« Ça m’est déjà arrivé quatre fois d’être recouvert de cendres toxiques. Sous la douche à l’incinérateur, je me rendais compte que j’en avais partout sur le corps, de la tête aux pieds. » Maxime (le prénom a été modifié) travaille à l’incinérateur de Strasbourg depuis plusieurs années. Avec la perquisition des bureaux de l’usine en février 2023, l’ouvrier a pris conscience du danger encouru du fait de l’exposition régulière des salariés de Sénerval aux cendres ultimes d’incinération, connus sous le nom de CMR pour leurs effets cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques.
« Depuis l’intervention de la police, je suis devenu anxieux. J’ai entendu parler d’anciens salariés qui ont développé des cancers Je me demande si ma santé restera bonne. » Maxime fait partie de ces employés de l’Unité de Valorisation Énergétique (UVE) qui se sont constitués partie civile dans l’enquête en cours pour « mise en danger de la vie d’autrui » visant l’entreprise Sénerval, filiale du groupe Séché.
« Il faut que la justice fasse éclater la vérité »
Matthieu Schneider, délégué CGT de Sénerval
Selon le délégué syndical CGT de l’entreprise Sénerval Mathieu Schneider, « entre 30 et 35 salariés actuels et une quinzaine d’anciens employés de l’incinérateur se sont constitués partie civile. » Le syndicaliste explique avoir incité les ouvriers et autres retraités à entamer cette démarche dans le cadre de l’enquête en cours :
« On a expliqué aux salariés que s’ils s’estiment victimes d’une exposition, ils doivent se constituer partie civile. Comme ça, si le groupe Séché est condamné, ils pourront être dédommagés. »
Mathieu Schneider espère que cette somme de constitutions de partie civile poussera la juge d’instruction en charge du dossier à mettre en examen les dirigeants de l’entreprise Sénerval :
« Il faut que la justice fasse éclater la vérité. Les salariés de l’incinérateur ont été exposés à des cendres cancérigènes pendant des années. La direction de l’usine n’a jamais respecté les règles en terme de protection des ouvriers. Il a toujours fallu forcer la direction pour que l’exposition aux cendres CMR soient réduite ou que les ouvriers soient équipés de matériel de protection. »
Plus d’une centaine de personnes auditionnées
Didier fait partie de ces anciens salariés qui se sont constitués partie civile à l’issue d’une audition par la police. « À la fin de l’entretien, l’enquêtrice m’a demandé si je voulais me constituer partie civile. » L’ancien ouvrier, atteint d’un cancer, estime que sa maladie est liée à l’incurie du groupe Séché, délégataire de service public pour l’incinérateur de Strasbourg.
Le syndicat de consommateurs de la CGT, Indecosa, s’est également constitué partie civile, estimant que la pollution engendrée par les cendres toxiques à l’extérieur de l’usine peut affecter les riverains de l’incinérateur.
Selon nos informations, la police et l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) ont auditionné plus d’une centaine de personnes, entre actuels ouvriers de l’usine, anciens salariés et autres retraités. Les différents agents de l’inspection du travail en charge du suivi de l’incinérateur ont également été auditionnés.
Sollicité, le parquet de Strasbourg n’a pas donné suite à notre demande concernant le nombre actuel de personnes qui se sont constitués partie civile.
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