Si ce vote était attendu suite à l’arrêt de la CJUE, les pro-Strasbourg se réjouissent de ce vote, tandis que les anti-Strasbourg vont encore traîner des pieds jusque dans la capitale alsacienne. L’attachement au siège du Parlement européen a, au passage, le mérite d’être l’un des rares sujets qui fait consensus dans la politique strasbourgeoise. Ainsi, Fabienne Keller indiquait sur Twitter qu’il s’agit « d’une bonne nouvelle, mais pas d’un aboutissement », tandis que Catherine Trautmann, également présidente de la délégation socialiste au Parlement européen, indiquait dans un communiqué qu’« il est donc temps que ces jeux inutiles et offensant pour Strasbourg cessent. L’engagement européen implique de se déplacer dans l’Union. […] Ne pas accepter cette contrainte intrinsèque aux fonctions européennes relève d’une incompréhension de la mission parlementaire ».
Batailles des chiffres et décision de justice, le débat est repoussé
En attendant, le débat sur le siège du Parlement est repoussé aux calendes grecques. Bien qu’obligés, de fait, de siéger dans ces deux parlements, la plupart des eurodéputés demeurent insatisfaits de ce Parlement partagé entre deux villes, voire trois, avec son secrétariat à Luxembourg. Petit rappel, 75% d’entre eux avaient voté pour une session de moins à Strasbourg, un record. La défiance a été actée.
Les coûts économiques et écologiques, engendrés par le transport des députés, mais aussi de leurs assistants, leurs traducteurs, des journalistes et de documents de travail, sont souvent dénoncés. Le chiffre de 200 millions d’euros par an a été récemment avancé, bien que l’Association Européenne des Jeunes Entrepreneurs l’estime à 51,5 millions d’euros et 4 200 tonnes de CO2 par an. D’autres arguments sur l’organisation du travail ou d’agrément personnel reviennent aussi dans le débat. En effet, les commissions parlementaires, les réunions de groupe et les mini-sessions plénières se déroulent à Bruxelles, où se trouvent aussi d’autres institutions comme la Commission européenne ou le Conseil européen. Tôt au tard, la question du siège (unique ?) du Parlement devra être tranchée, même si connaissant la réactivité des institutions européennes, mieux vaut parier sur le tard.
Si la Cour venait trop embêter les parlementaires, les « anti-Strasbourg » ont encore quelques cartouches, qui ne sont certes pas encore à l’ordre du jour. Leur grogne pourrait remonter jusqu’aux chefs d’Etat, qui pourraient ensuite, soit changer ou supprimer certaines prérogatives de la CJUE avec un nouveau traité si ce projet venait à faire consensus, soit directement régler la question via les traités.
Néanmoins, la France devrait surement exiger des contreparties pour signer un traité qui lui ferait perdre le siège du Parlement. Mais plus que la menace directe sur la Cour, il ne faut pas oublier que plusieurs fois la Cour s’est ainsi autocensurée dans le domaine du droit économique de l’Union Européenne pour ne pas fâcher les Etats. La même chose s’était passée aux Etats-Unis dans les années 1930, lorsque le Président Franklin Roosevelt menaçait de supprimer la Cour suprême, qui jugeait inconstitutionnelles ses premières réformes du New Deal. La séparation des pouvoirs a ses limites.
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