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Comment Schiltigheim compte rentabiliser ses friches brassicoles

Adelshoffen, Schutzenberger, Fischer… Les fermetures de brasseries se suivent et les friches restent. Schiltigheim, de son surnom « cité des brasseurs », hésite entre tourner la page ou profiter de cette histoire industrielle. Alors que les dossiers Fischer et Schutz sont au point mort, la friche Adelshoffen sera demain, c’est promis, un écoquartier ultra-branché.

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Les portes de la brasserie Schutzenberger, rue de la Patrie à Schilick, sont fermées depuis 2006 (Photo MM)

Schiltigheim, 32 000 habitants dont 50% environ sont non-imposables, ses brasseries encore en activité, Heineken et Storig (voir cette vidéo de France3 Alsace), sa fête de la bière, ses friches industrielles. Les années 2000 ont été fatales aux industries en cœur de ville. En 2000, Adelshoffen ferme ses portes. En 2006, c’est au tour de Schutzenberger, avant-dernière brasserie indépendante d’Alsace avec Météor à Hochfelden, et en 2009, Heineken rapatrie la production de de la Fischer, située en entrée de ville vers son site principal, rue Saint-Charles.

La brasserie Heineken, dite « de l’Espérance », est située à deux pas de la mairie de Schilick (Photo MM/Rue89 Strasbourg)

Près d’une quinzaine d’hectares se retrouve disponible, non en périphérie, mais insérée dans le tissu urbain de celle que l’on appelle encore « la cité des brasseurs ». Le site d’Adelshoffen est rapidement acheté, en 2001, par la municipalité, qui lance une grande consultation sur l’avenir du lieu. Douze ans après, la première pierre a enfin été posée… début 2013.

Adelshoffen, l’écoquartier branché

« Trop d’attente et d’erreurs ont été commises », juge l’opposant centriste au maire de Schiltigheim, Jean-Marie Kutner (son blog « Ensemble pour Schilick »). Il reprend :

« Quand Raphaël Nisand (PS) a pris la mairie en 2008, il a voulu revoir le projet et changer de place la future médiathèque. Il a fait deux erreurs en se lançant sous la pression des écologistes dans un projet de réseau de chaleur à énergie solaire – abandonné – et en confiant la construction à Foyer moderne, bailleur social de Schiltigheim, qui n’a ni les compétences d’un aménageur ni l’assise financière suffisante. Le projet a pris 4 ans de retard, ce qui équivaut environ à 1,8 millions de taxes foncière et d’habitation perdues pour la ville ! »

Finalement épaulé par la Sarest, filiale immobilière du Crédit Mutuel, chargée de la maîtrise d’ouvrage, et de Nexity pour la commercialisation, Foyer moderne aura quelques logements sociaux dans le premier lot de l’écoquartier Adelshoffen. Mais le projet sera largement privé, avec le création d’une galerie commerçante en bas d’immeuble (où viendra d’ailleurs s’installer la pharmacie de Jean-Marie Kutner…) et l’aménagement de la Villa Weber qui accueillera la microbrasserie Storig, aujourd’hui située sur la zone d’activité du Mittelfeld en bordure de l’Espace européen de l’entreprise.

Plan masse de l’écoquartier Adelshoffen (Document remis)

Cette (ré)implantation d’une activité brassicole en centre-ville est une aubaine pour la ville de Schiltigheim, puisqu’elle permet de dynamiser – et de boboïser – ce futur « morceau de ville », tout en valorisant le savoir-faire et le patrimoine local. Tout pour attirer des ménages plus aisés… qui paieront des impôts ! Raphaël Nisand, maire de Schilick et candidat à sa propre succession l’année prochaine, se félicite de l’avancement du projet :

« La vente a été faite, les travaux commencent en juillet. Ce sont les brasseurs historiques d’Adelshoffen, Michel Debus, et de Schutzenberger, Albert Gass, qui ont monté Storig. Leur présence sur l’écoquartier sera symbolique et aura un impact sur la vie quotidienne des gens, notamment avec le biergarten (ndlr : le bar à bières attenant à la brasserie), mais aussi parce que les gens vivent mieux dans un quartier qui a une âme. »

En plus du « vaisseau amiral » commercialisé par Nexity, en cours de construction, et de la brasserie – les deux devant être livrés d’ici 18 mois, l’écoquartier comprendra des « hameaux » au nord du site, qui seront vendus puis lotis par différents aménageurs, mais après 2014, assure l’adjointe à l’urbanisme Danielle Dambach (EELV).

La ZAC des friches du sud, peut-être fin 2013

L’autre gros morceau pour l’équipe municipale schilickoise, ce sont ces « friches du sud », 11,8 hectares qui comprennent les friches Fischer (propriété d’Heineken), France Télécom, Quiri, Schutzenberger et Alsia – encore en activité. Danielle Dambach, adjointe à l’urbanisme, explique :

« Sur ce périmètre, la ville n’est propriétaire de rien. Mais nous avons fait voter un projet de ZAC (voir délibération ci-dessous) pour encadrer les velléités des propriétaires privés qui pour certains négocient déjà avec des promoteurs. Notre but est d’imposer un cahier des charges pour que ces promoteurs participent aux équipements publics – voiries, espaces verts, école ou crèche… qui permettront à ce secteur de vivre de façon équilibrée. »

Balnéo chez Schutz ?

Ce que souhaite l’adjointe, c’est surtout de créer sur cette ZAC « une activité économique forte ». Elle note :

« Il ne s’agirait pas forcément de refabriquer de la bière – même si c’est l’un des projets de Marie-Lorraine Muller sur le site Schutzenberger – mais de décliner quelque chose dans le domaine des loisirs ou du tourisme. De la balnéothérapie pourquoi pas, ou un musée de la bière. »

Le tout, sur le site Schutz, inscrit à l’inventaire des monuments historique depuis 2008. L’adjointe aurait présenté à Marie-Lorraine Muller un investisseur allemand en balnéo, mais rien n’a pour le moment abouti. La création de la ZAC devrait être votée en conseil de CUS fin 2013, après plusieurs années d’études. L’idée : « Entériner les choses pour qu’on ne puisse plus y faire n’importe quoi, quels que soient les résultats des élections l’année prochaine ».

Fischer ou le rêve de Raphaël Nisand

Raphaël Nisand, moins confiant dans la capacité de la propriétaire de Schutzenberger à faire mûrir ces projets, mise plutôt sur le site Fischer. A deux pas de la sortie d’autoroute, bientôt longé par le tram (sur pneus ?) reliant Vendenheim à Eckbolsheim, ce lieu est effectivement idéalement placé, en entrée de ville. Seul hic, une procédure de classement est là aussi en cours. Ce qui n’a pas manqué d’agacer le maire de Schiltigheim. Extraits du procès verbal de la délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites (Drac Alsace), en date du 27 avril 2010 :

Extrait du PV de la délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites – avril 2010 (Capture MM)
Extrait du PV de la délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites – avril 2010 (Capture MM)
Extrait du PV de la délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites – avril 2010 (Capture MM)

S’il assure aujourd’hui être favorable à la conservation de la malterie Fischer, « skyline » marquant l’entrée de Schilick, Raphaël Nisand rêve surtout de faire de ce lieu une locomotive pour l’attractivité de la ville. Pour lui, les friches du sud auraient même pu être des concurrentes sérieuses au futur quartier d’affaires Wacken-Europe :

« On est beaucoup plus près de la gare de Strasbourg que le Wacken ! Les entreprises qui s’installeraient là seraient visibles de l’autoroute comme du TGV. Ce site de Fischer est promis a un avenir phénoménal : on pourrait y délocaliser les nuits strasbourgeoises, aussi bien sur la terrasse de la malterie que dans les caves… Même Franck Meunier s’y intéresse ! »

Pas très étonnant de la part de celui qui a racheté tous les hauts-lieux de la brasserie et des nuits strasbourgeoises, du Palais des Fêtes à la Hache, en passant par le Franky’s diner (burgers) installé dans les anciens locaux d’un restaurant neudorfois, mais aussi les Aviateurs, la Salamandre, etc. Néanmoins, la mutation économique comme le classement monument historique des lieux sont aujourd’hui au point mort.

Aller plus loin

Sur Rue89 Strasbourg : la bière Schutz renaît, la brasserie peut-être jamais


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