Depuis plus d’un mois, la frontière franco-allemande est à nouveau fermée. Avec la pandémie de coronavirus, une nuit a suffi pour mettre fin à la libre circulation entre la France et l’Allemagne. Pour la version française du site indépendant The Conversation, Frédérique Berrod et Birte Wassenberg, professeures à Sciences Po Strasbourg, et Morgane Chovet, doctorante au sein du même Institut d’Etudes Politiques, décrivent le processus par lequel le symbolique jardin des Deux-Rives a connu le retour « d’antiques frontières ». Les trois universitaires décrivent la potentielle « fin d’un espace commun ».
Une frontière pour rassurer
Les auteures de cet article expriment tout d’abord leur doute quant aux fondements de ce retour de la frontière franco-allemande :
« On refoule tous les Français du Grand Est à la frontière, et pas seulement les malades du Covid-19 tandis que les routiers passent sans que leur santé soit contrôlée. La frontière semble donc servir à rassurer les opinions publiques plutôt qu’à éviter la propagation du virus. »
Au-delà du bien-fondé de cette fermeture, ces spécialistes en Droit et en Histoire contemporaine regrettent aussi la méthode employée par les autorités allemandes : « Ce qui est plus préoccupant encore est que ce contrôle systématique est mis en place le 16 mars sans concertation avec les autorités de la Région Grand Est ou de Strasbourg. » Désormais, côté français, c’est au niveau du ministère de l’Intérieur que le dossier peut évoluer.
Un appel à l’âme de l’Union Européenne
En attendant, les travailleurs transfrontaliers souffrent de ne plus pouvoir faire leur trajet pendulaire, d’ordinaire si facile. Ils doivent se doter de plusieurs documents exigés par les autorités françaises ou allemandes. En télé-travaillant, de nouvelles questions se posent pour eux, notamment en terme de cotisation au régime de sécurité sociale. « La diversité des obstacles rencontrés révèle à la fois l’importance du niveau pratique de l’intégration des espaces frontaliers et la faiblesse de la coopération administrative transfrontalière », concluent les trois auteures.
Face à un « virus qui ne suit certainement pas une logique de contamination nationale », Frédérique Berrod, Birte Wassenberg et Morgane Chovet rappellent l’Union Européenne à ses valeurs fondatrices. Ces dernières sont en effet basées « sur l’unification des peuples européens et non pas sur leur différentiation nationale. » Plus que jamais, l’UE devrait ainsi rester attachée « au modèle de gouvernance à multiples niveaux associant le niveau européen, les autorités nationales et les collectivités locales et régionales dans les régions transfrontalières. » Pour les trois auteures, il en va ainsi de l’âme même de l’Union Européenne.
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