Le lendemain de l’évacuation du camp dit « des Canonniers » mardi 28 août, la troisième en 2019, le terrain vague est en passe d’être stérilisé. Ce triangle de terre, situé précisément rue Paul Dopff à côté de la rue des Canonniers au Neuhof, a fait l’objet de plusieurs occupations de sans-abris, qui y dormaient sous tente.
Le 27 août, 208 personnes dont 74 enfants, ont été prises en charge et orientées vers des structures dédiées aux demandeurs d’asile partout en France, le temps de l’examen de leur demande (environ 150 personnes avaient été identifiées comme vivant sur place). Mercredi 28 août, des piquets de bois de plus d’un mètre entourent cette parcelle d’herbe qui compte une quinzaine d’arbres. Deux fils de fers tendus relient certains en haut et en bas. Plus personne n’était sur place vers 16h30. Le lendemain, les poteaux posés ont été complétés par d’autres morceaux de bois pour créer une palissade.
Certains riverains de la rue de Châteauroux, contiguë de cette parcelle, avaient formulé une demande en ce sens au printemps, sans obtenir de réponse favorable. Le jour de l’évacuation, l’adjointe de quartier Annick Neff (PS) laissait entendre qu’elle n’était pas opposé à un tel aménagement dissuasif (« On va déjà nettoyer le terrain et replanter le gazon et peut-être ajouter une glissière souple », nous répondait-elle), contrairement à l’adjointe en charge des Solidarités, Marie-Dominique Dreyssé (EELV).
Le café 58, voisin de l’endroit et qui a participé aux gestes de solidarité en améliorant le quotidien des occupants (eau, toilettes, électricité) n’a pas effectué de demandes en ce sens, nous a confirmé son gérant. L’occupation à répétition des espaces publics à ce carrefour à l’entrée du Neuhof (voire plus bas) s’explique probablement par la proximité avec l’ancien hôpital militaire Lyautey, où il existe quelques places d’hébergement d’urgence, notamment en hiver.
L’espace fermé
Cinq verrouillages depuis l’automne 2017
Ce n’est pas la première fois qu’un espace public est neutralisé suite à une occupation de sans-abris, souvent des personnes demandeuses d’asile venues de l’Europe de l’Est (Balkans et ex-URSS).
La même méthode avaient été employée à l’automne 2017 sur les terrains rue du Rempart derrière la Gare. Fin 2018, le trottoir rue des Canonniers, occupé plusieurs fois depuis la fin 2017, a aussi été remplacé par des blocs de béton. En face, le square des Canonniers, occupé à l’été 2018, le portillon a été surélevé et une chaîne à cadenas ajoutée, pour fermer cet espace le soir (20h en hiver, 22h en été), ce qui relève de l’exception à Strasbourg. Au quai de Malte près de la Petite France, des clôtures (plus basses qu’aux Remparts) ont été installées en janvier 2019 suite à une évacuation semblable.
L’entrée du square des Canonniers, avant après
Ces repoussoirs n’ont pas évité la formation d’autres camps de sans-abris, à d’autres endroits. En un an, le nombre de personnes prises en charges via l’évacuation de camp ou désormais « au fil de l’eau » a presque quadruplé (de 274 en 2018 contre 796 à la date du 27 août 2019). D’autres installations similaires existent à Strasbourg, notamment à l’ouest de la ville.
Le collectif des Canonniers annonce qu’il compte « inform[er] le réseau des Villes « solidaires » dont Strasbourg fait partie pour en dénoncer les agissements locaux » et propose « à cette instance de réexaminer une telle candidature si un changement ne survient pas de suite. »
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