Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Au boulot à vélo, malgré le concours, c’est pas encore évident

Le traditionnel challenge « Au boulot à vélo » du 19 juin au 2 juillet à Strasbourg et ses environs vise à faire pédaler les employés qui n’en ont guère l’habitude. Mais pour que la part modale du vélo progresse, il faudra un peu plus qu’un concours.

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Pourquoi le vélo n’est que rarement utilisé pour se rendre à son travail ? Chaque année, le challenge « Au boulot à vélo » tente d’augmenter la « part modale » des trajets domicile-travail effectués à vélo dans l’Eurométropole. Cette année, ce concours entre entreprises a débuté lundi 19 juin pour se terminer le 2 juillet. À Strasbourg, 16% des trajets domicile-travail sont effectués à vélo, une proportion la plus élevée de France, mais qui stagne.

Car se rendre à son travail à vélo est toujours compliqué, même à Strasbourg. La non-possession d’un vélo, les problèmes de santé, l’âge et le sentiment d’insécurité arrivent en tête des raisons qui poussent les Strasbourgeois à délaisser ce mode de transport, selon une enquête réalisée par l’Eurométropole fin 2015. Ainsi Julianne (le prénom a été modifié), employée au Maillon, a bien essayé mais l’expérience l’a refroidie :

« C’était l’hiver, je suis tombée malade et ma voix a changé pendant plusieurs semaines. Et j’avais parfois l’impression de sentir la transpiration. En plus, je mets 10 minutes pour aller au travail en voiture et deux fois plus en vélo. »

En outre, Julianne utilise un vélo en mauvais état mais ne veut pas le remplacer, par crainte de se faire voler son nouveau vélo, un autre problème récurrent à Strasbourg.

Le challenge Au Boulot à Vélo prendra fin le 2 juillet. (Photo François Schnell / Flickr / cc)

Autre exemple au centre d’initiative à la nature et à l’environnement (CINE) de Bussière, au nord de la Robertsau. Ici, la majorité des 8 salariés prennent quotidiennement le vélo mais la directrice, Elisabeth Kulus reconnaît que ce mode de transport n’est pas toujours adapté à la vie de famille :

« Quand il faut déposer les enfants chez la nounou ce n’est pas évident, surtout pour quelqu’un qui, en plus, vient de loin. »

De plus, certaines voies de l’Eurométropole ne sont pas adaptées à la circulation des vélos, comme le reconnaît l’adjoint au maire de Strasbourg en charge des mobilités alternatives, Jean-Baptiste Gernet (PS) :

« Sur le boulevard autour de la gare par exemple, les aménagements en faveur des cyclistes se font attendre. Or, quand les cyclistes ne se sentent pas en sécurité sur la voie, ils montent sur les trottoirs, ce qui crée des problèmes de cohabitation avec les piétons. »

Des incitations aux entreprises très faibles

Du côté des employeurs, les entreprises peuvent inciter leurs salariés à pédaler, par exemple en proposant à leurs salariés l’indemnité kilométrique vélo (IKV). Une manne de… 0,25€ par kilomètre sur les trajets domicile-lieu de travail. Le dispositif a été mis en place en août 2015 mais les exonérations pour l’entreprise sont limitées à… 200€ par an. Et dans le secteur public, seuls certains fonctionnaires peuvent en bénéficier à ce jour.

La société Clic et Site, située à Oberschaeffolsheim, a acheté quatre vélo électriques pour ses 8 salariés, pour un montant total de 8 000€. Régis Bacher, son fondateur, vante notamment le caractère anti-stress du vélo qui permet d’éviter les bouchons mais reconnaît qu’il n’est pas possible de l’utiliser systématiquement :

« Certains salariés doivent parfois aller en rendez-vous en voiture dans la journée, ils doivent alors venir avec dès le matin. De plus, nous sommes dans la campagne et il n’y a pas d’éclairage la nuit, il faut alors être particulièrement bien équipé en vélo : lumières, vestes réfléchissantes, etc. »

Elisabeth Kulus, elle aussi excentrée, compte sur le tramway pour résoudre ce problème :

« Nous sommes à 2,5 km du tram, le vélo peut être un complément pour parcourir le chemin jusqu’à celui-ci. »

Les héros du vélo 2017… mais quid des quidams alors ? (capture d’écran)

« La voiture, toujours plus pratique »

Mais dans ce cas, il faut gérer une complication de taille : l’interdiction des vélos dans le tram de 7 à 9h puis de 17 à 19h, juste aux horaires où la majorité des gens se rendent et rentrent de leur travail. Les plus motivés ont trouvé une parade : l’emport d’un vélo pliant est permis dans le tram, même aux heures de pointe, mais ces modèles sont souvent beaucoup plus chers.

Des freins que reconnaît Fabien Masson, directeur de CADR67, organisateur du challenge, mais qui n’expliquent pas les limites de la pratique du vélo :

« Il faut être clair, la pratique du vélo, c’est une question de volonté. Les entreprises pourraient faire beaucoup plus pour faciliter l’usage du vélo à leurs salariés, mais elles ne sont pas sollicitées ou ne sont pas à l’écoute de ceux-ci. Et d’ailleurs, même nous au CADR67, nous ne sommes que rarement sollicités par les entreprises pour réfléchir à des solutions pour les cyclistes. « 

Cette année, CADR67 a eu l’idée d’inclure les vélos-cargos dans le challenge, les kilomètres parcourus à l’aide d’un de ces vélos comptent double. À la municipalité d’Illkirch-Graffenstaden, un vélo de ce type est testé par les agents, par exemple pour déplacer du petit matériel en remplacement d’un véhicule. Selon Richard Hamm, adjoint au maire à l’écologie, la Ville pourrait se porter acquéreur de vélos-cargo « si l’expérience est concluante ».


#CADR67

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