Place de la Liberté à Schiltigheim, Carole est sur le pas de sa porte. Elle donne un tour de clés pour entrer dans son « cocon », comme elle l’appelle. Lorsqu’elle pousse la porte, une vague de chaleur s’en échappe et contraste avec le froid matinal. Les tasses en céramique sont en train de cuire dans un four à 480° C.
Elle se sépare de son pull couleur lilas et enfile son tablier. Comme si finalement l’habit faisait le moine. Son sourire tranche avec notre conversation téléphonique de la veille. Carole fait part de son angoisse due au deuxième confinement, le marché de Noël de Colmar qui s’annule, une perte de visibilité et un nombre inestimé de ventes qui ne se feront pas.
Une incertitude quant à l’avenir, l’impossibilité de se projeter, un contexte pas très en phase avec sa personnalité de fonceuse : « “Je suis bélier et j’aime cette image car elle me correspond, » s’amuse t-elle. Malgré ces tourments, la céramiste continue de créer, de façonner, de produire ses pièces et tente de trouver d’autres solutions pour pérenniser son activité.
Carole a fêté ses trente ans pendant le premier confinement : « J’avais l’impression de vivre un moment historique ! » Elle a monté son entreprise alors qu’elle n’en avait que vingt-trois. Neuf années à écumer les petits boulots avant d’enfin pouvoir vivre de son artisanat. Et si sa famille était sceptique au début, ses proches sont désormais complètement impliqués dans le projet. « C’est ma mère qui s’occupe des colis et ma sœur m’a été d’une grande aide pour le développement de mon site internet, » confie-t-elle. Pendant l’interview, c’est son père qui l’appelle alors qu’il fait des achats pour la préparation des commandes de Noël.
Ce jour-là, elle finalise des petits pots à thé. Une entreprise du secteur lui a commandé 200 pièces pour les cadeaux de fin d’année offerts aux employés : « C’est une aubaine pour moi, l’équipe me fait totalement confiance. »
Le premier confinement aura été un sas de créativité inespéré et les pièces se sont accumulées sur les étagères. Si les motifs, les textures et les formes diffèrent, les tons sont harmonieux. Du beige, du gris, du bleu. Elle pointe une soucoupe : « Ce motif zigzag là, c’était mon fond d’écran quand j’étais au lycée, et je l’ai gardé. Je crois qu’il me rappelle une bonne période de ma vie. »
Ces derniers mois, elle a noté une évolution dans les habitudes de consommation des clients, davantage en quête de sens.
« Désormais, les gens s’intéressent au fait-main. Ils sont prêts à dépenser un peu plus mais pour de la qualité et pour un objet qui a une âme. »
Puis Carole a paré l’atelier des couleurs de Noël : « Ça va devenir une vraie boutique, je mets ça en place chaque année depuis que je suis ici. » Elle propose ainsi à d’autres artisans, qui n’ont pas de « vitrine, d’également s’y installer : « Je pense qu’à plusieurs, on est plus forts. »
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