Car la doctrine Keller rime avec conservatisme. Marco – le plus beau pour certains, le plus faux pour d’autres – est incontestablement un séducteur : belle tronche, toujours bien habillé. Et, un peu comme l’inspecteur Derrick, toujours bien coiffé. Toutefois, l’ancien attaquant de West Ham est surtout adepte du discours vide, mêlant poncifs éculés et évidences simplistes. A l’instar de ses interventions sur Canal + où Marco enfonce des portes ouvertes plus souvent qu’à son tour. Le genre de type qui forcément a toujours raison, sauf si l’on ose la rupture de cadre.
Obsession identitaire
Il y a un an, l’audit des comptes de l’association RCS mettait en exergue des tares dont on a plus jamais entendu parler. Je cite : « La faiblesse du sponsoring et du mécénat pour l’exercice 2011-2012 au regard du dynamisme économique et de l’importance de la ville de Strasbourg » et « les fournisseurs pas mis en concurrence ». Le vieux briscard Spielmann conforté à la tête de l’asso, on aurait aimé entendre ne serait-ce que quelques mots sur ce qui a été entrepris pour corriger le tir. A moins que, là aussi, il n’y ait pas grand chose à dire.
Venons-en au fait marquant de 2012-2013 : le Racing Club de Strasbourg transmuté en RCSA et notre blason historique littéralement saccagé. Pour les beaux yeux de la Région Alsace, et puis pour grappiller quelques sous aussi. Ah, l’Alsace, son terroir et ses traditions. Presque une obsession identitaire. Heureusement, nombreux sont les Alsaciens qui n’ont pas attendu Philippe Richert pour adorer leur Racing.
600 000€ pour le RCS(A)
A ce sujet, Marc Keller déclarait fin mars sur StrasTV :
« Le football alsacien ne doit pas être une rivalité de clubs. Il y a une locomotive historique, c’est le Racing. Si le Racing est fort, les autres clubs seront plus forts. Les subventions allouées sont importantes et nécessaires, mais bonnes aussi pour tout le foot alsacien. »
C’est vrai que 600 000€ pour le RCS(A) et des pièces jaunes pour les autres, ça ne peut que favoriser la concorde. Dreyfus, le président de Mulhouse, quoi qu’on en pense, a eu raison de gueuler son mal-être.
Arguant d’un hypothétique gagnant-gagnant, MK a un rêve : vassaliser tous les clubs de la région au RCS. De gré ou de force, tous derrière le Racing ! Une double-erreur à mon sens. D’une part, un club ne peut se renforcer que s’il a les moyens de se développer selon sa propre identité, son propre modèle, sa propre originalité. Je n’apprendrai rien à personne en rappelant que l’Alsace est un territoire tout en nuances et en contrastes. Si le label au bretzel suffisait à unir tout le monde, ça se saurait. Et puis jusqu’à preuve du contraire, Haut-rhinois et Bas-rhinois se regardent toujours en chiens de faïence.
D’autre part, à l’inverse de ce que pense Keller, c’est par l’émulation et la concurrence sportive que le foot alsacien est susceptible de sortir du marasme. Historiquement, c’est peu dire que le modèle du « Racing locomotive de l’Alsace » a échoué. Hormis Mulhouse et le RCS, quel autre club régional a accédé aux deux premières divisions françaises au cours des trente dernières années ?
Un modeste club de province
Même amateur, le RCS a de la réserve. Le potentiel public est exceptionnel (8000 spectateurs de moyenne en CFA) et ici c’est juste la capitale de l’Europe. Qu’a-t-on pris comme initiatives en 2012-2013 pour développer le club afin qu’il génère plus de ressources propres ? A-t-on mis le paquet sur le merchandising ? A-t-on profité de passerelles avec l’Allemagne ? Les propositions que j’avais formulées tiennent toujours.
Même si cette saison le club a progressé sportivement avec la montée en National, ce n’est pas le cas de l’institution Racing au sens noble du terme. « La magie de la médiocrité générale, c’est qu’elle permet à ses tenants de ne jamais en prendre conscience, tout en maintenant un niveau d’exigence très bas dans le public. » Au détour de l’interview de Jérôme Latta des Cahiers du foot, cette phrase m’a tout de suite fait penser à ce Racing actuel, destiné jusqu’à nouvel ordre à ne demeurer qu’un modeste club de province. J’ai bien dit « jusqu’à nouvel ordre ».
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : bilan iconoclaste d’une saison, côté terrain
Chargement des commentaires…