En 2015, le conseil régional d’Alsace devra boucler son budget avec 35 millions d’euros en moins. Cette ponction provient d’une baisse de la dotation de fonctionnement de l’État (-13 M€), d’une diminution des crédits alloués à l’apprentissage (-20 M€) et d’un recul prévisible de la taxe sur les cartes grises (-2 M€). Sur un budget, hors emprunts, d’environ 750 millions d’euros, le trou sera sensible (-4,6%).
Pour autant, le président (UMP) de la Région Alsace, Philippe Richert, n’entend pas baisser le niveau d’investissement dans la collectivité, ni tailler dans les effectifs. Il ne peut pas non plus augmenter les taux des prélèvements dont les revenus sont destinés à la Région, comme la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), puisque ces taux sont fixés par l’État.
Pas de hausse des cartes grises, normalement
Il ne lui reste que deux leviers : la taxe intérieure de consommation des produits pétroliers et énergétiques (TICPE) mais là, le taux est au maximum légal, et la taxe sur les cartes grises. Mais Philippe Richert ne veut pas relever ce prélèvement non plus :
« Actuellement, les Alsaciens paient 36,5€ par cheval-vapeur (unité de puissance qui équivaut à 735,5 watts ndlr) lorsqu’ils changent de véhicule. La moyenne nationale est à 41€ / CV. Si on se plaçait à ce niveau, on pourrait espérer 6 millions d’euros de recettes fiscales supplémentaires. Mais on a tenu jusque là, depuis 2010, sans augmenter les prélèvements et malgré le désengagement de l’État, j’aimerais qu’on continue sur cette voie. »
Endettement quasi-stable
Philippe Richert avance un bilan flatteur de sa gestion, avec notamment un niveau d’endettement quasi-stable (voir ci-dessus) :
« La Cour des comptes réclame des efforts budgétaires de la part des collectivités locales, c’est ce que nous faisons depuis 2010. L’Alsace n’est pas dans la tendance générale qui voit l’augmentation des dépenses de personnel dans les collectivités puisque nous serons en 2015 au même niveau qu’en 2014, personnel TOS excepté (+0,7% d’augmentation de la masse salariale des agents dans les lycées, ndlr). Cette non-augmentation tient compte des indexations automatiques, il s’agit donc bien d’une compression des dépenses de personnel d’environ 4%. »
L’administration précise qu’un Alsacien dépense 37€ par an pour les agents de la Région, tandis qu’en France la moyenne est à 45€.
Un niveau d’investissement stable
Philippe Richert prévoit de garder un niveau d’investissement identique à ceux des précédentes années (voir ci-dessus). Selon lui, cet effort est essentiel pour ne pas pénaliser les entreprises et notamment celles du BTP. Pour ces dernières, la baisse des dotations de l’État auprès de toutes les collectivités locales et l’annulation de grands projets aura de funestes conséquences en 2015.
Par ailleurs, la Région développe des systèmes pour transférer l’aide aux entreprises du budget de fonctionnement au budget d’investissement :
« Via les agences dans lesquelles la Région participe, comme Alsace Innovation ou Alsace Capital, nous transférons chaque année un peu plus les moyens dévolus aux subventions vers des prises de participations, qui relèvent de l’investissement. Ces aides ont par ailleurs un pouvoir démultiplicateur puisqu’à chaque fois, la Région n’intervient pas seule mais avec ses partenaires. »
Pour Antoine Homé, maire (PS) de Wittenheim et conseiller régional d’opposition, les finances de la Région sont certes causes de soucis, mais c’est la méthode qui pèche :
« Philippe Richert tacle l’État pour la baisse des recettes de la Région, mais il oublie que la perte d’autonomie financière des régions est une conséquence de la suppression de la taxe professionnelle, une loi votée sous la droite alors que Nicolas Sarkozy était au pouvoir. Quant à la CVAE, la péréquation bénéficie à la Région Alsace. Donc il y a d’abord un problème de méthode : la Région n’a pas de stratégie économique, pas de priorités clairement exprimées. Depuis cinq ans, on ne parle que de réformes institutionnelles comme le conseil unique d’Alsace et on a oublié de piloter les affaires de la région. »
Seule source de réjouissance dans cette conjoncture : le loyer de l’argent, qui reste très bas. Le taux moyen des crédits contractés par la Région est de 2,48%, emprunts structurés compris. Car Justin Vogel, vice-président (UMP) en charge des finances, a mis le doigt sur ce qui change, quand même :
« Notre capacité d’auto-financement va en prendre un coup. On était à 64% cette année, on va perdre environ 40%. »
Avec moins de ressources propres et sans baisse de ses investissements, la Région va donc davantage recourir à l’emprunt.
Aller plus loin
Sur le JDD.fr : La Cour des comptes s’inquiète de la situation des collectivités locales
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