Le business de l’occase n’est pas toujours facile, en concurrence avec la facilité qu’offre internet et son référencement glouton. Mais pour ceux qui apprécient l’atmosphère intimiste d’un petit commerce prêt à prodiguer des conseils avisés, voici un petit tour d’horizon de quelques lieux sympa à (re)découvrir à Strasbourg.
Pour les amateurs de science-fiction
Au bout de la rue Lauth, derrière France 3, Galaxy bis s’est spécialisé dans la science-fiction et le fantastique. Le propriétaire, Laurent, est conducteur de tram pour la CTS du dimanche au mercredi et change de casquette pour devenir bouquiniste du jeudi au samedi. Passionné de littérature SF, il a ouvert sa librairie il y a un an et comme il était le dernier arrivé sur le marché, il a décidé de « ne pas faire comme tout le monde ». Enthousiaste, il raconte sa passion:
« J’ai commencé avec ma collection personnelle, et comme je travaille le reste de la semaine, cela me permet d’aborder sereinement mon travail ici. Je retrouve les joies de l’amateur qui cherche de la littérature SF pointue, des anciennes collections et j’essaie aussi de faire circuler les nouvelles parutions des petites maisons d’édition qui ne sont pas vendues à la Fnac par exemple. »
Rangés par ordre chronologique, les anciennes collections du Fleuve Noir des années 50, du Masque ou de Présence du futur offrent un large choix de romans SF, fantastiques, insolites et d’horreur. Un temple pour les fans du genre, qui peuvent y trouver une bonne flopée des numéros de Fiction, une anthologie en matière de SF (de 1953 à 1990). La politique de la maison : des petits prix. Alors, même pour une édition rare, un livre coûte 8 euros, au maximum 30 et la plupart sont à 2,50 euros.
En bon aficionado de SF, Laurent propose aussi des « nanars », qu’il trouve lors de ses séances de chinage, entre 3,50 et 5 euros. La librairie distribue également les livres de l’éditeur parisien Dystopia et la revue Bifrost, spécialisés dans la SF et avec qui elle a des partenariats. Passionnés ou curieux du genre, Laurent transmet son engouement, notamment en proposant une fois par mois des ateliers d’écriture avec conteurs et auteurs pour enfoncer, ensemble, les portes de l’imaginaire.
• Galaxy bis, 9 rue de Lauth à Strasbourg. Ouverture du jeudi au samedi, de 11h30 à 20h.
Pour les livres de poche
Dans la rue des Frères, en face du restaurant Flam’s, Ex Libro propose une large collection de livres de proche. Folio, J’ai lu, Gallimard… Les bouquins sont rangés selon leur maison d’édition, par ordre alphabétique et par grands thèmes. A côté du comptoir, les dernières parutions sont mises en avant, ainsi que les acquisitions du jour. Grands classiques de la littérature à 2 ou 3 euros, parutions récentes à 50% du prix d’origine, littérature étrangère et romans de gare se côtoient sur les étagères bien rangées d’Ex Libro.
Anciens propriétaires de la librairie Librocase, fermée en 2009, Serge et Cirpa reçoivent leur clientèle « en grande partie le samedi ». Peu d’étudiants, pourtant les prix sont attractifs et l’ambiance du magasin est propice à la découverte de nouvelles perles littéraires. A noter également que les globe-trotters peuvent y trouver Routards et Lonely Planet à moitié prix, et toujours les dernières parutions.
• Ex Libro, 22B rue des Frères à Strasbourg. Ouverture du lundi au samedi de 10h à 12h et de 13h à 19h.
Pour les amateurs de bande-dessinées
Direction Farfafouilles, à deux pas de la place Saint-Etienne, la première boutique de BD d’occase de tout l’Est, ouverte il y a 26 ans. »Le nom vient du recueil de nouvelles de Frédéric Brown, Fantômes et farfafouilles » raconte Florence, vendeuse dans la boutique et super calée dans le 9ème art. Des étagères remplies de mangas à l’entrée, dix euros les trois mangas, une caisse de Narutos à 3,50 euros l’unité. Plafond bas et ambiance bédéphile avec figurines Marvel Comics et dessins accrochés sur les murs, l’amateur peut chiner à sa guise dans les grandes caisses remplies de BD, classées par auteur. Pour les classiques (Tintin, Boule et Bill, Astérix, Gaston…), comptez entre 6 et 7 euros. Certaines BD sont quasi neuves, d’autres ont un vécu. C’est « la magie de l’occase » s’enthousiasme Florence qui explique:
« On peut avoir des pièces rares de collection, comme ce Spirou qui a 50 ans, où le Tintin dans la vitrine, au fond du magasin avec les reliques, qui date de 1942. D’autres fois, on reçoit les dernières parutions. Ça arrive quand l’éditeur change le format de la BD par exemple, il peut décider de revendre les stocks invendus à des soldeurs plutôt que de les faire partir au pilon (ndlr, à la poubelle). Quand quelqu’un franchit la porte du magasin, on ne sait jamais s’il vient nous vendre une pièce de collection ou une BD de son enfance, ou encore acheter. »
A Farfafouilles, les prix peuvent donc varier… « de 3 à 3 000 euros » plaisante Florence. Le public y est varié, des amateurs de BD qui viennent parfaire leur collection, des lycéens et collégiens à la sortie des cours, des familles aussi.
Outre les grands classiques, des BD « adultes » comme les Pin Up d’Aslan des années 60-70 et d’autres « encore plus péchues », mais aussi des récits graphiques et des BD « souvenirs » comme Bob et Bobette, « la madeleine de Proust de la BD pour la génération née dans les années 60 » selon Florence (4 euros) ou encore Sylvain et Sylvette, avec qui de nombreux cinquantenaires ont appris à lire (3 euros).
• Librairie Farfafouilles, 5 place Saint Etienne à Strasbourg. Ouverture le lundi de 14h à 19h, du mardi au vendredi de 10h30 à 13h et de 14h à 19h et le samedi de 10h30 à 13h et de 14h à 18h30.
Pour les bibliophiles
Près de l’écluse, au bout du quai de Turckheim, Au coin littéraire. De l’extérieur, on pourrait croire que la bouquinerie est fermée, des barreaux devant les fenêtres décorées de livres anciens. A l’intérieur, une atmosphère intimiste, des livres recouvrent le comptoir qui réside au centre de la pièce, sur les étagères, au-dessus et entre les deux portes qui mènent à deux autres petites pièces où l’on trouvera livres d’art, alsatiques… Gamal a installé sa bouquinerie dans ce petit trois pièces du rez-de-chaussée il y a 22 ans et poursuit son rêve, au milieu des livres. Bouquiniste mais avant tout bibliophile et fin connaisseur, il sait diriger avec discrétion sa clientèle vers son Graal.
Pour prodiguer conseils ou parler littérature et amour des livres, Gamal a su, au fil des années, fidéliser une clientèle amatrice de beaux ouvrages. Aussi, « il y a autant de prix que de livres » sourit-il. Pour un livre de poche, il faut compter entre 1,50 euros et 4,50 euros. Mais Gamal leur préfère les livres reliés, les premières éditions… Bref, les petites pépites livresques. Des Pléiades 45% à 60% moins chères que sur le marché, selon l’état. La boutique est propice à la découverte d’anciennes éditions, livres aux pages jaunies et porteuses d’une histoire. Pour une belle édition reliée, couverture en cuir noir de 1959 du recueil d’essais « Terre des Hommes » et « Lettre à un otage » d’Antoine de Saint-Exupéry, comptez 38 euros.
• Au Coin littéraire, 4 quai Turckheim à Strasbourg. Ouverture du mardi au vendredi de 14h à 19h et le samedi de 10h à 12h30. Présence au Marché aux livres sur la place Gutenberg le samedi.
Pour ceux qui aiment chiner
Caverne d’Ali Baba pour le lecteur, le Marché du livre rue Saint-Gothard à quelques pas de la place d’Austerlitz, est la plus ancienne librairie de livres d’occase de Strasbourg. Et aussi la plus gargantuesque. Yves et Simone, un couple d’octogénaires, ont repris le commerce en 1965. Depuis 50 ans, des montagnes de livres escaladent les murs du magasin. Deux grandes pièces aux plafonds hauts, où chacun peut trouver son rayon. Les classiques de la littérature en format de poche, entre 1,50 et 4 euros, le théâtre d’un Molière ou d’un Musset pour moins d’un euro, en plusieurs éditions, s’y trouvent à la pelle. Pour les Emma Bovary, de vieux romans Harlequins à 0,30 centimes et pour les Bouvard et Pécuchet des dictionnaires, de vieux magazines Géo…
Simone raconte qu’ils ont cependant cessé d’acheter certains ouvrages, qui ne « marchaient plus », comme les rayons informatique, économique ou les livres scolaires. Devant la colossale bibliothèque rose et verte pour les enfants, Simone se désole de voir que ces livres ne se vendent plus :
« On a l’impression que les jeunes ne lisent plus maintenant… Les livres de poche partent bien encore, mais pour ce qui est de littérature jeunesse, les rayons ne désemplissent plus. «
Enfin, les lycéens trouveront aussi des annales de bac (plus ou moins récentes) et les étudiants en sciences humaines ou théologie, des livres qui ne sont plus édités ou encore des « Que sais-je ? » à foison (2 euros).
• Marché du livre, 9 rue Saint-Gothard à Strasbourg. Ouverture du mardi au vendredi de 9h30 à 12h et de 14h à 18h30 et le samedi jusqu’à 18h.
Pour s’aérer les neurones
A Strasbourg, un marché de plein air est dédié aux livres les mardi, mercredi et samedi de chaque semaine. Sur la place Kléber, trois stands recouverts de bouquins. Celui devant la librairie Kléber s’oriente littérature jeunesse, avec des livres quasi neuf de la bibliothèque rose et verte, Titeuf, Charlotte aux Fraises et Cédric entre 0,90 centimes et 2 euros et autres histoires et comptines pour enfants, comptez moitié du prix qu’en librairie. Sur la place, des caisses de livres de poche à 1,50 euros. Grands classiques de la littérature tels Zola, Yourcenar ou Maupassant côtoient des Musso et des Lévy, intacts ou un peu racornis.
Rue des Hallebardes, livres anciens, alsatiques, livres d’art et monographie, « en fonction de ce qu’on trouve » concluent Roger et Yves, deux bouquinistes qui viennent là depuis une vingtaine d’années, quand ils ne sont pas déplacés « sans être prévenus par la ville » tempêtent-ils. Tout est revendu moitié du prix neuf, « sauf pour les livres qui ne sont plus édités et qui deviennent des raretés ». Pas de bouquins sur la politique, à moins que ceux-ci aient une résonnance « historique », jugés trop vite désuets. Les prix ne sont pas affichés, aussi faudra-t-il demander.
• Marché des livres de Strasbourg rue des Hallebardes, sur la place Kléber et place Gutenberg. Le mardi, mercredi et jeudi, de 8h à 17h.
Pour les collectionneurs
A La Jument Verte, rue des Juifs, Martin Matrat s’est spécialisé dans l’expertise de livres anciens. Des ouvrages datant du XVème au XIXème siècle sont disposés sur les étagères éclairées de la petite boutique. Côté littérature, des Pléiades entre 25 et 35 euros. Sur le comptoir, Cécile Fischer, la co-gérante du magasin, s’apprête à envoyer des colis vers le Japon et l’Angleterre. « Nous avons des collectionneurs du monde entier qui passent commande en ligne » raconte Martin Matrat. De 15 à 5 000 euros, la Jument Verte propose une gamme sélective des grands de la littérature, telle qu’une collection de trois éditions originales reliées d’Edgar Allan Poe à 1 500 euros ou de la peinture, avec une édition datant de 1949 de Georges Duthuit réunissant les maîtres de la peinture, Braque, Derain, Vlaminck, Matisse… pour 90 euros.
• La Jument Verte, 28 rue des Juifs à Strasbourg – Ouverture du mardi au vendredi, de 10h à 12h et de 13h30 à 19h et le samedi de 10h à 12h et de 14h à 18h.
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