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Dégoutés de Deliveroo, des coursiers strasbourgeois lancent Kooglof, une plateforme de livraison locale

Les Strasbourgeois peuvent commander la livraison d’un repas sur Kooglof, une plateforme de livraison alternative à Deliveroo ou Uber Eats. Objectifs : soutenir les commerces locaux et offrir de meilleures conditions de travail aux coursiers.

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Et si la livraison de repas à domicile n’avait plus le goût amer de l’exploitation des coursiers par Deliveroo ou Uber Eats ? Jeudi 5 novembre, cinq coursiers strasbourgeois lancent Kooglof, une nouvelle plateforme pour la livraison des repas à Strasbourg.

Zone de livraison de Kooglof. (Document remis)

La commande passe par internet ou une application. Six restaurants strasbourgeois (Bistrot Paulus, Harmonie Bowl & Juice, Le pont aux Chats, Au Coin des Pucelles, Pizz’ArÔme et Le Labo) sont les premiers disponibles. « On commence volontairement sur un format réduit parce qu’on ne sait pas encore à quelle sauce on va être mangé », explique Florian Gentelet, vice-président de l’association Kooglof. « Dans les semaines qui suivront, on ajoutera un restaurant tous les trois jours », ajoute l’ancien livreur Deliveroo.

L’équipe de livreurs strasbourgeois et indépendants des mastodontes de la livraison. (Photo Marine Stieber)

Dégoût pour Deliveroo, envie d’éthique

Présidente de l’association, Marine Stieber décrit son dégoût pour Deliveroo, après deux ans passés à pédaler pour le mastodonte :

« À l’été 2019, le tarif minimum de la course est passé de 4,20 à 2,60 euros. Pendant le confinement, le nombre de livreurs a cessé d’être régulé en fonction des besoins. Je suis passée de 20 euros brut de l’heure à 10 euros de l’heure… »

Même sentiment chez Florian, livreur indépendant depuis un an :

« Je voulais sortir de ce schéma Deliveroo qui pratique le salariat déguisé, sans aucun avantage niveau assurance, protection sociale… »

L’éthique, c’est l’argument principal pour les membres de l’association Kooglof. « On ne va pas se démarquer sur des prix plus bas que Deliveroo, mais sur un service de qualité, par des livreurs qui aiment leur métier et qui sont correctement rémunérés », décrit Marine Stieber. « Notre objectif, c’est de favoriser l’économie locale, on ne vas pas livrer de grandes multinationales comme McDo par exemple », ajoute Florian Gentelet.

Un tarif dégressif et une meilleure rémunération

Kooglof pratique un prix de livraison dégressif selon la taille du panier acheté. La commande minimum est de 15 euros. L’association prend environ 4,10 euros de commission au restaurateur. Pour une commande de 35 euros, la commission est d’environ 7,20 euros. Côté client, la plateforme locale prend aussi 4 euros pour parvenir, au total, à « 9 euros gagnés par livraison, pour être payés 40 euros brut de l’heure », détaille Marine Stieber. « Selon les retours des coopératives de livraison à Bordeaux ou Grenoble, c’est le taux horaire nécessaire pour créer un modèle économique stable et rémunérer correctement les coursiers », précise Valentin, autre membre de l’association.

C’est ainsi que les livreurs, qui restent indépendants dans un premier temps, espèrent atteindre une rémunération nette d’environ 1 500 euros par mois. Mais à terme, les membres de Kooglof espèrent bien se salarier et s’octroyer d’autres avantages, comme des primes pour le matériel, des tickets restaurants, des heures supplémentaires payées et des vacances : « Les coursiers bordelais sont un peu notre modèle, ils ont huit semaines de congés payés ! »

Depuis plus d’un an, Marine et ses confrères coursiers songeaient à lancer leur propre coopérative. D’abord découragés par un investissement de près de 50 000 euros nécessaires pour construire la plateforme de commande, les livreurs se sont lancés grâce à CoopCycle, une fédération de coopératives de livraison à vélo. Cette dernière leur a proposé d’utiliser leur plateforme libre de droits à Strasbourg. Elle permet de proposer un service de livraison et de « click & collect ». « Sur la tarification et les contrats avec les restaurants, on a repris le modèle des Grenoblois de la coopérative S!cklo« , ajoute Florian Gentelet. Pour le reste, l’équipe de Kooglof était déjà équipée de vélos avant de se lancer dans l’aventure.

Prochaines étapes : une Scop et la livraison pour des commerces

Interrogés deux jours avant leur lancement, Marine et Florian préfèrent ne pas se prononcer sur le nombre idéal de livraisons quotidiennes. « On reste sur une inconnue, c’est le nombre de personnes qui vont télécharger l’application CoopCycle », admet l’ancienne livreuse Deliveroo. À court-terme, l’association espère se doter de vélo-cargos, qui permettraient de livrer les produits de commerces strasbourgeois pendant les fêtes de Noël. Florian évoque aussi un système de livraison avec consignes lancé à Montpellier.

À plus long-terme, l’association Kooglof devrait devenir une Société coopérative et participative (SCOP). Pour ce faire, la structure devra justifier de l’emploi de deux équivalents temps plein. Mais Marine est optimiste quant au succès de la démarche : « On ne s’est même pas encore lancé, qu’on reçoit déjà des tonnes de messages enthousiastes ! » L’exemple des Coursiers bordelais montre que le pari de l’éthique, du local et de l’écoresponsable paie. Alors pourquoi pas dans la capitale française du vélo ?


#livraison de repas à domicile

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