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La remise à plat du projet Wacken-Europe fait débat

Qu’est-ce qui a pu pousser la municipalité à revoir sa copie sur l’aménagement du quartier d’affaires Wacken-Europe ? Toutes les personnes proches du dossier à des degrés divers se sont posé cette question hier avec comme hypothèses un marché du bureau trop frileux, un chantage de Bouygues, des soucis juridiques en vue… Pour la Ville, rien de tout ça, juste une conséquence de la concertation.

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La remise à plat du projet Wacken-Europe fait débat

La première tranche de l’aménagement du quartier Wacken-Europe en blanc. Derrière en transparent, la seconde tranche. (DR)

Dans la guérilla que mènent certaines associations de quartier contre l’aménagement du quartier du Wacken (lire leur tribune), l’annonce de l’abandon des négociations sur la vente des terrains avec  Bouygues immobilier mardi soir a sonné comme une confirmation de leurs critiques.

Arnault Prersdorff, président de l’association des résidents du Tivoli et animateur du site Sauvons le Wacken, les détaille :

« Il n’y a pas de concertation, les habitants ne sont ni consultés ni informés. On a envoyé des lettres au maire et au président de la CUS, elles sont restées sans réponse. Ce dernier rebondissement ne nous étonne pas : la municipalité a très mal préparé ce projet d’aménagement. Ça fait neuf mois que les négociations entre Bouygues et la Ville étaient engagées et on savait bien qu’elles allaient achopper, pour une raison ou une autre. Il y a trop d’incertitudes. »

Car les signaux envoyés par le marché de l’immobilier d’entreprise sont effectivement inquiétants. Une note de la Lettre de la Pierre publiée le 19 juillet parle d’un « niveau historiquement bas pour les transactions de bureaux à Strasbourg » :

« Au cours du premier semestre, les transactions se sont limitées à 22 000 m² (sur 3 millions de m² de bureaux sur la CUS). Les transactions les plus élevées, signées BNP Paribas Real Estate, se limitent à 1 080 m² (installation de la centrale de réservation Amadeus à l’Espace européen de l’entreprise de Schiltigheim) et à 2 000 m² pour la vente à SCPI d’un clé en mains de Vinci. »

Et la note conclut ainsi :

« L’agglomération alsacienne est donc mal partie pour atteindre son niveau de référence de 60 000m² placés annuels. Si la baisse perdurait, elle inciterait sans doute à la plus grande prudence la Communauté urbaine pour le lancement, même phasé, des gros projets qui sont dans ses cartons, à commencer par le quartier d’affaires Wacken-Europe confié à Bouygues Immobilier. »

Pour certains observateurs, qui souhaitent rester anonymes pour ne se fâcher avec personne, il est clair que Bouygues n’est pas parvenu à vendre suffisamment de lots pour rassurer les banquiers et décrocher les prêts nécessaires à l’opération. La première tranche, c’est tout de même 40 000 m² de bureaux classiques. La Ville ne souhaitant pas baisser le prix de vente des terrains, qui sont déjà au niveau plancher des Domaines, l’annulation pourrait venir de Bouygues Immobilier. Contacté, le groupe de BTP n’a pas souhaité communiquer.

Alain Fontanel, adjoint au maire de Strasbourg en charge de ce dossier, balaie cette hypothèse :

« La Ville et Bouygues ont mis un terme aux négociations de vente en cours d’un commun accord. On s’est aperçus que les conditions initiales du marché avaient évolué. Il est donc nécessaire de passer un nouveau marché. Quant au marché de l’immobilier, il s’agit ici de bureaux de grands standings, en manque d’offre à Strasbourg. Il n’y a aucun problème de commercialisation. »

Mais s’il y a nouveau marché, il y aura un nouveau concours, et donc d’autres opérateurs pourront se voir choisir à la place de Bouygues. Lors du premier appel à projet, Nexity avait concouru avant que Bouygues Immobilier, associé à l’architecte Christian de Portzamparc, ne soit finalement choisi avec ce projet en novembre 2011 :

L’existence d’un risque juridique

On imagine mal Bouygues Immobilier s’asseoir sur ce projet comme ça, surtout après tout le travail qui a déjà été fourni depuis plus d’un an. L’autre hypothèse qui pourrait avoir provoqué l’annulation de la vente est l’existence d’un risque juridique dans le montage du projet.

Un architecte proche du dossier explique :

« Il y a une dizaine de jours, la Ville et Bouygues ont découvert une faille dans la procédure. Je ne sais pas si c’est ce qui a provoqué l’annulation de la vente mais sur ces marchés très importants, il y a forcément un passage devant le juge administratif à un moment où à un autre, ce sont des dossiers très attaqués. L’existence d’une faille aurait pu donner lieu à des pénalités très importantes. La Ville a donc fort bien pu décider de tout remettre à plat, pour sécuriser la procédure. »

Pour Pascal Mangin, conseiller municipal d’opposition, l’irrégularité de la procédure ne fait aucun doute :

« Catherine Trautmann avance des explications à caractère juridique pour le moins alambiquées alors que M. Alain Fontanel s’était engagé sur la régularité juridique du projet. Nous sommes intervenus à plusieurs reprises, notamment en Conseil Municipal, pour dénoncer l’irrégularité et l’opacité de la procédure. En effet, Roland Ries et Alain Fontanel ont fait le choix d’offrir à un promoteur unique près de 100 000 m² de terrains (…) sans concertation, sans appel public à la concurrence et sans installation d’un organe pluraliste pour départager les offres. »

Mais pour Alain Fontanel, ce sont les résultats de la concertation, justement, qui ont présidé à l’annulation de la procédure :

« Au conseil de quartier de la Robertsau, il est apparu assez tardivement une demande plus importante que prévue de logements dans ce quartier. Le maire a également souhaité ajouter des logements sociaux, qui n’étaient pas prévus dans les plans initiaux. Même chose pour la crèche municipale. Nous avons intégré ces demandes au projet global d’aménagement. Le risque juridique aurait été de continuer avec ces modifications, sans relancer la procédure. L’ensemble du projet, qui s’étale jusqu’en 2017, ne prendra que quatre à cinq mois de retard, ce qui est minime dans un projet d’aménagement de cette ampleur. »

Une nouvelle délibération sera proposée au conseil municipal à l’automne. La rentrée va être animée.


#Alain Fontanel

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