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Daniel Gerber, ancien libraire au RSA, atypique candidat de « Ma Voix »

L’élection législative partielle de Strasbourg ne passionne pas les foules. Élu pour un an, le futur député n’aura guère d’impact sur la fabrique de la loi. Mais la campagne est le laboratoire de l’expérience « Ma Voix » et ses candidats tirés au sort. Rencontre avec le collectif et son candidat Daniel Gerber.

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Daniel Gerber, ancien libraire au RSA, atypique candidat de « Ma Voix »

Le pari « Ma Voix » est en marche à Strasbourg. À la deuxième réunion à Strasbourg, fin mars, les chances de succès étaient encore floues. Samedi 16 avril, 16 candidats des quatre coins de la France ont pourtant tenté leur chance pour participer à l’élection législative partielle des 22 et 29 mai. Un tirage au sort place de la République a désigné le candidat et Daniel Gerber, 55 ans, est sorti du chapeau. Le concept de Ma Voix, ou #MaVoix sur Twitter, est simple : pas de personnification et des députés qui appliqueront ce que demandent les internautes sur son site.

Son objectif est l’élection législative de juin de 2017, mais celle  de Strasbourg sert de répétition. Quelques membres se retrouvaient au salon de thé « La Théière« , rue du Faubourg de Saverne. Ouvert depuis septembre et médiatisé par son café ou thé à moitié prix pour les seniors, l’établissement est trusté par les candidats : Éric Elkouby (PS) et Laurent Py (UDI) envisagent d’y organiser une réunion publique. « On ne refusera personne » promet le gérant Abel Ouali, soutien de Ma Voix.

« Qui vous représente le mieux ? »

Plus qu’une réunion, « ce qui marche le mieux ce sont les rencontres au bord des panneaux », explique Marc Philibert, très impliqué localement comme « une quinzaine » de Strasbourgeois. L’affiche est un miroir sur papier avec la question « qui vous représente le mieux ? » pour que le passant se voit dessus. Ironie du tirage au sort, l’affiche jaune figure entre celle du candidat PS et celui de « Les Républicains » (Jean-Emmanuel Robert), en septième position (sur 14 candidats). « Dans le centre-ville, il y avait juste Guillaume D’Andlau (sans étiquette) et Éric Elkouby. À Hautepierre on était les seuls », poursuit Marc Philibert au sujet du premier jour de collage, lundi 2 mai. Le dernier tiers des affiches sera collé mercredi 4 mai.

Une affiche Ma Voix devant l'hôtel de ville. Un peu haute pour se voir dans le reflet (photo JFG / Rue89 Strasbourg)
Une affiche Ma Voix devant l’hôtel de ville. Un peu haute pour se voir dans le reflet (photo JFG / Rue89 Strasbourg)

Une campagne à 4 000 euros

Les membres de Ma Voix ne sont pas des professionnels de la politique. Ils découvrent les règles d’une élection législative. Il faut ouvrir un compte de campagne, nommer un mandataire financier différent du candidat… Le plafond des dépenses est de 70 965 euros. Ce même compte peut être alimenté par celui du candidat, qui peut se faire rembourser jusqu’à 33 708 euros s’il obtient au moins 5% des suffrages exprimés.

Ces chiffres semblent abstraits pour les protagonistes. Dans leur cas, il n’y a qu’un compte avec un budget prévisionnel de 4 000 euros, financé par des dons déductibles des impôts à hauteur de 66%, comme n’importe quel don à un parti politique. Pas d’emprunt, ni de compte personnel. Le collectif affiche avoir déjà recueilli 3 100 euros depuis le 29 avril. Ce budget doit couvrir notamment l’impression de 300 affiches pour 1 000 euros, plus chères car cinq fois plus épaisses que les autres pour y intégrer le fameux miroir. Des affiches normales auraient coûté environ 300 euros. Le reste du budget doit servir à l’impression des bulletins de vote et des professions de foi.

Daniel Gerber, ancien libraire au RSA et candidat

Quant à Daniel Gerber, habitant d’Erstein, il se dit content de participer à une expérience qui commencer à fonctionner :

« J’avais envie de me lancer dans l’action citoyenne. Il y avait pas mal d’initiatives pour changer la politique, mais je me suis dit, ça suffit de parler, ici on agit. On a eu un peu de chance avec Nuit Debout, qui a permis de plus faire parler de l’initiative et de rencontrer des gens. Ce qui ressort, c’est que l’horizontalité, ça paie. »

Il était présent dès la deuxième réunion du collectif, tout simplement curieux. Il ne s’imaginait pas candidat. Fidèle à la démarche du collectif, il se met assez peu en avant. Il se définit quelqu’un de « toujours très intéressé par la politique » mais jamais encarté dans un parti . Il a un goût pour « les politiques alternatives », mais regrette que « personne n’en propose ».

Daniel Gerber, peu habitué aux photographes, a préféré poser entouré de quelques soutiens de Ma Voix pour illustrer la campagne collective (photo JFG / Rue89 Strasbourg)
Daniel Gerber, peu habitué aux photographes, a préféré poser entouré de quelques soutiens de Ma Voix pour illustrer la campagne collective (photo JFG / Rue89 Strasbourg)

S’il est élu, il promet qu’il respectera les décisions des citoyens exprimées sur le site web de #MaVoix, même si elles vont contre ses convictions personnelles. « C’est un engagement moral », dit-il. Quelle que soit l’issue du scrutin, il aura le droit de re-participer à un tirage au sort Ma Voix en 2017. Il pense même qu’il sera de la partie.

Côté personnel, Daniel Gerber a détenu plusieurs librairies spécialisées dans la bande dessinée. Une était sise rue du Jeu des Enfants à Strasbourg, une autre à Paris. Aujourd’hui sans emploi, il bénéficie du revenu de solidarité active (RSA) et « travaille sur un projet web ». Ses profils sur Twitter et LinkedIn indiquent qu’il est « sur le point de créer une coopérative d’artistes pour un projet collectif mêlant arts visuels et arts de l’écriture ».

Plus simple que le candidat soit de Strasbourg

Sa suppléante, Marie-Laure Teyssedre habite Le Mans. Un député n’a pas besoin d’habiter dans la circonscription où il est candidat, car il est sensé représenter la nation et non des intérêts locaux. Pour Daniel, habiter dans l’agglomération strasbourgeoise est néanmoins plus simple pour la campagne électorale :

« Au tirage au sort, c’était impressionnant, il y avait des gens de partout La Rochelle, Paris, Saint-Malo. C’est plus simple que le candidat soit à Strasbourg. On l’aurait accueilli, mais il aurait fallu organiser les allers-retours, concentrer l’action les week-ends, engager des frais de billet de train… »

Les passants peuvent se voir dans le reflet déformant des affiches, ici lors du collage le 2 mai. (photo Ma Voix / Facebook)
Les passants peuvent se voir dans le reflet déformant des affiches, ici lors du collage le 2 mai. (photo Ma Voix / Facebook)

Sans programme, si ce n’est de soumettre au vote toutes les décisions, difficile de participer à un débat entre candidats. Si l’opportunité se présente, Daniel Gerber et les autres membres de Ma Voix tranchent la question lors de la réunion :

« Il ne faut pas refuser l’invitation, ça ferait bizarre. Soit on vient à plusieurs, soit on fait un tirage au sort pour décider qui y va. »

Car la vision de Ma Voix est qu’une personne ne peut savoir répondre à tout. Son but est d’utiliser « l »intelligence collective ». Autrement dit, que chacun apporte des compétences dans son domaine. La manière de mettre en forme tout cela sur la plateforme est encore en chantier. Vaste programme, qui montre que même si la candidature strasbourgeoise est déjà une réussite en soi, Ma Voix est encore loin d’avoir réussi son pari.


#législative partielle 2016

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