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Caroline Guiela Nguyen console et répare l’humain avec Fraternité, conte fantastique au TNS

Dans un futur pas si lointain, une humanité amputée de moitié, dont le chagrin est tel qu’il fait ralentir la course des astres. Une pièce à l’allure dystopique de Caroline Guiela Nguyen et de la compagnie les Hommes approximatifs à ne pas manquer sur les planches du Théâtre National de Strasbourg du 12 au 20 janvier.

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À l’automne 2018, le public strasbourgeois avait pu découvrir Caroline Guiela Nguyen et sa compagnie avec Saigon, présenté dans une quinzaine de pays (Chine, Vietnam, Lituanie, Biélorussie, Allemagne, Australie…) et récompensé du prix Georges-Lerminier du Syndicat de la critique et d’une nomination au Molière. 

De retour à Strasbourg du 12 au 20 janvier, la troupe présente au TNS un récit de science-fiction, genre peu commun sur les planches ; sa mise en scène – longue de trois heures – est qualifié de « virtuose » par le journal diacritik. La pièce s’inscrit dans un décor « poétique et saturé à la fois » comme le décrit la scénographe du spectacle, Alice Duchange.

Extrait de « Fraternité »  de Caroline Guiela Nguyen Photo : Jean-Louis Fernandez / doc remis

Se relever après la fin du monde

Soixante ans après notre ère, l’humanité tente de se remettre d’un cataclysme. Lors d’une éclipse, la moitié des humains ont disparu sans la moindre explication. Ceux qui restent se retrouvent esseulés, abandonnés à eux-mêmes, leurs yeux tournés vers le ciel, dans l’attente de retrouver ceux qu’ils ont perdu.

Apparaissent « Les Centres de Soins et de Consolation », lieux étranges mêlant le recueillement et l’étude scientifique, à la pointe de la technologie, mais sommaires au plan humain. C’est dans ce décor, dispensaire défraîchi aménagé de chaises, de tables recouvertes de nappes en papier, de murs ornés de dessins, que se déroule la pièce.

Des comédiens, professionnels ou non, de tout âge et de toute origine, interprètent les mille visages de cette humanité meurtrie. Ils se succèdent dans une cabine aux parois vitrées, leurs visages projetés sur le fond de la scène et leurs voix amplifiées, pour laisser un message à celui ou celle qu’ils ont perdu. Comme une bouteille à la mer lancée dans le cosmos. 

Cette foule cosmopolite raconte son histoire, la murmure, la crie ou la rappe. Chacun dans sa langue, traduite ou surtitrée. Ils se retrouvent, se soutiennent et apprennent à faire ce deuil nécessaire dans ce monde dystopique, où la technologie reste incapable de combler le vide. 

Extrait de « Fraternité »  de Caroline Guiela Nguyen Photo : Jean-Louis Fernandez / doc remis

Retrouver la Fraternité

En 2018, Caroline Guiela Nguyen et la compagnie les Hommes approximatifs, commençaient ce grand cycle autour de la fraternité, en quatre opus. Ce cycle se compose pour le moment d’un moyen métrage, Les Engloutis, de la pièce Fraternité, conte fantastique et d’une pièce intitulée Kindheitsarchive[Enfance-Archive] créée à la Schaubühne de Berlin en octobre 2022.

La metteuse en scène définit la fraternité comme :

 » Un élan qui lance un regard depuis le présent, vers le passé et vers l’avenir. Il s’agit de reconnaître l’autre comme un frère, sans hésitation et agir avec lui, pour lui, parce que nous faisons partie de la même communauté humaine.  » 

Pour écrire Fraternité, Conte Fantastique, la compagnie est partie à la rencontre de celles et ceux qui incarnent encore cette Fraternité. Parmi lesquels la médecin légiste italienne Cristina Cattanéo, qui s’est donnée pour mission de retrouver l’identité des ossements qui lui sont ramenés. De même que le « Bureau de rétablissement des liens familiaux » de la Croix rouge française, qui depuis la Seconde Guerre mondiale recherche les personnes séparées par les catastrophes. 

Extrait de « Fraternité »  de Caroline Guiela Nguyen Photo : Jean-Louis Fernandez / doc remis

La compagnie a mis deux ans pour réunir ces acteurs issus de tout horizon. À l’orée des répétitions, Caroline Guiela Nguyen leur a distribué un texte regroupant les arcs narratifs principaux du récit, autour desquels ils improvisent. De ce travail libre, naissent des dialogues réalistes, laissant entendre une langue contemporaine, au plus proche de ceux qui la disent et de ceux qui l’entendent. 

Une démarche qui remet la création collective au centre de la scène. Le résultat est porté par des comédiens aux interprétations généreuses. Malgré leurs différences et leurs expériences variables, l’assemblage fonctionne, souligne le journal la terrasse. Poussé à la compassion pour ces âmes déchirées, le spectateur en vient à trouver en lui une réponse à ses propres dilemmes.


#Caroline Guiela Nguyen

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