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Embouteillages et incivilités… À la Meinau, l’entrepôt Amazon sature la rue Livio

Amazon provoque quotidiennement des embouteillages près de son entrepôt situé dans le quartier de la Meinau. Entre incivilités des livreurs et investissement dans des portails pour fermer l’accès à leur parking, les entreprises voisines de l’entrepôt de la rue Livio paient fort le prix de leur voisinage.

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Une dizaine de camionnettes stationnent sur la route devant l’entrepôt strasbourgeois d’Amazon. Il est 9h30, mardi 27 octobre. Les chauffeurs des entreprises sous-traitantes attendent l’ouverture du portail de la multinationale américaine.

Feux de détresse allumés, ils occupent la voie de droite de la rue Livio. Les transporteurs obligent ainsi les automobilistes et autres camionneurs à prendre le virage à contresens. « On est juste là pour cinq minutes », veut rassurer un conducteur intérimaire, avant d’admettre : « Le problème c’est qu’après nous, une autre vague de camionnettes arrivera… »

Les camionnettes qui stationnent sur la voie de droite obligent des automobilistes à prendre le virage à contresens. (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

« Un bordel monstre depuis des années »

Installé depuis 2017 à Strasbourg, l’entrepôt Amazon s’étend sur 5 000 mètres-carrés. 80 personnes y sont salariées à temps plein, et 60 intérimaires y travaillent en plus. Pour la « livraison du dernier kilomètre », le géant américain sous-traite auprès de cinq sociétés de livraison : Globe Express, AG Express, Easy to go et Fast Dispatch. Ces entreprises emploient 250 chauffeurs. Selon la communication de la multinationale : « Ce sont plusieurs dizaines de milliers de colis qui partent chaque jour de l’entrepôt. Sur les périodes de fête, ce volume peut doubler. »

Les voisins strasbourgeois d’Amazon dénoncent volontiers les embouteillages incessants provoqués par la multinationale de Jeff Bezos. « C’est un bordel monstre depuis des années ici », souffle Sabine (le prénom a été modifié) en arrivant au travail. En pleine vacances de la Toussaint, la salariée d’une entreprise de la rue Livio est venue en voiture avec sa fille : « Quand j’ai la petite avec moi, je prends un autre chemin. Amazon a rendu ce virage beaucoup trop dangereux. »

Le matin, la rue Livio est régulièrement bouchée par les camionnettes en attente de chargement dans l’entrepôt strasbourgeois d’Amazon (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

À côté, la quincaillerie Ferbat subit aussi le flux de livreurs. En trente ans de présence dans cette rue, c’est la première fois que l’entreprise a dû investir dans un portail pour barrer l’entrée de son petit parking. Coût de l’investissement : 15 000 euros. Pour Michel Fernandes, directeur adjoint de l’établissement, « c’était le seul moyen pour que nos clients et nos fournisseurs aient de la place pour se garer chez nous. »

Déchets et insultes…

Juste en face, le magasin Yess électrique subit aussi la présence des camionnettes sur son parking. Le chef magasinier Jean-Philippe Frère y voit même une perte de chiffre d’affaires : « Je ne compte pas le nombre de clients qui sont allés chez nos concurrents parce que toutes nos places étaient occupées par les Amazoniens. »

À peine sa phrase finie, le responsable des achats entend un véhicule arriver devant son entreprise. Il reconnaît un livreur Amazon à son gilet jaune, parfois orange : « En voilà encore un qui se gare chez nous… Et c’est sans compter les emballages alimentaires qu’ils laissent traîner par terre », peste-t-il, images à l’appui.

Jean-Philippe Frère : « Je ne compte pas le nombre de clients qui sont allés chez nos concurrents parce que toutes nos places de parking étaient occupées par les Amazoniens. »

Plusieurs autres salariés de la rue Livio ont fait part d’incivilités récurrentes. Ici, un livreur a insulté la directrice d’un établissement. Là, un fournisseur de magasin de matériel électrique doit bomber le torse pour prendre une place de parking occupée illégalement par un livreur Amazon…

En manque de place, un site non-adapté

Au-delà de la colère, l’incompréhension règne parmi les voisins d’Amazon. Pourquoi est-ce que les gérants ne laissent pas les chauffeurs patienter dans l’enceinte du site ? Michel Fernandes a posé la question à Amazon : « La responsable logistique du site, une Polonaise basée à Londres, m’a dit qu’ils avaient du mal à régler le problème vu que les chauffeurs sont employés par des entreprises sous-traitantes. »

Salem (le prénom a été modifié) fait partie des rares habitants de cette zone artisanale. Le père de famille décrit une « situation invivable » depuis l’arrivée d’Amazon à Strasbourg il y a trois ans. « Les camionnettes, les semi-remorques passent 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, décrit-il, la seule différence le dimanche, c’est que les camions viennent de Pologne. » La nuit, on dort mal rue Livio. Salem est fatigué. Il a déjà songé à déménager.

Car la situation reste inchangée malgré les alertes auprès de la municipalité et de la police : « Ils se sont tous déjà déplacés, les policiers ont mis des amendes… Mais c’est leur site qui n’est pas adapté pour cette zone artisanale », analyse Salem.

Le problème va croître avec Noël et le confinement

Vers 10 heures du matin, le directeur du site strasbourgeois d’Amazon vient à notre rencontre. Mais Cyril Hetzel n’est pas là pour nous répondre. Il se contente de nous indiquer une adresse mail à qui envoyer nos questions pour « faire l’interview proprement. » Le responsable demande aussi de ne pas photographier l’entrepôt.

Plus tard, l’entreprise indiquera à Rue89 Strasbourg que « dans l’organisation d’Amazon, il n’y a pas de parking dédié aux livreurs mais une gestion par vague de chauffeurs, pour récupérer les colis dans le hangar. L’idée c’est d’avoir un flux continu et organisé. » Interrogé sur les mesures prises pour réduire les embouteillages, l’entreprise évoque des actions de « communication et de sensibilisation des livreurs ».

Amazon et ses sous-traitants, comme Globe Express, cherchent une aire de parking pour permettre aux livreurs de stationner hors de la rue Livio. (Photo Guillaume Krempp / Rue89 Strasbourg / cc)

Joint par téléphone, Anthony Caviglia, manager chez Globe Express, un sous-traitant d’Amazon, explique l’origine des bouchons récurrents : « Nous avons des vagues d’entrées dans l’entrepôt à heures fixes. Ce qui nous laisse un timing de 10 minutes pour synchroniser l’entrée de 12 vans, le moindre grain de sable qui vient perturber la routine peut générer des bouchons ce que nous essayons d’éviter au maximum. Nous travaillons constamment avec Amazon pour limiter l’impact de notre activité sur le voisinage et la circulation Rue Livio. »

Amazon à la recherche d’un nouveau parking

Le cadre de Globe Express affirme aussi qu’Amazon est à la recherche d’un nouveau site pour permettre aux sous-traitants de stationner à proximité de la rue Livio. « Une solution de parking est à l’étude actuellement », confirme la multinationale. Pour Anthony Caviglia, une solution doit être trouvée le plus rapidement possible, car la problématique risque de croître avec l’augmentation des commandes liées au reconfinement et à la période de Noël.

En deux heures sur place, trois vagues d’une dizaine de camionnettes ont forcé des automobilistes à rouler à contresens. Vers 10 heures, c’est un semi-remorque qui a bloqué la circulation au niveau de la quincaillerie Ferbat. Un conducteur de Globe Express analyse : « Depuis qu’ils ont mis en place un portail, les routiers galèrent pour entrer sur le parking. » Portail lui-même installé… à cause du stationnement des livreurs Amazon.


#Colis piégés

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