Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

« Bataclan » : une production strasbourgeoise à haute tension pour le rappeur Médine

Une société de production strasbourgeoise a organisé le tournage du dernier clip du chanteur Médine. Une mission sensible pour Alpaga Films : le rap s’intitule « Bataclan » et le rappeur est connu pour ses textes au vitriol. Il a fallu tourner toute une journée dans la salle de concert parisienne. Et toute l’équipe sait que l’artiste est attendu au tournant par ses nombreux détracteurs. La vidéo a été publiée lundi 12 mars.

Vidéo

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89 Strasbourg, abonnez-vous.

Le clip de « Bataclan » a été publié le 12 mars. Le tournage a été organisé par la société de production strasbourgeoise Alpaga Films.


« Tourner au Bataclan, au début c’est bizarre, forcément. » Yves Brua est producteur et associé de la société Alpaga Films. La maison de production strasbourgeoise a été chargée de tourner le dernier clip du rappeur Médine. De l’artiste au lieu de tournage, tous les ingrédients sont réunis pour déchaîner les passions. En janvier 2015, le chanteur avait suscité la polémique en publiant « Don’t Laïk », quelques jours avant les attentats contre la rédaction de Charlie Hebdo.

« Je porte la barbe j’suis de mauvais poil
Porte le voile t’es dans de beaux draps
Crucifions les laïcards comme à Golgotha
Le polygame vaut bien mieux que l’ami Strauss-Kahn »

Le tournage du dernier clip de Médine a eu lieu le 28 février au Bataclan. Nombreux étaient les techniciens alsaciens dans la salle de concert. Le résultat est disponible sur Youtube depuis le lundi 12 mars.

Yves Brua est producteur-associé chez Alpaga Films. Il a participé au dernier clip de Médine en tant que premier assistant du réalisateur Florin DeFrance (Photo GK / Rue89 Strasbourg / cc)

« On en avait marre des choses lisses »

Tourner un clip au Bataclan pour un rappeur controversé : l’offre du label havrais Din Records a plu à la société de production strasbourgeoise. Elle s’inscrit dans le virage qu’a pris Alpaga Films, comme l’explique Yves Brua :

« Ça fait un moment qu’on ne travaille plus avec les institutions. On en avait marre de faire des choses lisses. On a le luxe de pouvoir respecter une certaine éthique dans les projets que l’on accepte. Je suis graphiste intermittent chez ARTE. Je ne gagne donc pas tout mon salaire avec Alpaga Films. Et d’autres techniciens sont dans la même situation que moi. Avec Médine, on a un projet excitant et une éthique que l’on approuve. Dans « Bataclan », Médine chante tout simplement son rêve de rappeur : celui de se produire dans cette salle mythique. »

Le 28 février, dans une salle de concert vide, la vidéo est tournée entre 10 heures et 19 heures. Yves Brua se souvient :

« Après les attentats, j’avais réussi à éviter les images des chaînes d’info en continu. Mais en préparant le clip de Médine, je suis tombé sur les photos de l’AFP qui ont fuité. En arrivant devant le Bataclan pour le tournage, ces images me sont revenues. Pareil quand on est monté sur les balcons de la salle et qu’on regardait la fosse en bas… »

« Don’t laïk » : le rap polémique en 2015

Coiffé d’une casquette américaine noire, Yves Brua n’en est pas à son premier clip pour un groupe de rap. Il a déjà réalisé deux clips pour le rappeur Wilfried Barray, alias Brav. En travaillant pour Médine, Alpaga Films accède à une aura médiatique bien supérieure. Avec « Bataclan », les figurants s’appellent Orelsan et Youssoupha. Et le lieu de tournage suscite forcément la curiosité du grand public. L’équipe s’est donc préparée à une potentielle polémique autour du clip :

« On sait qu’Alain Finkielkraut et d’autres hommes politiques de droite vont se jeter sur l’occasion pour critiquer une nouvelle fois Médine. Du coup, toutes les personnes impliquées dans le tournage du clip ont été briefées sur les réponses à donner aux médias. »

Yves Brua discute avec le rappeur Médine pendant le tournage du clip de « Bataclan » (Photo Vincent Filou / Document Remis)

Médine aime susciter le débat par la provocation. Accusé par le philosophe Alain Finkielkraut de faire l’apologie d’Al Qaïda dans son morceau « 11 septembre », il lui répond dans « Speaker Corner » en 2015 :

« Ici République et Nation c’est que des stations de métro
Encore une phrase qui devrait remplir la gueule de Finkielkraut« 

Un rap de Médine dans un livre d’Histoire

Le producteur strasbourgeois n’a pas une confiance aveugle dans le rappeur controversé. Il s’est penché sur ses textes et a changé d’avis sur l’artiste sulfureux :

« Il y a dix ans, quand j’ai écouté les albums « 11 septembre » et « Jihad, le plus grand combat est contre soi-même », j’ai trouvé que Médine faisait trop dans la provoc’. Puis je me suis renseigné. J’ai lu son bouquin écrit avec Pascal Bonniface, « Don’t Panik ». Quand tu écoutes bien Médine, quand tu te renseignes, tu te rends compte que ses positions fortes sont toujours argumentées. Il y a même des extraits de son rap « 17 octobre » dans un livre d’Histoire pour les élèves en terminale ES. »

Yves Brua attend maintenant les réactions sur les réseaux sociaux. La veille de la publication, il scrutait les commentaires sur le compte Instagram de Médine.  L’objectif d’Alpaga Films : atteindre un million de vues en une semaine. Le producteur strasbourgeois espère convaincre le rappeur de réitérer cette collaboration…


#Musique

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles

Autres mots-clés :

Partager
Plus d'options
Quitter la version mobile