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Chocolats, huiles, infusions… Dans la première boutique de cannabis légal de Strasbourg

La première boutique de produits dérivés du CBD (cannabidiol, une molécule du cannabis) a ouvert fin juin à Strasbourg. Si les premiers clients à se présenter venaient chercher « l’éclate » ou « la défonce », ils ont vite déchanté. Les produits vendus ne doivent contenir aucune trace de THC, la molécule psychotrope et addictive, pour pouvoir être commercialisés en France.

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Pour Ghinda Caldaras, 31 ans et tout nouveau gérant de Bestown Shop, la première boutique de dérivés du cannabidiol (CBD) à Strasbourg, pas de doute : la vente de ses produits est attendue. Cet ancien négociant a ouvert sa boutique en franchise le vendredi 22 juin au 9 rue du Faubourg-de-Pierre, il vend des tisanes au CBD, du chocolat au CBD, des huiles au CBD et du liquide à vaporter au CBD… Le CBD est un cannabinoïde souvent tiré de la fleur de cannabis, il aurait certaines propriétés contre l’anxiété ou les troubles du mouvement, sans effet psychotrope, qui dépend d’une autre molécule, le THC (delta-9-tétrahydrocannabinol).

Même si les débuts commerciaux de cette boutique restent timides, certains clients n’hésitent pas à venir de loin, comme le souligne Ghinda Caladaras :

« J’ai des gens qui sont venus d’Épinal et ma clientèle est large, elle va de 35 à 86 ans. »

Pour être commercialisés en France, les produits dérivés au CBD ne doivent contenir aucune trace de THC. Selon un rapport de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues (Mildeca), le CBD ne pourrait en outre qu’être extrait des fibres et même pas des fleurs. En outre, le rapport rappelle que les seuls médicaments au CBD autorisés sont ceux inscrits sur les listes des agences françaises ou européennes de sécurité des médicaments.

Discours ultra-balisé

Du coup, le discours de Ghinda Caldaras est ultra-balisé. Pour ne pas être accusé de vendre de la drogue ou des médicaments illégalement, il a suivi une formation à la maison mère de Bestown Shop à Besançon, développé par Élodie Marchon, la fondatrice de l’enseigne. Il explique :

« Il y a une formation, pour savoir ce qu’on peut dire et ce que l’on ne peut pas dire. Mon but n’est pas de vendre du rêve, ce sont simplement des compléments alimentaires. Toutes les variétés de chanvre autorisées sont réglementées et inscrites dans le Code de la santé publique, l’utilisation et la commercialisation de fleurs ou feuilles de chanvre ne sont pas autorisés et aucune vertu thérapeutique ne peut être revendiquée. »

Mais malgré ces limites, le cadre légal évolue au gré des discours et des implantations de nouvelles boutiques, ce qui n’est pas sans agacer le gérant :

« Tous les trois, quatre jours il y a de nouvelles normes. Il y a un mois on était sur un produit relaxant/apaisant, aujourd’hui on ne parle plus que de complément alimentaire. Je précise à tous mes clients qu’on ne vend que des tisanes, pas de la fumette. Je suis ni médecin ni pharmacien. C’est pour ça que sur nos paquets il est écrit “ne pas fumer”. »

Des clients au comptoir du Bestown Shop à Strasbourg ( photo Salem Slimani / cc Rue89 Strasbourg)

Pourtant, les étagères et vitrines de la boutique contiennent des produits destinés à fumer, tels que des bangs, des chichas ou d’autres instruments à vent. Pour le gérant, c’est une association d’image entre le cannabis classique et le CBD qu’il souhaite faire évoluer :

« Comme on fait partie de la franchise, tous les Bestown Shop doivent arborer les mêmes concepts. La semaine prochaine, on va discuter avec Élodie Marchon pour remplacer tout ça par des savons, des huiles, des produits dérivés de CBD. Des chichas, j’en ai vendu trois depuis l’ouverture du magasin. Très sincèrement, ça me gêne d’avoir ces produits, je préfère avoir plus de gammes dérivées du CBD. »

Des clients entrent dans la boutique et demandent quelques conseils pour faciliter leur sommeil. Le gérant répond sobrement :

« Ces produits ne sont que des compléments alimentaires. »

Combien de temps ce jeu de poker-menteur va-t-il durer ? Les boutiques de CBD fleurissent partout en France, et certains produits au CBD auraient des vertus contre l’anxiété, les troubles du sommeil, voire même contre la croissance de cellules cancèreuses. De nombreux personnes y croient en tout cas et vont se rendre rue du Faubourg-de-Pierre pour trouver directement les produits qu’ils achètent déjà en ligne. Il sera compliqué pour Ghinda Caldaras, qui a acheté 30 000€ la franchise de Bestown Shop, de maintenir son discours de compléments alimentaires…

Au comptoir du Bestown Shop de Strasbourg (photo SS / Rue89 Strasbourg / cc)

40 à 50€ les 2,5 grammes

Pour les consommateurs, le coût de ces « compléments alimentaires » varie de 40€ à 50€ les 2,5 grammes. Un prix est jugé élevé par Rachid, dont le prénom à été modifié. Pour ce fumeur occasionnel de cannabis au THC, le CBD devait être la solution pour sortir complètement de la « fumette » :

« Je fume de temps en temps pour me relaxer. J’attendais l’arrivée du CBD en France pour avoir les effets sans les inconvénients du cannabis. Mais à ce prix là, je n’achèterai pas, c’est trop cher. Moi j’ai l’habitude d’acheter les 10 grammes à 60€. Alors les 2,5 grammes à 40€, 50€, c’est trop. »

À ce prix, il faudra peut-être revoir le marketing…


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