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Pourquoi des associations et des syndicats s’engagent contre le Rassemblement national

Une large intersyndicale et de nombreuses associations se joignent aux partis de gauche pour former un front contre l’extrême droite. Elles exposent pourquoi une prise de pouvoir par le Rassemblement national serait un grave danger.

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Pascal Vaudin, secrétaire général de la CFDT Transports.

Inédit dans la vie politique française, le Front populaire contre l’extrême droite va au-delà des partis politiques. De nombreux syndicats et associations affirment leur appartenance à ce mouvement pour contrer le Rassemblement national (RN) aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet. Elles soulignent en premier lieu que le parti nationaliste légitimerait davantage le racisme, l’homophobie, et réprimerait encore plus les minorités. Ces régressions des droits sociaux ont eu lieu en Italie, en Pologne ou en Hongrie lorsque l’extrême droite y est arrivée au pouvoir. Des éléments qui se retrouvent d’ailleurs dans les programmes ou les positions du RN.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) craint l’instauration de lois liberticides, comme l’explique Ingrid Boury, présidente de la section de Strasbourg :

« Le gouvernement d’Emmanuel Macron a déjà fait voter les lois sécurité globale, sur le séparatisme ou l’immigration. Le RN au pouvoir pourrait les utiliser pour réduire fortement les libertés. Leurs prises de parole prônent régulièrement la répression. Ils prévoient d’aller beaucoup plus loin, avec par exemple une présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre. Les policiers n’auraient plus à rendre de comptes et il y aurait encore plus de difficultés pour les victimes à contester les actes subis. »

L’extrême droite contre la liberté de la presse

Marie-Sophie Kormann, déléguée du Syndicat national des journalistes (SNJ) aux DNA, indique que le SNJ, le SNJ-CGT et le SNJ-CFDT « appellent à se mobiliser et à faire barrage contre l’extrême droite », ainsi qu’à « manifester le samedi 15 juin », avec les syndicats et les partis du Front populaire.

« L’extrême droite, depuis toujours prédatrice de la liberté de la presse, veut vendre l’audiovisuel public français à des groupes privés. Et pour l’ensemble des journalistes et des médias d’information, quels sont ses projets ? Il suffit malheureusement de constater les dégâts dans les pays européens où l’extrême droite est au pouvoir : toutes les formes de presse sont attaquées. »

Extrait du communiqué des syndicats de journalistes SNJ, SNJ-CGT et SNJ-CFDT

Depuis que Viktor Orban, régulièrement encensé par Marine Le Pen, dirige la Hongrie, le Conseil des médias hongrois a retiré les licences de toutes les radios indépendantes qui n’ont donc plus la possibilité d’émettre. Le pays est passé de la 23e à la 67e place du classement mondial pour la liberté de la presse de Reporters sans frontières.

Des offensives contre l’avortement

« L’extrême droite s’attaque à tout ce que nous défendons », constate Victoria, présidente du Planning familial 67 :

« Nous avons répertorié une multitude de positions dangereuses du RN. Au Parlement européen, ses députés ont voté contre l’inscription de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la charte européenne des droits fondamentaux, contre la condamnation de l’interdiction de l’avortement en Pologne (où l’extrême droite était au pouvoir jusqu’en 2023, NDLR), contre l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, ou encore contre un rapport condamnant les violences envers les femmes. »

Le Planning familial s’inquiète des appels réguliers à couper ses financements par des élus de droite et d’extrême droite.

Un groupe réactionnaire a tagué des slogans anti-avortement à plusieurs reprises ces dernières années.

Plus de prisons

Me Florence Dole, élue du bureau national du Syndicat des avocats de France (SAF), évoque les inquiétudes spécifiques aux acteurs de la justice. « Le RN au pouvoir, c’est l’augmentation de la répression des étrangers ou des personnes précarisées », débute la juriste. Elle déplore la volonté de Marine Le Pen « d’augmenter les places de prison, de rétablir des peines minimales pour les récidivistes et la perpétuité réelle ». Le SAF défend justement une vision opposée de la justice, « avec des alternatives à la prison qui sont plus efficaces », détaille Me Florence Dole :

« Comme d’autres services publics (sur lesquels le RN compte économiser de l’argent, NDLR), celui de la justice risque d’y passer, avec en outre des avocats surchargés de procédures liées à la politique répressive. Tout ce contexte provoquerait une baisse des droits de la défense. »

Maître Florence Dole, coprésidente de la branche strasbourgeoise du Syndicat des Avocats de France (SAF).Photo : GK / Rue89 Strasbourg

Pour Françoise Poujoulet, déléguée nationale de la Cimade Grand Est, une association chrétienne de défense des migrants, l’opposition à l’extrême droite est une évidence :

« Le discours du RN sur les questions migratoires est particulièrement hostile et inhumain envers les étrangers. Il propose de leur interdire de mettre le pied sur le continent européen sans avoir obtenu une autorisation dans leur pays d’origine, notamment en refoulant les bateaux de migrants. La stratégie d’Emmanuel Macron et de Les Républicains, c’est d’empiéter sur le programme de l’extrême droite pour l’empêcher d’accéder au pouvoir. Mais ça a l’effet inverse en rendant légitimes ces idées, on le constate en ce moment. »

Rejet de la protection de l’environnement

Zoé Mary, membre du collectif écologiste Alternatiba Strasbourg, précise que son groupe dénonce clairement la récupération des valeurs écologistes par la droite conservatrice : « Ils font des liens entre le fait de consommer local et la fermeture des frontières pour les étrangers. Mais dans leur programme, bien sûr, c’est le néant sur concernant l’écologie. Au Parlement européen, le parti rejetait de manière systématique toutes les propositions de protection de l’environnement et des océans lors des discussions et votes sur le pacte vert. » Elle cite également le vote des députés RN contre l’interdiction du glyphosate.

Par ailleurs, des associations LGBTQIA+ exprimeront leur rejet de l’extrême droite lors de la marche des visibilités (voir notre article dédié ici). Pour rappel, le RN n’hésite pas à s’allier au Parlement européen avec des partis ouvertement homophobes et transphobes. Idem pour l’Assemblée féministe, qui réunit plusieurs associations et collectifs et invite à rejoindre un cortège nommé Pink bloc, avec des slogans « contre la montée du fascisme » dans la manifestation du 15 juin et la marche des visibilités.

Les syndicats dénoncent le vernis social du RN

Dans leur appel à la manifestation contre l’extrême droite le 15 juin, la CGT, la FSU, l’Unsa, Solidaires et la CFDT, écrivent que les votes de l’extrême droite « sont toujours défavorables aux travailleuses et aux travailleurs » :

« Nous le voyons aujourd’hui en Italie ou en Argentine : austérité pour les salaires et les services publics, réformes constitutionnelles remettant en cause le rôle des syndicats, politiques racistes qui mettent en opposition les travailleuses et les travailleurs en fonction de leur religion, de leur couleur de peau ou de leur nationalité. »

Pascal Vaudin, secrétaire général de la CFDT des transports, analyse que le RN a du succès en partie grâce à « un vernis social qui est une imposture ». « Ils sont contre le code du travail qui donne les moyens aux salariés de se défendre, c’est un parti qui combat les syndicats », assure t-il.


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