Pourquoi voter ?
Dès le 1er janvier 2016, les trois régions de l’ALCA – à qui il faudra trouver un nom – seront regroupées. Les nouveaux élus auront la charge d’assurer la nouvelle organisation et d’harmoniser les politiques en place dans les trois collectivités actuelles. Comme au niveau de l’État, cela promet un casse-tête avec des postes à partager, des directions à réorganiser et peut-être même des économies à réaliser.
La région s’occupe du développement économique, du tourisme, des lycées, des trains régionaux (TER), d’une partie de la politique culturelle (comme l’État et les communes) et depuis la réforme territoriale des transports en car en dehors des villes (à partir du 1er janvier 2017), une compétence prise aux départements. Mais les transports scolaires peuvent être « délégués » aux départements au cas par cas. Seul le transport des personnes handicapées reste du ressort des conseils départementaux.
Au niveau local, des sujets comme la coopération transfrontalière, la mise en place ou non d’une éco-taxe, le site d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure, peuvent s’inviter dans le débat. Sinon, il s’agit de la dernière élection avant les présidentielles de 2017.
Une campagne sur la pointe des pieds
Au creux de l’été, la campagne a débuté timidement. Pour les candidats, l’enjeu est aussi d’étendre leur notoriété au-delà de leur région d’origine avec de longs déplacements à prévoir. Même pour les médias locaux, difficile de suivre. Les premières rencontres se font surtout avec les sections départementales des partis, qui avaient peu ou pas l’habitude de travailler ensemble avec parfois quelques timides débats (sans programme).
Au PS, la campagne s’axe pour le moment sur la personnalité de Jean-Pierre Masseret, actuel président de Lorraine, sans y associer de projet. Le slogan et même le nom du site de campagne est « Notre région avec JPM« . Les profils Facebook de ses soutiens sont affublés de badges « J’M JPM ». En août, il a publié un premier clip de campagne de 7 minutes où il se présente seul, et énonce plusieurs formules autour de « la confiance », « n’ayez pas peur », « construisons la région ensemble », « une région plus forte et plus proche », etc.
Malgré des appels du pieds répétés à une grande union à gauche (sans pour autant céder la tête de liste) une alliance en dehors des radicaux de gauche semble improbable. Les militants écologistes ont choisi de ne s’allier ni à l’extrême gauche ni au PS pour le premier tour et le non-soutien de Jean-Pierre Masseret à la charte des langues régionales que François Hollande veut intégrer à la Constitution a été perçu comme une ultime provocation par Europe Écologie Les Verts (EELV) et le Modem, qui soutiennent cette disposition. La tête de liste EELV Sandrine Bélier (ancienne eurodéputée du grand Est) a lancé son site de campagne et propose de participer à son programme.
À droite, on s’appuie sur les grands élus
Philippe Richert, actuel président d’Alsace et candidat de « Les Républicains » (ex-UMP) , a misé sur François Baroin (sénateur-maire de Troyes), Benoist Apparu (député-maire de Châlons) et Jean-Luc Warsmann (député et conseiller régional) pour être ses relais en Champagne-Ardenne. Comme un sénateur (poste qu’il a déjà exercé) sa campagne se résume pour le moment à une tournée des élus locaux des trois régions.
Mais entre une tête de liste plutôt tournée vers le centre et des personnalités sarkozystes comme Nadine Morano (députée européenne et tête de liste de la Meurthe et Moselle) ou Jean Rottner (maire de Mulhouse), il faudra réussir à mettre tout le monde en ordre de bataille et que les relais ne soient pas seulement de façade.
Florian Philippot (FN), a lui choisi d’avoir un discours peu favorable à l’Alsace et surtout contre Strasbourg, trop avantagé par cette réforme à son goût. Il préfère envoyer des messages de soutien à la Lorraine et à la Champagne Ardenne, là où le Front national a plus de potentiel qu’en Alsace, malgré un ancrage historique (aucun élu aux départementales en mars contre 6 au total sur les deux autres régions). Parmi les propositions loufoques, mettre la préfecture, pourtant fixée par la loi à Strasbourg, à Châlons, ce qui n’est pas une compétence des régions. Dans ce contexte, il doit réunir ses troupes à Strasbourg dans les prochains jours.
Des listes de candidats encore à affiner
Si le bras-droit de Marine Le Pen devait l’emporter, il serait confronté au cumul des mandats en 2017 et devrait choisir entre le poste de président de la région ALCA ou son poste de député européen, qu’il cumule avec ses fonctions de vice-président du FN. Après son parachutage raté lors des municipales à Forbach, il a démissionné au bout de quelques semaines de son poste de conseiller communautaire de Forbach et figure aux abonnés absents au conseil municipal.
Le Front de gauche est à ce jour le parti dont la campagne est la plus discrète, car les listes sont encore en préparation. Mais on sait déjà qu’il axera sa campagne sur le refus des politiques d’austérité. Quelques éléments de programme sont en revanche déjà connus comme « la relocalisation des productions et le soutien à l’économie locale, le maintien et le développement des transports publics, notamment des TER, défense du régime local d’assurance maladie et la transparence sur l’utilisation de l’argent public. »
La campagne devrait s’accélérer en septembre avec la publication complète des premiers programmes. Le samedi 12 septembre, Philippe Richert et Sandrine Bélier seront tous deux invités 30 minutes sur France 3.
Enfin le nouveau parti anti-fusion « Les Fédérés » qui rassemble le collectif des Alsaciens réunis et le Mouvement Franche Comté a déposé un recours au Conseil d’État, car ses fondateurs estiment que l’élection se tenant avant la création officielle de la grande région, elle n’est pas valide.
Les têtes de listes connues (par ordre alphabétique)
Il n’est pas sûr que toutes ces listes se présentent. Certaines peuvent encore nouer des alliances avant le dépôt des listes. D’autres pourraient aussi ne pas arriver à réunir assez de candidats.
- Debout la France : Laurent Jacobelli
- Europe Écologie – Les Verts (EELV) : Sandrine Bélier
- Front démocrate (FD): Agnès Migaud et Antoine Le Solleuz
- Front national (FN) : Florian Philippot
- « Les Républicains » (ex-UMP) et Union des démocrates et indépendants (UDI) : Philippe Richert
- Mouvement démocrate (Modem) : Nathalie Griesbeck
- Parti libéral démocrate (PLD) : Christine Singer
- Parti socialiste (PS) : Jean-Pierre Masseret
- Union Populaire Républicaine (UPR) : David Wentzel
- D’après Loractu, une liste de dissidents du FN, soutiens de Jean-Marie Le Pen, serait aussi en préparation.
- Le Front de gauche a trouvé un représentant pour chaque ancienne région (Hülliya Turan pour l’Alsace), mais discute encore pour celle au niveau des trois régions
- Les partis régionalistes comme le parti Lorrain, le parti des mosellans Unser Land en Alsace tentent de s’allier
Un pronostic ?
Lors de nos projections des résultats des départementales du mois de mars, le Front national arrivait en tête au premier tour avec 30,9% des voix devant l’UMP (devenu « Les Républicains ») avec 26,5%. Mais si l’on additionnait les voix des candidats de droite non-affiliés à l’UMP et de l’UDI, la droite devançait l’extrême-droite avec 41% au total. Le PS arrivait loin derrière avec 14% ou 17% en comptant les divers gauche.
Mais ces résultats sont à prendre avec précaution. Dans certains cantons, il n’y avait pas de candidat socialiste, écologiste, autonomiste ou du Front de gauche. Il était impossible de voter pour ces partis, ce qui ne sera plus le cas avec le scrutin de liste. La répartition des sièges à la proportionnelle (et non au scrutin majoritaire comme aux départementales) peut aussi changer la stratégie de vote des électeurs.
Il n’est par ailleurs pas clair si l’ensemble des électeurs « divers droite » auront envie de voter pour « Les Républicains », puisqu’il s’agissait parfois de candidats en rupture avec les affaires ou certains éléments de langage de l’ex-UMP. Enfin, comme il s’agit de la dernière élection avant la présidentielle, certains sympathisants du PS pourraient le soutenir à nouveau pour ne pas laisser un boulevard à la droite dans la perspective de 2017… ou sanctionner le gouvernement une dernière fois. Les candidats veulent « dénationaliser » le scrutin, mais impossible de faire totalement abstraction du contexte.
Aller plus loin
Sur Rue89 Strasbourg : tous nos articles sur les élections régionales
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