Merguez et drapeaux rouges, il y a foule ce jeudi 26 avril vers midi sur le parvis de la CUS. Le « barbecue revendicatif » en faveur du pouvoir d’achat, organisé par la CGT et Sud, tourne à plein régime. Pourtant, la veille, rien n’était moins sûr. Cinq organisations syndicales sur sept ont levé en début de semaine leur préavis de grève de 2h, estimant que les négociations avec la CUS étaient d’ores et déjà en bonne voie.
« 6 euros par mois et par agent, pas grand-chose »
Les agents réclament une augmentation de 80€ de l’indemnité annuelle d’avril 2013. La revalorisation du régime indemnitaire a été négociée dès l’arrivée de l’équipe socialiste à la tête de la collectivité en 2008. « Il s’agissait de combler la perte du pouvoir d’achat subi sous le mandat précédent puisque rien n’avait été réévalué durant cette période », explique Bertrand Blindauer, délégué syndical de la CGT. Le « rattrapage » a été échelonné sur plusieurs années : 180€ en 2010 et 2011, 300€ cette année, et 420€ en 2013, que les agents grèvistes voudraient voir porter à 500€. « A l’époque nous avions accepté car les discussions coïncidaient avec la suppression de la taxe professionnelle, nous savions que les finances de la CUS risquaient d’en souffrir », rappelle Bertrand Blindauer.
S’ils ont accepté, c’est aussi parce l’accord comprenait une clause de revoyure fixant à 2012 la renégociation du régime indemnitaire pour les années suivantes. Sauf qu’en début d’année, surprise :
« La CUS nous a dit qu’il n’y avait rien à discuter, qu’il n’y avait pas d’argent et que les échéances électorales empêchaient toute décision, se souvient Bertrand Blindauer (CGT). Mais 80€ de plus, c’est 6 euros par mois et par agent, ce n’est pas grand-chose et ce serait un geste fort de la collectivité, nous signifiant qu’elle ne nous oublie pas. »
Ne pas piocher dans la poche des habitants
Un « pas grand-chose » qui, multiplié par le nombre d’agents concernés, reviendrait à « la somme conséquente de 500 000€», estime Robert Herrmann, premier adjoint au maire, en charge de la gestion du personnel à la CUS. Pour l’heure, les indemnités sont financées sur le budget de la CUS. Mais la collectivité reste prudente, notamment au cas où le président élu le 6 mai décide du dégel des salaires des fonctionnaires, bloqués depuis trois ans ?
« On se retrouverait dans une situation compliquée… Nous risquerions d’être contraint d’augmenter les impôts, alors que nous nous sommes engagés à ne pas le faire. La masse salariale représente déjà 53% du budget de la CUS. Nous sommes conscients qu’il faut faire davantage pour les bas salaires. Nous voulons assurer le progrès social mais sans avoir à piocher dans la poche des habitants», justifie l’élu.
Hier, la CGT et Sud attendaient pourtant « des engagements chiffrés, des garanties» qui ne concerneraient non plus le décrochage antérieur des salaires par rapport à l’inflation, mais la perte du pouvoir d’achat dans le présent. « Le changement c’est maintenant, non ? », ironise Dominique Boudet (Sud). Les représentants du personnel ont été reçus à l’étage. Ils sont redescendus, pas vraiment triomphants. Pas dépités non plus. « Rien de nouveau », lancent-ils en revenant. Les chèques-vacances seront revalorisés, comme promis, et puis, tout le monde se revoit le 24 mai, lors de la réunion annuelle élus-syndicats.
« Au moins, il y a un vrai dialogue social, tout ne passe pas par le rapport de force et, surtout, la CUS ne s’est pas engagée dans la logique de la RGPP », se félicitent-ils.
« Un effort unique en France »
La RGPP (révision générale des politiques publiques), c’est la réforme tentaculaire des services de l’État lancée par Nicolas Sarkozy en début de mandat pour redresser les finances publiques : moins d’enseignants, moins de tribunaux, de maternités, etc. La RGPP, c’est le fameux non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. Dans ce contexte, la CUS est presque dans l’hérésie en augmentant les salaires de ses agents via les indemnités et avec son effectif constant. Les syndicats nuancent, par la voix de Dominique Boudet (Sud) :
« Les effectifs sont certes constants, mais la charge de travail augmente. A chaque nouveau tronçon de tram, nouveau bâtiment, ce sont des espaces supplémentaires à entretenir et les moyens sont inchangés. Le nombre d’assistantes sociales est le même alors qu’elles sont débordées par les demandes vu la dégradation de la situation sociale. »
En fait, dès 2009, l’État incitait les collectivités à faire leur propre RGPP. Une proposition qui figure aujourd’hui dans le programme du président sortant, mais de manière plus contraignante. Nicolas Sarkozy envisage de conditionner les dotations des collectivités au respect de la règle du « 1 sur 2 » concernant les fonctionnaires. Et dans ce scénario-là aussi, « la situation serait compliquée », selon Robert Herrmann :
« Les agents les moins qualifiés seraient les premiers touchés et il faudrait supprimer certains services publiques ». Mais il en est convaincu, « les maires entreraient en résistance. Car les collectivités ne sont pas coûteuses : d’une part elles ne peuvent présenter de budget déficitaire et, d’autre part, elles soutiennent l’économie du pays à travers leurs investissements. Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas réformer, mais pas avec un mode de gestion appliqué brutalement et sans discernement. La France n’est pas un pays pauvre, c’est un pays mal géré.»
Mais la CUS est-elle bien gérée ?
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