations de lutte contre l’exclusion. Cité par la Gazette des communes, Noam Léandri, représentant du collectif Alerte, dénonce un « plan de gestion de la pauvreté (…) qui ne fixe aucun objectif chiffré de réduction de la pauvreté et ne prévoit rien pour évaluer l’efficacité des mesures prises ».

Plus d’un mois après la présentation d’Élisabeth Borne, les mesures concrètes annoncées par la préfète du Bas-Rhin Josiane Chevalier ce mercredi 25 octobre sont peu nombreuses. Le premier axe du pacte des solidarités porte sur la lutte contre la pauvreté dès le plus jeune âge et la lutte contre les inégalités de l’enfance. Dans ce domaine, la préfète a mis en avant la création d’un « service public de la petite enfance » dont l’objectif est de créer 200 000 places de garde supplémentaires dans des crèches au niveau national.

Mais Josiane Chevalier n’a donné aucun détail sur le nombre de places prévues dans le Grand Est. Elle a aussi rapidement évoqué des mesures prises par le passé : la revalorisation de 50% de l’allocation de soutien familial (mise en place en octobre 2022) et la pérennisation des repas du Crous à un euro pour les étudiants boursiers (annoncée en mars 2023).

Des mesures réchauffées

Autre objectif affiché du pacte des solidarités : l’amplification de l’accès à l’emploi pour tous. Sur ce point encore, la préfète a servi du réchauffé. Josiane Chevalier a d’abord évoqué la mise en œuvre de France Travail, dont la mesure phare porte sur l’obligation de réaliser 15 heures de bénévolat par semaine pour les allocataires du Revenu de solidarité active (RSA). La préfète a ensuite avancé « la poursuite du contrat d’engagement jeunes », un dispositif qui s’adresse notamment aux 16-25 ans qui ne sont ni étudiants, ni en activité, ni en formation, et qui peinent à accéder à un emploi durable. Les jeunes s’engagent auprès d’un conseiller d’insertion, à travailler 15 à 20 heures par semaine tout en percevant une allocation de 534 euros par mois. Deux actions qui existent en dehors du pacte des solidarités, donc.

Un troisième axe du dispositif porte sur la « lutte contre la grande exclusion ». Dans ce domaine, la préfète du Grand Est a mis en avant l’expérimentation du dispositif « Territoire zéro non-recours » en Meurthe-et-Moselle et sur le territoire de l’Eurométropole de Strasbourg. Cette politique vise à « déployer la solidarité à la source pour éviter le non-recours aux prestations sociales ». Annoncée fin mars, la mesure doit mobiliser les collectivités, associations, caisses de Sécurité sociale et autres bailleurs sociaux pour informer et accompagner les personnes sur leurs droits : accès au RSA, à la Prime d’activité, mais aussi au chèque énergie, aux aides aux logements et aux services publics.

Le dernier volet du pacte des solidarités est dédié à la transition écologique. Dans ce cadre, la préfète a listé trois mesures : « un leasing social à 100 euros par mois pour une voiture électrique« , une réforme du dispositif « Ma prime rénov’ », attendue par de nombreux ménages depuis plus d’un an, et une « généralisation de la tarification sociale des cantines dans les collèges » : une action qui devrait faire bondir le président de la Collectivité européenne d’Alsace, puisqu’il refuse de mettre en place une telle tarification dans les départements alsaciens.

Un montant global inconnu

Josiane Chevalier a terminé sa présentation par « les actions déjà lancées » dans le domaine de la nutrition. L’appel à projets « Mieux manger pour tous » bénéficie d’un budget de 1,5 million d’euros sur les quatre années du pacte. Il permettra notamment de lancer un « food truck solidaire en partenariat avec la Croix-Rouge pour les étudiants » et une épicerie solidaire à Commercy.

Mi-septembre, la Première ministre avait annoncé « une augmentation de 50% des crédits dédiés, par rapport à la stratégie précédente », sans toutefois donner un montant précis. Un mois plus tard, l’imprécision demeure. Interrogée sur le montant global du pacte des solidarités dans le Grand Est, la préfète n’a pas pu donner de chiffre : « On pourra vous donner un budget quand les pactes auront été complètement bouclés avec les collectivités. » Et Josiane Chevalier de prévenir : « C’est vraiment un plan global de lutte contre la pauvreté. Évidemment, les effets ne sont pas immédiats. On est quand même sur des tendances lourdes et les politiques dans le domaine de la petite enfance par exemple ne se mesureront qu’au fil des années. »


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