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À l’assemblée générale du Patio : poursuite du blocus et barbecue solidaire

À la suite du blocage du patio orchestré lundi matin par des « étudiants et des étudiantes en lutte », une assemblée générale a regroupé plus de 350 personnes, la question de la sélection des étudiants a été discutée. À une écrasante majorité, les présents ont voté pour la poursuite du blocage, au minimum jusqu’au mardi 10 avril. Lors d’un barbecue qui a suivi, des cheminots sont arrivés pour apporter leur soutien à la lutte étudiante.

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Après avoir bloqué lundi matin les accès aux bâtiments du Patio et du Nouveau Patio sur le campus principal de l’université de Strasbourg, pour protester contre la loi Orientation et Réussite Etudiante (ORE), plus de 350 étudiants se sont réunis lors d’une assemblée générale afin de discuter des suites à donner à la mobilisation. Des lycéens et une vingtaine de professeurs étaient aussi présents.

La réunion a commencé par une heure de prises de parole, une dizaine de personnes se sont saisi du mégaphone pour partager leur avis au sujet de la réforme de l’université ou de la mobilisation étudiante. Ensuite, des votes ont été organisés. À une majorité écrasante, les participants ont décidé la poursuite du blocage mardi 10 avril.

L’assemblée générale étudiante a réuni plus de 350 personnes. (photo TV / Rue89 Strasbourg / cc)

L’objectif du blocage était de « ramener du monde dans la lutte » d’après Gabriel, du syndicat Solidaires-Etudiants, et selon lui, c’est une opération réussie car « de très nombreuses personnes ont participé pour la première fois à une assemblée générale. » Nyzar, qui était venu pour un examen, comprend cette situation :

« Tout ça c’est pour les futurs étudiants… Si cette loi passe, ça sera très dur pour eux, il faut se battre pour les lycéens. »

Fanny et Joanne, étudiantes en droit étaient en train de réviser à la bibliothèque. Elles sont sorties pour voir ce qu’il se passait :

« On ne connait pas bien la réforme. Mais les études à l’université, gratuites pour tous, c’est très important et il faut que ça continue. C’est essentiel pour l’égalité des chances. »

Des professeurs de différentes filières présents

Michel Koebel, professeur en sociologie à la Faculté des sciences du sport, a salué l’organisation du mouvement et critiquait la réforme :

« Je suis impressionné par le pacifisme et l’esprit de solidarité de cet événement. Il y a même des étudiants d’écoles préparatoires, ce qui montre que ce mouvement est motivé par des raisons autres que l’intérêt personnel. Ce sont surtout les lycéens qui projettent d’aller à l’université qui sont concernés par cette réforme ; les étudiants actuels seront moins touchés et pourtant ils s’investissent pour défendre une autre idée de l’université. La réforme Parcoursup pose problème car elle placera des étudiants – notamment ceux issus des classes populaires – dans des filières qu’ils n’auront pas choisies. Des milliers d’étudiants verront leurs voeux rejetés et le choix sera fait au final – et très tardivement – par le Rectorat. L’engagement du gouvernement est de caser tout le monde, mais en tenant moins compte des avis des intéressés. Dans notre filière STAPS, nous aurons plus d’étudiants que les années précédentes, mais pas les moyens nécessaires. »

Les prises de parole se sont succédées au mégaphone (Photo TV / Rue89 Strasbourg / cc)

Léon Otten, professeur à la faculté des sciences du vivant, a un avis divergent sur la question :

« Dans les classements, l’université de Strasbourg est déjà modeste par rapport à Harvard ou Stanford. Une sélection des étudiants est nécessaire pour atteindre un niveau d’excellence international, car en n’intégrant que les meilleurs élèves dès la première année, il est possible de les emmener plus loin au fur et à mesure de leur cursus. »

La sélection, au coeur des préoccupations

Mais pour René, étudiant en sociologie, cette sélection constituerait une atteinte à la constitution, qui consacre le droit d’étudier dans la filière que l’on souhaite. Pour lui, il faut rappeler le principe de l’université libre :

« L’université n’est pas juste là pour former des futurs professionnels mais aussi simplement pour transmettre le savoir. »

Pour Félix, également en première année de sociologie,

« Une université accessible à tous, c’est une chance pour des étudiants qui seraient inadaptés au système scolaire d’avoir un accès au savoir et à des formations post-bac, contrairement à des formations plus encadrées comme les BTS ou les DUT. »

Selon Philippe Gillig, professeur en sciences sociales, la sélection ne serait pas le meilleur prétexte pour se mobiliser :

« Le principal problème, c’est la répartition des moyens selon les formations post-bac. Par exemple, les élèves d’écoles préparatoires coûtent quatorze fois plus cher à l’état que les étudiants à l’université. De plus, il y a de moins en moins de professeurs et de plus en plus d’étudiants. Cette année, en France nous avons 8 000 étudiants supplémentaires et 200 enseignants chercheurs en moins. La politique en ce moment est d’embaucher des contractuels, qui sont très précaires. L’université nécessite plus de moyens. »

Des étudiants, mais aussi des professeurs étaient présents. (Photo TV / Rue89 Strasbourg / cc)

Petit accrochage avec des étudiants de l’Uni

Après l’assemblée générale, un dizaine de membres se réclamant de l’Uni, un syndicat étudiant classé à droite, ont été empêchés alors qu’ils tentaient de briser une barricade. Rencontrés peu après, ces étudiants ont évoqué « des intimidations violentes » et ont qualifié les étudiants opposés à la réforme de « milices d’extrême-gauche. »

Alors que le barbecue se finissait, une trentaine de cheminots avec des bannières de la CGT sont arrivés sur le campus pour apporter leur soutien au mouvement étudiant. S’en est suivi un quart d’heure de chants prônant la convergence des luttes et une mobilisation citoyenne massive contre la politique du président de la République, Emmanuel Macron, dans son ensemble.

Les cheminots et les étudiants ensemble sur le campus universitaire. (Photo Thibault Vetter)

Tout le monde s’est ensuite donné rendez-vous au lendemain, pour une nouvelle journée de mobilisation. Dans la soirée, certains ont rejoint la manifestation de protestation contre l’évacuation de la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes par la gendarmerie.

 


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