Un temps passée par la politique locale, Chantal Cutajar se lance cette fois dans un combat international : exiger des institutions financières plus de transparence, de morale et d’éthique ! Bonne chance ! Car pour elle, rien n’a vraiment changé dans les règles qui régissent les flux financiers depuis la crise des « subprimes » en 2008. Et elle sait de quoi elle parle, puisqu’elle dirige le Grasco (laboratoire de recherche universitaire sur le crime organisé) et le master 2 « Prévention et lutte contre les fraudes et le blanchiment » de l’université de Strasbourg. Avec une douzaine de personnes, elle lance un Observatoire citoyen pour la transparence financière internationale (OCTFI) car, pour l’ancienne tête de liste MoDem aux élections municipales de Strasbourg, l’urgence est de passer à l’action :
« Ce qu’a révélé la crise financière, c’est qu’il ne s’agit pas d’une crise économique justement. C’est toute la société qui est entrée en mutation, où les marchés disposent de bien trop de latitude sans contrôle efficace ni contre-pouvoir. Sans éthique ni valeur, ce système finit par faire s’effondrer la société qu’il est sensé servir. Ce qu’étaient les « subprimes », ça porte un nom : escroquerie en bande organisée ! Ces outils servent aux mafias à pénétrer l’économie légale, de façon complètement opaque. Et on n’a rien appris de la crise financière, le master de trader de Paris-2, fermé en 2008, a rouvert toujours sans aucun enseignement éthique. Il est donc urgent que les citoyens se mobilisent et en reprennent le contrôle. Stéphane Hessel a lancé la phase d’indignation, lançons la phase d’action. »
Un nouveau mouvement altermondialiste ?
Étonnant d’entendre Chantal Cutajar, femme de centre-droit, citer Stéphane Hessel et lancer un mouvement dont les buts ressemblent forts à ceux d’Attac à ses débuts en 1998. Dans les membres fondateurs de l’OCTFI, on note d’ailleurs plusieurs anciens membres de la section strasbourgeoise d’Attac, dont le philosophe Stéphane Clerjaud-Bodocs et le professeur d’économie Francis Kern. Chantal Cutajar est-elle devenue altermondialiste ?
« Ce n’est pas un mouvement altermondialiste… Il s’agit d’une mobilisation de la société civile, dont les membres doivent venir de toutes ses composantes, de tous les camps politiques, avec comme ambition d’agir et d’exiger des comptes. Alors oui, s’il s’agit de la définition d’un mouvement altermondialiste, c’en est un… »
Lancé mercredi prochain à Strasbourg, l’OCTFI veut participer à la formation des citoyens aux mécanismes financiers, lors d’ateliers-débats dont le premier est programmé le même jour avec Eva Joly comme « grand témoin » (voir ci-dessous). Une fois les citoyens formés, l’OCTFI portera ses actions auprès des élus, des lobbys, des institutions, etc. Une démarche qui, là encore, rappelle l’Attac des débuts. Espérons que l’Observatoire ne connaisse pas le même déclin qu’Attac, dont le soutien populaire s’est étiolé devant son impuissance et la multiplication de ses combats. Chantal Cutajar affirme qu’il y a des moyens « simples » pour lutter contre l’opacité des marchés financiers mais refuse de les détailler pour l’instant :
« Nous allons avoir des débats, et ce sera à l’issue de ces débats que la société civile ainsi représentée émettra des préconisations. L’objectif est d’expliquer, de comprendre et de refuser ce qui se passe. La finance internationale ne peut plus continuer à fonctionner comme elle le fait, c’est la voix de la raison. Le citoyen a le pouvoir suprême dans une démocratie, il doit apprendre à l’exercer. »
Y aller
Projection en avant première du film « Le grand retournement » sur la crise financière, ce mercredi soir à 20h15 au cinéma Star Saint-Exupéry, 17 rue du 22 novembre à Strasbourg. Plus de détails sur cette soirée organisée en partenariat avec Rue89 Strasbourg.
Lancement de l’OFTCI, mercredi 16 janvier à 18h, à la Librairie Kléber, 1, rue des Francs-Bourgeois à Strasbourg.
Premier atelier-débat citoyen, « Où va la finance internationale ? », mercredi 16 janvier à 20h au Foyer des Etudiants Catholiques (FEC), place Saint-Etienne à Strasbourg.
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