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Festival jazz de La Petite Pierre, à la croisée des mondes

Pour les amateurs de jazz et de verdure, le festival de La Petite Pierre constitue le compromis idéal. Tous les ans depuis une décennie, cette petite commune des Vosges du Nord, à une soixantaine de kilomètres au nord-ouest de Strasbourg, propose une affiche solide et relevée. Au Grès du Jazz, c’est à La Petite Pierre du 3 au 15 août.

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Moriarty (Photo DR)

Dix années de découvertes, d’explorations, de défrichage, de retrouvailles et de balades musicales dans ce bel écrin naturel à l’abri de grands sapins protecteurs. Sous l’œil bienveillant des acteurs et des témoins des siècles écoulés se dessinent et se jouent des partitions toujours atypiques et surprenantes. Le temps se fige du haut de ce promontoire rocheux millénaire, mais le monde n’en tourne pas moins vite pour autant. L’univers continue de frémir. Et lorsque le soleil darde ses rayons, La Petite Pierre immanquablement s’anime, bouillonne, s’emporte et explose.

Objectif : atteindre le nirvana sonore. Et pour l’occasion, on déverrouille la faille spatio-temporelle pour aller à la rencontre de figures tutélaires du jazz ancrées dans la magie des souvenirs et aussi de légendes encore bien vivantes de la note bleue. C’est donc là l’occasion de s’attacher à la fois à l’intense vibration de ses propres sens et de croire profondément aux forces de l’esprit que cette édition 2012 ne manquera pas de convoquer.

Il semble donc légitime d’ouvrir la marche avec deux hérauts passeurs de cultures et de traditions. Le vendredi 3 août, Eric Bibb se fera tout d’abord messager de cet americana-blues qui l’accompagne depuis sa prime enfance, un blues sudiste tout en souffrance, belle et admirable, tout en sueur et remugles et toujours porté vers cette soif perpétuelle d’affranchissement et de nouveau départ.

Viendra ensuite l’heure d’une transatlantique expresse pour rejoindre, en ce même jour, un griot malien ensorceleur – Habib Koité – dont les chants bambara ne feront que rajouter au magnétisme de son balafon et sa kora. L’immense richesse malienne sera encore à l’honneur le mardi 7 août avec Boubacar Traoré, l’un des plus illustres enfants de l’indépendance à l’existence marquée par la censure, les pressions, l’exil, les difficultés de l’émigration en France puis la renaissance et la reconnaissance artistique il y a deux décennies. La rumba bondissante des Kinois poliomyélitiques de Staff Benda Bilili (5 août) sera l’occasion d’une autre incursion africaine avant le grand écart de genre qu’illustrera, toujours le 5 août, la prestation assurément envoûtante, comme l’an dernier, de l’enchanteresse coréenne Youn Sun Nah.

Bluffants de maîtrise et d’inventivité, Les Chapeaux Noirs – quartet strasbourgeois mariant avec brio jazz, hip hop, reggae, electro et de multiples autres influences – chaufferont la place au pianiste cubain Roberto Fonseca (4 août), un temps compagnon de route du Buena Vista Social Club et grand adepte de la fusion entre latin jazz, rythmes afro-cubains et sonorités urbaines. Le dimanche 12 août sera, quant à lui, entièrement dédié au piano : au cœur d’une sorte de « battle » dans un premier temps, où deux monstres sacrés face à face, Kenny Barron – dernier pianiste de Stan Getz – et Mulgrew Miller, d’une dizaine d’années son cadet, converseront avec vigueur et tonicité avant un monologue très introspectif signé du Franco-Serbe Bojan Z dont la patte sèche et balancée reste imprégnée de cette gravité festive héritée de sa culture balkanique originelle.

Zakir Hussain (Photo DR)

Zakir Hussain, en revanche, est porté par sa filiation avec Alla Rakha mais désormais, le fils a dépassé le père et le soliste exprimera toute l’étendue de sa technique aux tablas le 6 août. Dans un creuset d’inspirations très diverses, le combo Moriarty, mené par l’intrigante Rosemary, viendra électriser le festival de sa présence irradiante (9 août) et de sa douce folie aux atours kerouacquiens et Les Célestins animeront Saverne avec leurs rythmes marqués par le jazz de la Nouvelle-Orléans (8 août). Le saxophoniste Jacques Schwarz-Bart, brodeur de mélodies finement ciselées, illuminera lui aussi le public de sa fougue gwoka débridée, renvoyant ainsi à ses origines guadeloupéennes (10 août). Trompette et guitare rugueuse se répondront le 11 août dans un dialogue à l’énergie poétique entre Rodolphe Burger et Erik Truffaz , juste après le trio de Michael Alizon. L’oudiste émérite tunisien Anouar Brahem (14 août) nous rappellera ensuite l’abondante et raffinée diversité de la musique d’un monde arabe en pleine mutation depuis plus d’un an avant qu’Avishai Cohen et son trio (15 août) ne viennent refermer cette dixième édition du festival par un échange que l’on imagine subtilement explosif et forcément virtuose, à la croisée des chemins et des mondes.

 

Y aller

Festival Au Grès du Jazz à La Petite Pierre, du 3 au 15 août.
Programme et infos pratiques ici.


#au grès du jazz

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