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Troisième plan social à Coop Alsace, 15 magasins sur le carreau

72 emplois vont être supprimés à la Coop et Carrefour ne reprendra pas la totalité des magasins de proximité. Pour quinze magasins, l’avenir est incertain. Les salariés d’Hypercoop ne sont pas à l’abri de restructurations non plus : Leclerc filialise les magasins.

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La devanture du magasin Coop de la rue Lauth à Strasbourg (Photo PF / Rue89 Strasbourg)

La devanture du magasin Coop de la rue Lauth à Strasbourg (Photo PF / Rue89 Strasbourg)
La devanture du magasin Coop de la rue Lauth à Strasbourg (Photo PF / Rue89 Strasbourg)

C’est le troisième plan social à la Coop, « et sans doute pas le dernier… », murmure une source proche de la direction. Quelque 72 postes vont être supprimés, essentiellement au siège et à la logistique après la reprise par Carrefour de ce qui reste du réseau de distribution régional de proximité. Carrefour possédant sa propre plateforme d’approvisionnement, à Lunéville, l’équipement de Reichstett ferait doublon. Au siège, déplacé du Port-du-Rhin à Wolfisheim, en plus des suppressions de postes, il sera proposé à vingt salariés un reclassement à Lunéville. Encore faut-il qu’ils acceptent ce transfert, et Laurent Hobel, délégué FO, en doute fortement :

« Il risque de ne pas y avoir beaucoup de volontaires pour faire 240 km aller-retour chaque jour… Ce troisième plan social aura le même montage que d’habitude : la direction fera des propositions de départs volontaires pour pallier les suppressions de postes. Et si les volontaires ne suffisaient pas, il y aura des licenciements… Mais comme plus personne n’y croit aujourd’hui, il risque d’y avoir plus de volontaires au départ que nécessaire ! Aujourd’hui, il n’y a plus personne pour se bagarrer, les salariés sont amers, déprimés, la direction s’est foutue d’eux. Ils sont sous pression en permanence, conditionnés à tout accepter… En fait, le ménage à outrance a déjà commencé. Et alors que dans la presse la direction se voulait apaisante quant à la revente à Carrefour, dès octobre elle savait que 15 magasins ne seraient pas repris. »

Rue89 Strasbourg s’est procuré la liste des magasins qui ne seront pas repris par Carrefour : Ernolsheim-sur-Bruche, Hatten, Benfeld, Ostwald, Strasbourg (Port-du-Rhin), Strasbourg (Robertsau, rue Boecklin), Seebach, Pfaffenhoffen, Eschbach, Diebolsheim, Innenheim, Reiperswiller, Oberbruck, Soultz (Haut-Rhin), Ribeauvillé  (grand rue).

Des gérants qui ignorent tout de leur sort

Contactés, aucun des gérants de ces magasins n’étaient au courant qu’ils ne figuraient pas sur la bonne liste… Pourtant, certains se souviennent de la réunion des gérants, organisée début novembre par la direction et durant laquelle on leur avait assuré une information complète dès la promesse de vente signée. « Finalement, c’est toujours dans la presse qu’on apprend les mauvaises nouvelles », soupire l’un d’eux. Quelques uns s’en doutaient, « vu le chiffre d’affaire, je voyais bien que je n’étais plus rentable », explique une gérante, inquiète. D’autres sont sous le choc, « on attend les consignes », s’étrangle une autre, qui est à la Coop depuis 10 ans et espérait voir la surface dont elle s’occupe se transformer en Carrefour express.

Carrefour a paraphé la promesse unilatérale d’achat début décembre. Le groupe a jusqu’à fin février pour se rétracter, les représentants du personnel au comité d’entreprise devront avoir rendu d’ici là leur avis, et l’autorité de la concurrence sa notification. Puis il restera à « régler quelques modalités techniques et commerciales », précise le P-DG Christian Duvillet qui se félicite que « les choses avancent dans le bon sens » :

« Carrefour reprend un nombre significatif de magasins, 129 sur notre réseau qui en compte 144 et pratiquement la totalité du personnel de ces magasins, 452 collaborateurs au total : 421 dans les magasins, 11 salariés itinérants, des animateurs de vente, et 20 au siège (les transferts proposés à Lunéville, ndlr). De plus, il prévoit d’investir 18 millions d’euros. L’impact social est faible, nous sommes très satisfaits de l’opération. Pour les 15 magasins non repris, nous réfléchissons aux solutions possibles, soit en interne, soit avec un partenaire. Nous avons commandé une étude sur le sujet dont les conclusions seront connues en mars. En attendant, Casino continuera d’approvisionner ces surfaces, l’objectif est d’éviter autant que possible la fermeture. »

Sauver la « proxi » ou liquider pour rembourser les banques ?

Une source proche de la direction, loin de se réjouir de l’opération, ne cache pas sa « frustration » et s’interroge :

« Est-ce que réellement tout a été mis en œuvre pour redresser la proxi ? La reprise par Carrefour est certes préférable à un dépôt de bilan. On limite la casse et on ne peut se permettre que cela capote… Le sauvetage raté de la proxi est en partie imputable à l’attitude de Casino, qui vendaient ses produits au prix fort. Puis il y a la gestion calamiteuse de la Coop ces dernières décennies, l’absence de formation des salariés, les magasins laissés à l’abandon pendant que les pertes s’accumulaient… Arrivera-t-on à sauver les 15 magasins restant ? Cette fois, il faudrait y mettre un peu de volonté, au moins pour le symbole ! »

Laurent Hobel (FO), a également la gouvernance de la Coop en ligne de mire, rappelant que Christian Duvillet est l’ancien directeur général du Crédit Lyonnais :

« Ce sont des financiers incapables de faire tourner la boutique. Depuis le début, ils ne voulaient qu’une chose : liquider pour rembourser les banques. »

Et entre la revente à Leclerc et Carrefour, l’ardoise de la Coop qui s’élevait à 140 millions d’euros a été réglée. Les banques seront remboursées en mars, les sociétaires pourront récupérer le montant correspondant à leur part sociale.

Que restera-t-il de la Coop après cela ? 210 salariés au total, répartis entre les quinze magasins, la boucherie et la logistique. Car Leclerc, qui détient depuis fin septembre 100% d’Hypercoop (6 hypers, 22 supermarchés Leclerc express) a signé un contrat d’approvisionnement avec la plateforme de Reichstett, lui assurant du travail jusqu’en août 2015.

Inquiétudes chez Hypercoop

« En fait, ce contrat est simplement pour faire la transition, jusqu’à ce que les Leclerc Express et les hypers soient réorganisés, certains fermés, d’autres vendus », nuance Laurent Hobel. La direction d’Hypercoop travaille actuellement à la « filialisation » de ces surfaces de vente : soit en vendant certains magasins, soit en plaçant à leur tête un adhérent Leclerc.

Car Leclerc est un regroupement d’indépendants, dans le groupe chaque directeur est propriétaire de son magasin. Hypercoop serait ainsi réorganisée, le lot divisé. Les salariés Coop repris par Leclerc, qui pouvaient s’estimer sauvés du naufrage de la Coop, renouent avec l’inquiétude, décrit Christian Saffache, délégué CGT :

« La direction a promis qu’il n’y aurait pas de licenciement mais elle nous rabâche que nous ne faisons pas assez de bénéfices car la masse salariale est trop importante. Un plan social ne sera peut-être pas nécessaire, les pressions sur le personnel suffisent parfois à le faire partir, avec les convocations incessantes, les avertissements à répétition… Il y a quelques semaines, nous avons dû défendre un salarié auquel on reprochait de ne pas faire des brioches assez rondes… Puis tous les acquis risquent d’être remis en question, au premier rang desquels l’ancienneté. Les supermarchés de Saint-Louis et de Sélestat ont été les premiers vendus à Leclerc et 18 mois après la cession majoritaire à un adhérent, il ne restait que 20% du personnel d’origine ! »

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