Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Experts et maires vont réfléchir à la transformation de l’A35 en boulevard urbain

Que faire de l’autoroute gratuite qui traverse Strasbourg ? Près de quatre ans avant la mise en service, au plus tôt, d’une autoroute de contournement, le GCO, les premières réflexions vont être menées par les maires des communes traversées par l’A35 et des experts « loyaux ».

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Le président de l’Eurométropole de Strasbourg, Robert Herrmann (PS), l’avait annoncé lors de notre soirée sur le Grand contournement ouest (GCO) : un groupe de travail va plancher sur la future transformation de l’autoroute A35 en boulevard urbain. Cette requalification devrait prendre des années et coûtera au moins 150 millions d’euros, que l’État est censé financer. Les premières tranches de travaux ne devraient cependant par débuter avant la mise en service du GCO.

Le contrat signé entre Vinci (Arcos) et l’État, prévoit un démarrage du GCO le 30 septembre 2020. À moins que des retards ou les recours juridiques retardent, voire annulent ce chantier. Mercredi 28 septembre, des habitants ont bloqué des travaux de sondage des sols près de Kolbsheim, une commune farouchement opposée à l’autoroute qui impactera ses terres agricoles et son château. Le maire Dany Karcher envisage un arrêté pour « interdire ceux qui détruisent et protéger ceux qui protègent », même si un tel texte risque d’être retoqué au contrôle de légalité du préfet. Vendredi 30 septembre, Vinci avait quitté les lieux.

Sur toute la longueur du tracé

En théorie, la requalification de l’autoroute qui transperce Strasbourg du nord au sud doit englober toute la longueur du tracé. Du nord aux abords de Vendenheim, quelques hectomètres avant le grand échangeur (A4, A35 et A355) reconfiguré par rapport aux plans déclarés « d’utilité publique » en 2008, jusqu’à l’extrémité sud, c’est-à-dire à Duppigheim, près de l’aéroport d’Entzheim.

Le groupe de travail sera piloté par l’Agence d’urbanisme de Strasbourg (ADEUS), que préside Robert Herrmann. Il s’agira en fait de deux groupes : le premier à teneur politique avec les maires des communes sur le tracé de l’A35 ; le second, plus technique, sera composé d’experts et d’acteurs de ce sujet. Ces deux groupes devront rendre compte ponctuellement de leurs travaux aux habitants, voire intégrer leurs remarques.

Filé sur l’autoroute A36 (Photo Thomas Bresson / FlickR / cc)

Des personnes « loyales »

Le collège technique sera composé de personnes « loyales ». Sous-entendu, l’association Alsace Nature, fervente opposante à l’autoroute n’y sera pas associée. Qu’en sera-t-il de celle des usagers des transports en commun (l’ASTUS), aussi opposée au GCO ?

Pour le groupe « politique », on imagine la position délicate des maires opposés au GCO, mais dont la commune pourrait être laissée de côté en pratiquant une politique de la chaise vide. En l’état, Vendenheim est la plus menacée par un encerclement, avec le GCO à son nord et à l’ouest, l’A35 à l’est et sa zone commerciale au sud. Un abattement des glissières de sécurité et la mise en place de carrefours sur l’actuelle A35 permettrait au moins une ouverture à l’est et vers Strasbourg.

Que faire des espaces inutilisés aujourd’hui ?

La question principale de ces groupes sera de déterminer l’usage des lots situés près de l’actuelle autoroute : logements, commerces, parcs… Pour le moment, la feuille de route est quasi-vierge. Pour l’Eurométropole, le rétrécissement de la chaussée (on compte jusqu’à huit voies de circulation à certains endroits) est une perspective à long terme (entre 2020 et 2030) d’augmenter la valeur de ses terrains, d’améliorer le cadre de vie et surtout, de ne plus couper la ville en deux.

Un des enjeux sera de déterminer où lancer les premiers travaux, soit « là où ce sera le plus urgent », selon Robert Herrmann, ce qui ne pointe pas forcément vers le centre de l’autoroute, mais par exemple à Vendenheim. L’arrière de la gare présente aussi un secteur d’intérêt, où plusieurs projets ont déjà été imaginés par le passé et où d’autres pourraient naître.

Strasbourg compte notamment s’inspirer de Montréal qui détruit une partie de ses viaducs autoroutiers. Une technique qui sera nécessaire pour le tronçon entre Cronenbourg et l’entrée du quartier de l’Elsau , ainsi qu’à la Vigie, où l’autoroute est surélevée par rapport à la chaussée.

La CCI pas très chaude

On ne connait pas d’opposants déclarés à la requalification en soi, les désaccords portant plutôt sur l’efficacité du GCO à réduire le trafic. Certains, dont les écologistes de la majorité à la Ville et la métropole de Strasbourg pensent que mettre des feux et des passages piétons est impossible tant la circulation continuera à être importante. Lors de notre débat sur le GCO, le maire de Pfettisheim, Luc Huber, regrettait qu’une requalification ne soit une méthode pour pousser les voitures à emprunter le GCO, payant, ce qui maintient difficile l’accessibilité en voiture de Strasbourg.

Plus étonnant, la Chambre de commerce et de l’Industrie (CCI), qui a fortement œuvré pour la relance du GCO après son abandon en 2012 n’est que moyennement convaincue à court terme par cette idée pourtant « vendue » politiquement avec la renaissance du projet.

Abaisser le trafic massivement

Dans son document sur l’accessibilité pour Strasbourg publié en mai 2016, la CCI juge une telle requalification « longue, onéreuse et complexe ». D’après ses calculs, un boulevard de deux fois trois voies peut accueillir 50 000 véhicules par jour (l’avenue des Vosges est traversée par 30 000 véhicules) . Or, même avec les projections les plus optimistes le trafic sur l’A35 serait abaissé d’environ 160 000 à 135 000 véhicules par jour avec l’arrivée du GCO, ce qui pourrait donnait envie… à de nouveaux automobilistes de revenir sur l’A35.

D’ici là, elle souhaiterait qu’un accès poids lourds vers le port du Rhin soit réalisé par le nord, en plus des projets routiers déjà lancés (rocade sud, VLIO). Pour la question de l’A35 en soi, sur lequel l’objectif est d’abaisser le nombre de véhicules « des deux tiers voire des trois quart », elle propose entres autres des transports en commun sur la bande d’arrêt d’urgence, qu’il faudrait donc élargir, une voie réservée aux co-voiturage et même l’interdiction, ou du moins un péage plus cher que le GCO, des voitures qui traversent Strasbourg mais ne s’y arrêtent pas. Pour cette dernière proposition, la CCI s’interroge « sur la faisabilité technique et juridique ».


#A35

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