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Apple Store à Strasbourg : le secret de polichinelle

Alors qu’Apple vient d’annoncer au monde la sortie de l’iPad 3, la firme garde le secret le plus absolu sur l’établissement d’un Apple Store à Strasbourg. Mais ce secret de polichinelle agite la ville depuis plus d’un an. Car Apple contrôle tout : personne ne peut parler, les fans strasbourgeois fabulent, scrutent… Même les « partenaires » d’Apple sont laissés dans le flou.

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Les travaux ont repris devant l'Aubette (Photo CB)

La capacité d’innovation d’Apple n’est plus à prouver, la maîtrise totale de sa communication non plus. La pomme décide quand elle communique et où elle communique, un point c’est tout. Pourtant, les secrets, les rumeurs, les fuites, ont eux aussi contribué à la construction du mythe.

À Strasbourg, cela fait maintenant plus d’un an qu’on entend parler de l’installation d’un Apple Store à l’Aubette. Rien d’officiel bien sûr, mais les recrutements avaient bel et bien commencé. Et puis d’un coup, plus rien. Silence radio. Les candidats n’ont plus eu de nouvelles, et les Strasbourgeois fans de la marque ont commencé à craindre le retrait.

Mais depuis une semaine, soulagement : les travaux ont repris, et certains candidats ont été recontactés. Mieux, « Strasbourg » qui avait subitement disparue des villes inscrites au recrutement sur le site d’Apple est réapparue.

Pourtant, le service communication d’Apple nie :

« Désolé de ne pouvoir répondre à vos questions mais nous n’avons pas annoncé d’ouverture de Store dans votre ville. »

Ni oui, ni non, ni d’annonce que tout le monde attend. Rien n’est laissé au hasard. A la Chambre de commerce, le service documentation explique :

« Pour le moment, Apple n’a pas rempli les formalités auprès de la CCI. On sait ici qu’il y a des rumeurs mais rien d’officiel non plus de notre côté. Quand les sièges des sociétés ne sont pas installés dans le Bas-Rhin, ils mettent souvent un petit moment à déposer ces formalités. De toute façon, ils seront bien obligés de le faire un peu avant l’ouverture… »

Le permis de construire, lui, est établi au nom de l’Aubette. Malin…

« No comment »

Les premiers concernés par l’arrivée la boutique, Altarea Cogedim, la société qui gère l’Aubette, répond un peu agacée :

« Nous n’avons pas de commentaires à faire. »

Carole Escudero directrice de l’Aubette, élude les questions :

« Je lis des choses qui m’horripilent. Je ne peux rien dire, rien répondre, tout ce que je peux dire c’est que je fais des travaux. »

Alors qu’il ne s’agit que d’un banal dossier commercial d’implantation, un climat tendu règne autour de ce dossier. Les interlocuteurs réagissent comme s’ils étaient interrogés sur le scandale politique du siècle. C’est qu’Apple tient fermement la bride sur ses partenaires et ses fournisseurs. La seule personne qui accepte de répondre, même de gaieté de coeur, est un ouvrier. Selon lui :

« Ah non non, ce n’est pas un secret du tout ! Ça l’était peut-être il y a un an, mais maintenant, il suffit de regarder l’Aubette pour s’en rendre compte. Tout le monde sait ici qu’on travaille pour Apple. »

Il ajoute même un peu hésitant:

« D’ailleurs, sur les plans, avant le nom de Marionnaud était inscrit, aujourd’hui c’est Apple »

Mais aucune possibilité de vérifier l’information auprès de Demathieu et Bard, le maître d’ouvrage, qui nous confirme être tenu au secret le plus absolu !

Accords et boules de gommes

Pourquoi le chantier a-t-il été brutalement stoppé ? Sur la place strasbourgeoise, il était question d’un pilier touché qui aurait forcé les ouvriers à tout arrêter. S’agissant d’un monument historique, on aurait pu parler d’une belle boulette. Apple ou pas, Carole Escudero, qui a de l’aplomb, répond :

« Ça se serait su vous ne croyez pas ? »

L’ouvrier renconté, lui, n’a « jamais entendu parler de problèmes de ce type là. »

« Ce qu’il s’est passé, c’est qu’Apple voulait tout le rez-de-chaussée gauche, et le problème, c’est qu’il y avait Marionnaud. Si ça a mis autant de temps, c’est parce qu’ils ont du trouver un accord. Maintenant, Marionnaud est derrière la brasserie, du coup, on va pouvoir démolir l’intérieur d’ici à une semaine. »

Un accord ? Mais alors quelles sont les conditions ? Le directeur marketing de Marionnaud en personne répond :

« Nous ne pourrons pas vous apporter ces éléments d’informations, car ils impliquent et concernent les deux parties. »

Et Bemac dans tout ça ?

Apple Premium Reseller (APR), fournisseur agréé Apple, Bemac est installé à Strasbourg depuis 1999. Historiquement, ce sont les APR qui ont contribué à la vente phénoménale des Macs, iPhones et autres iPads en France. Mais l’historique n’aurait-il aucune valeur pour la multinationale ? Rien n’est moins sûr. Un article des Échos évoque les contrats qui posent de fortes contraintes à leurs revendeurs. Et depuis l’apparition des Apple Store en France, c’est de pire en pire : ebizcuss, le plus gros réseau d’APR a accusé une chute de 22% de son chiffre d’affaires sur le dernier trimestre fiscal. Un chiffre qui laisse présager des fermetures imminentes de ceux qui nous ont fournis les premiers Mac. Triste. D’autant qu’en 2012, la marque compte ouvrir une quarantaine de boutiques sur l’Hexagone.

Chaque ouverture d’Apple Store est assortie d’une nouvelle version (V2) d’un contrat à destination des APR, encore plus contraignant. Ce nouveau contrat fixe les nouvelles normes à respecter et à mettre en place avant le mois de décembre, sous peine de fermeture : les magasins en centre ville doivent s’étaler sur une superficie supérieure à 75 m² mais être inférieure à 200 m², la vitrine extérieure doit elle, s’étendre sur 6 m de long et la hauteur sous plafond être égale à 2,80 mètres. Ceux qui pourront effectuer ces travaux garderont leur label…

En France, des associations d’APR se forment pour négocier avec la marque. Barbara Salerno-Lefèvre, responsable de la communication chez Bemac, est de ceux-là. Pas défaitiste pour autant, elle explique :

« Concernant la boutique rue de la Mésange, n’étant pas aux normes de la V2, nous pensons soit revoir notre activité, soit à nous en séparer. Quant à celle sur les quais, elle doit passer en V2, mais pour le moment son « refit » (reconfiguration) n’a pas été accepté, c’est en cours. »

Pour le moment, Bemac élargit sa gamme et attend patiemment, mais assure ne pas abandonner Strasbourg. Trouvera t-on l’iPad 3 dont la sortie a été annoncée jeudi chez Bemac ? Que se passera t-il ensuite ? La réponse, à priori, au mois de septembre lors de l’ouverture de l’Apple Store, ou du moins lors de l’annonce officielle…

La publicité pour l’iPad 3 sorti jeudi


#Apple

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