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Strasbourg va continuer de subventionner la moitié des Illuminations de Noël

La Ville de Strasbourg devrait voter lundi une subvention de 300 000 euros à l’association des Vitrines de Strasbourg pour la gestion des Illuminations de Noël, une somme identique à celle votée en 2016. Le suivi de la commission d’enquête avait pourtant mis en évidence des écarts entre les sommes budgetées et celles dépensées.

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Le lustre de la place du Marché-Aux-Cochons-de-Lait, financé à moitié par la subvention publique (Photo Patrick Müller / FlickR / cc)

D’après nos informations, le conseil municipal de Strasbourg va voter lundi une subvention aux Vitrines de Strasbourg, pour les Illuminations de Noël identique à celle reçue en 2016, soit 300 000 euros. La commission d’enquête avait recommandé plus de transparence à l’association des commerçants, qui gère l’opération pour le compte de la Ville.

Le budget prévisionnel de l’opération, que nous avons pu consulter, a le mérite de séparer les sommes qui correspondent aux installations d’éclairages d’une part, et aux frais de fonctionnement d’autre part. Pour l’installation des lumières dans les rues du centre de Strasbourg en 2017-2018, l’estimation des dépenses s’établit à précisément 567 249,11 euros. Le reste à charge est financé par les commerçants eux-mêmes. Les Vitrines anticipent des recettes d’environ 350 000 euros en provenance des participations et 8 000 euros d’un partenaire.

Des frais pour la vie de l’association

Dans son budget, l’association ajoute plus de 120 000 euros correspondant aux frais inhérents à la vie de l’association (commissaire aux comptes, secrétariat, frais postaux, etc). Une quote-part des salaires pour le temps passé par le directeur et les deux secrétaires de l’association sur ce dossier est chiffrée à 48 875 euros.

Par cet ajout, le grand total s’élèves ainsi à 692 624,11 euros. Sachant que ces estimations avaient été réalisées avant le partiel échec de la collecte de la Grand’Rue, ce qui a amené l’association de commerçants de la rue piétonne à rembourser 38 commerçants et annuler certaines illuminations prévues et budgétées (et donc en partie couverte par la subvention municipale demandée).

Grand écart entre les prévisions et le total de l’an passé

Poussées à un peu plus de transparence par la municipalité, les Vitrines indiquent par ailleurs avoir supporté 23 418 euros de factures exceptionnelles liées aux recommandations facultatives de la fameuse commission. Ces dépenses exceptionnelles et ponctuelles avaient été utilisées pour expliquer le déficit d’environ 12 000 euros, annoncé lors de l’assemblée générale des Vitrines de Strasbourg le 18 octobre.

Parmi ces dépenses, une attestation des comptes de l’édition 2016-2017 a été réalisée par les cabinets In Extenso et Mazars-Fiduco. Ces travaux indiquent que seuls 381 205€ ont été dépensés l’an dernier pour les guirlandes lumineuses. Environ 100 000€ (99 422 euros) sont des frais de gestion, dont seuls 55% (54 682) peuvent réellement être imputés à l’opération des Illuminations selon les experts-comptables. Une quote-part des salaires (48 875 euros) est également intégrée dans ce calcul. Le total, bénéficiaire de 2 003 euros, était loin de celui prévu.

L’association a finalement dépensé 484 762€ (hors taxe) alors qu’elle avait estimé les coûts autour de 685 000€ (TTC) pour établir sa demande de subvention fin 2016. Même en ajoutant 20% de TVA, l’écart est de plus de 100 000 euros par rapport aux prévisions, sans que cela modifie la subvention municipale (300 000 euros TTC soit 250 000 euros hors taxe).

Une répartition par rue encore floue

En 2016, les rentrées des cotisations des commerçants ne correspondaient qu’à 240 693 euros, loin de la prévision de 350 000 euros affichée pour 2017-2018 (avant l’épisode Grand’Rue). Dans ce contexte, le budget réalisé devrait une nouvelle fois être moindre que celui annoncé et la subvention municipale supérieure à la moitié du coût réel de l’opération. Une proportion inverse aux objectifs votés qu’avait déjà conclu la commission d’enquête, sans remettre en cause la gestion des Illuminations. Ce plafond de subvention à 50% du total a d’ailleurs depuis été ôté des conventions signées avec l’association.

À titre d’exemple, le lancement des illuminations est ainsi budgété à 53 000 euros en 2017, alors qu’il a coûté 38 006 euros l’année précédente. Ces écarts n’ont pas incité la collectivité à niveler sa participation vers le bas dans ces temps de restrictions budgétaires.

Le lustre de la place du Marché-Aux-Cochons-de-Lait, financé à moitié par la subvention publique (Photo Patrick Müller / FlickR / cc)
Le lustre de la place du Marché-Aux-Cochons-de-Lait, financé à moitié par la subvention publique (Photo Patrick Müller / FlickR / cc)

En outre, les Vitrines ont aussi fourni un décompte par rue ou par quartier. Mais il n’indique pas quelle est la part financée par les commerçants. Ainsi la Robertsau perçoit 5 000 euros, alors que l’association des commerçants est devenue une coquille-vide gérée par Pierre Bardet.

« La proportion de financement public augmente »

Le président de l’association de commerçants Défis, Michel Pirot, avait demandé des comptes aux élus du conseil municipal de Strasbourg. Malgré des éléments transmis, il regrette qu’il n’y ait guère de changement sur la méthode :

« La subvention ne se base que sur des prévisions, qui sont semblables avec les années. Il n’a pas été regardé combien d’argent a réellement été dépensé l’année précédente, ce qui conviendrait de faire. La part des commerçants baisse avec les années, mais la subvention est identique. Donc la proportion de financement public augmente. Le refus de payer peut s’expliquer par des affaires qui ne sont pas si florissantes que ça ou par des commerçants qui souhaitent savoir dans le détail à quoi leur cotisation sert. Il y a toujours un conflit d’intérêt puisque le gestionnaire des illuminations en tire aussi des bénéficies (le directeur des Vitrines, Pierre Bardet, touche des droits d’auteur sur certains éclairages qu’il a dessiné; ndlr). Que cela se passe avec l’argent des commerçants c’est leur problème, avec une subvention des contribuables, c’est gênant. »

Contacté, l’adjoint au tourisme et au commerce, Paul Meyer (La Coopérative), défend cette subvention qui permet d’installer chaque année dans les rues de Strasbourg des illuminations de Noël de grande ampleur, en ne payant finalement qu’une partie des coûts :

« La clé de répartition est toujours de 50% entre la subvention et ce que cotisent les commerçants. Le système n’est pas parfait, notamment dans la répartition par rue qu’il faudra éclaircir, mais il est largement plus intéressant que de le faire par nous-même, en régie, ou de tout confier à un prestataire privé. C’est ce qu’avait conclu la commission d’enquête où toutes les formations politiques avaient participé. Aujourd’hui, les Vitrines sont sûrement l’association la plus contrôlée, par les agents de la Ville, ses adhérents et les médias. »

Reste que si la proportion d’argent public continue d’augmenter dans l’opération, la municipalité sera bien obligée de revoir son système. Le vote de la subvention est prévu lors du conseil municipal du lundi 18 décembre. Comme chaque année, elle consiste en une avance de 270 000 euros, puis un versement de 30 000 euros sur présentation des justificatifs. La commission d’enquête est sensée se réunir une fois par an pour effectuer un suivi.


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