L’amour est-il un honnête mensonge ou un heureux malentendu ?
Alors qu’il est absorbé par le jeu d’Alicia, la magnifique actrice de ses rêves, Clément croise à plusieurs reprises la jeune Caprice, frondeuse et pétillante, mais il la remarque à peine. Par un concours de circonstances aussi inespéré qu’improbable, c’est en tant qu’instituteur qui fait du soutien que Clément rentre en contact avec Alicia, la très belle actrice inaccessible.
Le coup de foudre est total, et la maladresse de Clément toujours au rendez-vous de leurs rencontres romantiques. La difficulté de Clément à s’exprimer, à aimer, à se faire maître de ce qui lui arrive n’est plus un secret, mais Alicia perçoit cette fragilité comme un don, et son cœur endolori par une déception amoureuse récente, fond littéralement. La sincérité de Clément répond à son besoin d’apaisement et de légèreté.
La vie n’est pas un film, mais au cinéma tous les rêves sont permis
Le scénario de Caprice s’inscrit volontairement dans un ton complètement décalé du réel. Si on a souvent qualifié le cinéma de Mouret de néo-rohmerien, ce n’est pas par hasard. Cela tient à la forme des dialogues, aux thématiques, mais également au côté vaporeux des personnages. Ils disent ces choses qui nous concernent à tous, mais semblent avoir atterri d’un monde directement issu de notre imagination, voire de nos fantasmes.
La Bande-Annonce
Dans ce dernier opus, Mouret travaille l’idée du désir féminin et des diverses tentations du masculin. Clément oscille entre l’amour d’une femme mure, professionnellement accomplie et physiquement parfaite qui fait de lui l’homme idéal, et l’appel d’une relation incongrue complètement hors norme. Mais comme le dit Emmanuel-alias-Clément : « Il est si difficile d’être le rêve d’un autre ! »
Pour rendre compte des dilemmes qui assaillent l’amoureux transi, l’intrigue se complique. Le meilleur ami de Clément s’éprend aussi de l’actrice évanescente, et Caprice la bien nommée, déboule de force dans la vie de l’instituteur pour imposer sa jeunesse et sa désinvolture. Son insolence est totale, dans la vie comme en amour. Elle compose un rôle « d’alternative » à la perfection, et formule à sa manière la remise en question de l’amour comme destin. Après tout, nos sentiments ne sont-ils pas par définition spontanés, essentiellement motivés par ce qui nous échappe ?
Une femme que l’on aime vaut-elle la possibilité de toutes les autres ?
Caprice est à la fois tendre et charmante mais aussi profondément agaçante. Son insistance à souligner ce qui devrait rester dans le non-dit, dérange. On lui en veut de prononcer ces questions qui planent silencieusement sur chaque rencontre: vaut-il mieux aimer à la folie, ou être aimé passionnément ? L’amour est-il guidé par nos rêves, nos désirs d’impossible ou la visée d’un confort affectif indispensable ? Aime-t-on réellement la personne qui nous attire subitement ou sommes-nous davantage amoureux de l’idée que nous nous en faisons ?
Pour renforcer l’idée que le problème est irréductiblement celui de Clément, il n’y a (miraculeusement) aucune jalousie entre les deux femmes. Elles ne sont en concurrence que dans le regard de celui qui est face à ses choix. Il est clair que pour Emmanuel Mouret « ce fâcheux besoin d’être aimé » ne se transforme en aventure sentimentale que pour celui qui est prêt à s’engager dans ses désirs.
On peut déplorer que Clément ait à surmonter cette « horrible difficulté » à l’occasion d’un problème de riche qui consiste à hésiter entre deux femmes sublimes. Mais avoir à choisir entre une femme iconique de type Marylin Monroe et la spontanéité de ce qui a tout l’air d’un caprice, rappelle que quelle que soit la situation, aimer revient toujours à sacrifier une part de soi.
En salles à Strasbourg à partir du 22 Avril
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