Le problème des barquettes à la cantine serait-il enfin résolu ? Après s’être attaqué aux contenus des restaurants scolaires avec plus de produits bio et locaux, les barquettes jetables en plastique sont dans le viseur suite à une importante mobilisation citoyenne (voir tous nos articles). Car leur utilisation est suspectée de relâcher des perturbateurs endocriniens auxquels les enfants sont particulièrement sensibles, surtout lorsque ces barquettes sont chauffées. Les perturbateurs endocriniens provoquent stérilité ou cancers à long terme, voire un affaiblissement des capacités cognitives.
À l’occasion du renouvellement du marché de la restauration scolaire, l’Alsacienne de Restauration a promis que ces barquettes en plastique allaient disparaître en quatre ans. Une première parmi les grandes villes françaises, après les Sables-d’Olonne. Autre avantage, passer aux barquettes en inox permet de réduire les déchets, un argument de poids alors que l’incinérateur de l’Eurométropole est fermé pour deux ans et demi.
Les prix du prestataire n’ont pas varié pour la municipalité ni donc pour les familles. Mais quant à des éventuels surcoûts dans ses installations, la municipalité n’a pas été en mesure de les préciser lors d’une présentation du nouveau restaurant scolaire de l’école Louvois, à l’Esplanade, mardi soir.
Pour Françoise Buffet, adjointe au maire (divers gauche) en charge de l’Éducation, il faut attendre le retour sur expérience :
« Il faut changer certaines infrastructures et cela signifie un travail différent pour le prestataire, qui a dû acquérir un nouveau matériel. Nous n’avons pas encore répercuté ce surcoût. En plus du prestataire, c’est un changement important pour le personnel. Ce passage à l’inox engendre du travail en plus. Mais, lorsque nous aurons un peu plus de recul et que nous aurons bien étudié ce qu’implique ces changements, nous ferons tout pour optimiser les gestes des salariés et les économiser. Nous verrons d’ici 3 ou 4 ans si nous arrivons à faire des économies avec ce système. Ce passage à l’inox est enthousiasmant, c’est une innovation, nous sommes regardés par de nombreuses collectivités. »
Le maire de Strasbourg, Roland Ries (PS mais plus trop), poursuit:
« Pour le budget lié au passage aux barquettes en inox, il est de l’ordre de plusieurs centaines de milliers d’euros. C’est un investissement. On ne connaît pas encore bien le budget total qu’il faudra allouer à ces transformations. »
Pourquoi l’école de Louvois et pas une autre ?
La rénovation de l’école Louvois était déjà lancée lorsque la décision de passer aux contenants en inox a été prise début 2017. Il n’a suffit que d’un coup de téléphone aux architectes pour s’adapter raconte l’un d’eux, Nicolas Parent :
« Le chantier n’était pas terminé, nous avons donc pu changer nos plans pour inclure les nouveaux équipements propres au service avec des barquettes en inox. Les bacs en inox sont un peu plus volumineux et doivent être installés sur des structures pour le service et pour garantir une température adéquate. Dans la salle pour les maternelles, nous avons rajouté un îlot central en inox. L’école a été livrée à la rentrée et le restaurant à la Toussaint. »
La cantine a beaucoup changé. Pour les élèves en élémentaire, ils sont dorénavant plus autonomes avec un service en self. Du côté des maternelles, leurs assiettes sont servies par le personnel à table.
Qu’est ce que ça change finalement ?
Mardi midi, Slivani Lokman s’occupait de remplir les assiettes des maternelles :
« Dans cette école trois types de repas sont proposés. Un plat végétarien, un plat halal, un standard et un sans porc (pour les enfants qui ne mangent pas strictement halal, ndlr). En 30 minutes tous les enfants doivent être servis. Les bacs en inox font à peu près la même taille et le même poids que les barquettes plastiques. Avoir de l’inox, ça nous demande plus de travail. Il faut les laver, les récurer, ça nous prend plus de temps. Nous sommes trop peu nombreux, c’est souvent la course. »
Ce restaurant dispose de 72 places pour les élèves de maternelle et leurs accompagnateurs. Le service à table est organisé en deux fois. Trois agents s’occupent du repas de midi, dont Rachida, pour qui beaucoup de choses ont changé :
« Avant nous posions les barquettes en plastique sur les tables et les animateurs servaient les enfants. Dorénavant, c’est nous qui les servons. Le matin, nous sommes livrés en repas puis nous préparons tout. Ça nous demande plus de temps, le planning est plus serré. Aujourd’hui, on met la salade dans les coupelles tout comme les desserts, le fromage doit être assez bien présenté sur des petites assiettes. Et nous devons préparer ainsi environ 150 assiettes, le plus rapidement possible. En 45 minutes, les enfants sont sensés être servis et avoir fini leur repas. »
Pour Lidia, c’est l’équipement qui change :
« Les barquettes sont plus lourdes. Je mets des gants de protection parce que c’est très chaud. Je pose les barquettes sur un reposoir chauffé au bain-marie. Ensuite mes collègues dressent l’assiette. »
Dans l’équipe, ils sont deux salariés à temps complet et deux à temps partiel. Pour les quatre personnes présentes mardi midi, l’effectif n’est pas suffisant. Avant, la vaisselle ne concernait que les assiettes, les couverts. Il faut désormais nettoyer les plats.
La difficile disparition du plastique
Pour Aurélien Perrot, le responsable périscolaire du site, ce changement de matériel donne plus de temps avec les enfants :
« Nous sommes sensibles au fait que cela réduit le déchets de l’école et à la façon de servir les enfants qui évolue. Avec le self, les enfants sont plus autonomes. Nous avons plus de temps pour des animations après le repas avec cette nouvelle formule. »
Mais des préparations restent encore sous plastique, comme certains plats végétariens et des plats de dépannage. Quand les repas prévus dans les plats en inox sont épuisés, ceux qui restent sont en dans des barquettes plastique.
Ravi de sa visite, le maire Roland Ries, désormais converti à l’inox, ne compte pas s’arrêter là :
« Nous envisageons d’étendre les barquettes en inox à d’autres lieux de restauration publics comme les hôpitaux. Si l’expérience s’avère fructueuse, pourquoi pas. »
D’autres municipalités semblent vouloir s’engager pour les cantines. Des villes comme Lyon et Bordeaux pourraient franchir le pas. Strasbourg espère en tout cas devenir capitale de la barquette inox et servir de modèle pour les autres agglomérations. Les restaurants municipaux existants devraient rapidement évoluer comme celui de l’école Louvois, dès le début de l’année 2018.
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