L’idée est simple, mais encore fallait il y penser et la mettre en œuvre. Pour inciter les habitants de la périphérie de Strasbourg à venir faire leurs courses au centre-ville pendant le marché de Noël, des commerçants de la Petite-France ont pensé à leur offrir des tickets de parking. Achetés en nombre, l’heure de stationnement revient à 60,6 centimes au parking Parcus de la Petite-France, près du musée d’art moderne. Et en plus, on y trouve toujours de la place contrairement à d’autres parkings du centre-ville.
Une opération rentable pour les commerçants de la Grand’Rue, des rues du Fossé des Tanneurs, du Bain au plantes et de toutes les rues transversales du secteur. En tout, une trentaine de commerçants ont ainsi fait confiance à l’énigmatique « Marc Valentin », personnalité sous pseudonyme qui se propose d’accompagner les premières commandes de tickets auprès de Parcus.
Une « communication qui ne coûte pas cher »
Mardi 24 octobre, l’agitateur de la Grand’Rue avait ainsi distribué 3 000 tickets. Il expliquait alors :
« C’est très facile à faire. C’est un service de prix dégressifs proposé par Parcus et on a négocié une quantité par commerçant. Chacun paie, comme ça, il maîtrise ses dépenses et sait où va son argent. Les clients se garent au parking de la Petite-France, le moins cher de Strasbourg après celui de l’Esplanade et vont faire leurs achats dans le quartier. Chaque commerçant gère son offre comme il le souhaite. L’un va offrir un ticket pour 50 euros d’achat, la coiffeuse va donner un ticket par heure de temps passé dans son salon. C’est un élément de communication qui ne coûte pas cher et fait vraiment plaisir aux clients. On espère que ça aura un impact sur les personnes qui pourraient hésiter à venir en ville. »
Une semaine plus tard, la riposte des Vitrines
Pour l’association de commerçants en place et les Vitrines de Strasbourg, l’initiative de l’agitateur de la Grand’Rue avait tout l’air d’une provocation supplémentaire. Plutôt que de la relayer, les Vitrines ont sorti au bout de quelques jours leur force de frappe… pour faire la même chose. Jeudi, Pierre Bardet, directeur des Vitrines, annonçait disposer de 1 600 tickets, au prix imbattable de 48 centimes l’unité, en vente pour les commerçants du même secteur de la Petite-France :
« Nous n’avons pas négocié avec Parcus. Nous profitons juste d’un tarif dégressif grâce à la puissance d’achat des Vitrines. Les 48 centimes par ticket correspondent à ce tarif préférentiel duquel on déduit encore une petite participation des Vitrines. J’ai souhaité proposer des carnets de 50 tickets et non de 100 pour que les commerçants puissent tester l’idée. »
Une récupération « de bonne guerre »
Difficile pour Pierre Bardet d’admettre la bonne inspiration de « Marc Valentin. » Le personnage « de mauvaise foi et malfaisant, » selon les mots de Pierre Bardet, accable les Vitrines et leur gestion des Illuminations de Noël sur les réseaux sociaux depuis des semaines. Le directeur de l’association admet du bout des lèvres :
« Là il a initié quelque chose. Mais il ne faut pas qu’il fasse croire qu’il a négocié alors que c’est des tarifs que tout le monde pouvait avoir depuis dix ans. »
Pourquoi ne pas en avoir parlé plus tôt ? Pierre Bardet assure :
« Je voulais finaliser mon projet. »
Marc Valentin de son côté, prend cette récupération avec amusement :
« Il essaie de reprendre ce que j’ai fait en faisant mieux et moins cher. C’est de bonne guerre. Mais les Vitrines arrivent après la bataille puisque j’ai déjà distribué 3 000 tickets. Dommage que l’association du Village, au courant du projet des Vitrines, n’ait pas dit que quelque chose de mieux se préparait. Un commerçant a cru que je l’instrumentalisais par rapport aux Vitrines. Une autre m’a demandé si ça me vexait qu’elle prenne ses tickets aux Vitrines et pas auprès de moi. C’est dire l’ambiance. »
« Créer une émulation »
Mais l’agitateur se dit surtout satisfait d’avoir passé le relais et d’avoir motivé « Pierre Bardet à se rendre utile aux commerçants » :
« Les Vitrines avaient une force d’action qu’elles n’utilisaient pas. Je n’ai jamais fait ça pour le faire toute ma vie, ça a été très chronophage pour moi. Je préfère que quelqu’un d’autre le fasse. De manière générale, les Vitrines sont en train de copier ce que je fais à l’échelle de la Grand’Rue. Et ça c’est bien, parce que plus j’en ferai et plus Pierre Bardet se sentira obligé d’en faire, ça créera une émulation. Ma situation de petite pique pour le stimuler, ça me va très bien. Une fois que les choses sont lancées, s’il prend le relais, j’en suis heureux comme ça au moins, il rentabilise le salaire qu’il touche. »
Vers une extension de l’opération à toute la Grande Île
De son côté, Pierre Bardet assure préparer l’extension de l’opération des tickets de parking au bénéfice de tous les commerçants de l’ellipse insulaire :
« Dans quelques jours, nous pourrons proposer des tickets du parking de la Petite-France aux commerçants de tout le centre-ville. Ce parking est intéressant parce qu’il est juste en dehors de l’ellipse insulaire, bouclée pendant le marché de Noël. Je suis en train de travailler cette même offre avec d’autres parkings de la ville : un parking de la place des Halles, celui d’Austerlitz… Ce ne sera pas le même prix qu’à celui de la Petite-France mais j’ai demandé les grilles tarifaires à Parcus. »
Sinon, il reste le tramway, toujours pas bloqué pendant le marché de Noël.
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