Combien pèsent 2 000 pages ? Trônant au milieu de la salle de réunion, le tas de paperasse attire l’œil et attise les questions. Derrière cette muraille de documents, la présidente de l’Eurométropole, Pia Imbs, balaie la pièce du regard. Autour d’elle, toute la presse s’est massée au centre administratif, mardi 3 septembre, pour écouter les annonces de l’exécutif métropolitain sur le lancement de l’enquête publique, concernant l’extension du tram reliant les communes de Schiltigheim et Bischheim à Strasbourg.
Objet de débats vifs et d’une forte mobilisation d’opposants, notamment contre son passage par l’avenue des Vosges, le tram nord sera à discuter du 9 septembre au 18 octobre, soit pendant 40 jours. À l’issue, une commission d’enquête publique, indépendante, va examiner l’ensemble des éléments apportés et rendre un avis, favorable avec réserve ou défavorable, à la déclaration d’utilité publique du projet.
Périmètre des investigations
« Il n’y aura pas de remise en cause du tracé choisi, ce n’est pas l’objet de l’enquête publique », martèle Alain Jund (Les Écologistes). En creux, le vice-président de l’Eurométropole de Strasbourg (EMS) en charge des mobilités s’attend à ce que l’opposition utilise l’enquête publique pour battre campagne contre des points du projet qu’ils réprouvent, notamment le passage du tramway par l’avenue des Vosges. « Cette enquête publique arrive au bout de quatre années de consultation, et pendant quatre ans il y a déjà eu ce débat », renchérit l’écologiste.
« Nous avons été très attachés à fournir un dossier complet, qui remplit toutes les exigences règlementaires et qui permet de garantir la bonne transmission de l’information », plaide le directeur du service des mobilités, Pierre des Roseaux. Interrogé après la réunion, dans l’un des étages supérieurs du centre administratif, le technicien paraît confiant dans la solidité du dossier transmis – 2 000 pages de notices explicatives, d’études d’impacts et une forêt de documents administratifs :
« C’est la commission d’enquête qui a la main désormais. Elle va écouter ce que l’ensemble des partis prenantes ont formulé comme observations sur le projet. En fonction, elle fera part de ses réserves ou de ses recommandations. Pour l’extension en cours du tram ouest, il y a eu trois réserves par exemple (dont deux ont mené à des modifications, NDLR). »
Ce « dialogue » entre la commission d’enquête et la collectivité prend en général un mois, explique le directeur. Après cela, c’est à la préfecture de prononcer une « déclaration d’utilité publique », qui permettra le démarrage des expropriations, puis des travaux. Dans un scénario sans accroc, ces derniers débuteraient courant 2025, pour être achevés en 2027.
27 assos vont défendre le tram nord
À quelques stations de tram de là, dans un café populaire du centre-ville, François Giordani et Jean-Luc Marchal commentent la conférence du matin. Tous deux membres du collectif « Cap tram nord », qui réunit 27 associations favorables au projet, ils paraissent sereins face à cette nouvelle phase. « On n’a pas vraiment de crainte pour l’enquête publique », confirme François Giordani :
« La seule crainte, c’est que ceux qui sont pour le projet ne se mobilisent pas, et qu’il n’y ait que des opposants qui s’expriment. C’est pour ça qu’on va inciter les gens à se manifester, en organisant notamment deux permanences à Strasbourg et Schiltigheim. »
« On va préparer un prospectus pour expliquer les enjeux de l’enquête publique », renchérit Jean-Luc Marchal. S’ils s’accordent sans ambiguïté pour défendre l’utilité du projet, ils profiteront également de l’enquête publique pour faire remonter leurs critiques, notamment sur l’amélioration des pistes cyclables.
Une balade à vélo, le long du tracé prévu, est également au programme vendredi 6 septembre, suivie d’une balade à pied dans la Neustadt, dont la date n’est pas encore fixée, pour évoquer le patrimoine architectural.
40 jours de contestations pour l’opposition
En face, chez les opposants au projet et à la municipalité, on se remobilise également. « C’est un moment charnière », tranche d’emblée Pierre Jakubowicz (Horizons). En tant que conseiller municipal d’opposition, il s’est autant investi contre le projet dans l’hémicycle que dans une série de réunions publiques :
« Je vois bien dans les propos tenus, notamment par Alain Jund, que la stratégie consiste à faire croire que ce n’est qu’une formalité. Or ce n’est pas le cas, puisque la déclaration d’utilité publique (qui s’appuiera notamment sur l’enquête publique, NDLR) sera nécessaire pour la poursuite du projet. Nous mettrons tous les éléments dont nous disposons pour remettre en cause son utilité publique. »
L’élu d’opposition compte bien se mobiliser pendant toute la durée de l’enquête publique : « Il y a 40 jours devant nous, on se mobilisera et on fera entendre l’ensemble de nos arguments. Dès la semaine prochaine, je recommence à organiser des réunions publiques et des actions de terrain pour informer les gens. » Une première réunion publique se tiendra ainsi au Foyer de l’étudiant catholique, mardi 10 septembre.
Partisans et opposants au projet – ainsi que ceux qui ne tranchent pas – pourront se retrouver lors d’une réunion animée par la commission d’enquête publique, mardi 12 septembre à 19h, au Palais des fêtes.
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