Enquêtes et actualité à Strasbourg et Eurométropole

Un délégataire privé gérera les Bains municipaux après une rénovation publique

La rénovation des Bains municipaux de Strasbourg sera prise en charge par la collectivité avant de confier la gestion à une association ou une entreprise. Un bassin extérieur sera notamment ajouté et la chaufferie servira à de nouvelles activités du sport-santé.

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Un peu plus d’un an après que le dossier de la rénovation des Bains municipaux soit relancé, la collectivité a voté le futur mode de gestion de la piscine lors du conseil municipal du lundi 27 juin. Comme souvent, le sujet a mené à de nombreuses prises de parole. Les débats ont été animés, notamment parce que les conseillers municipaux n’ont pris connaissance du texte que lors de la séance préparatoire, une semaine avant le conseil.

Après des travaux prévus à l’automne 2018 – en même temps que la réouverture de la piscine d’Hautepierre – l’établissement historique sera confié à un délégataire de service public (DSP) encore inconnu, c’est-à-dire une société privée qui recevra une subvention annuelle de 1,6 million d’euros. Ce prestataire peut être une association ou une entreprise, comme la CTS qui gère les bus et tramways.

Cette participation publique s’explique par la nécessité de maintenir l’accès aux deux bassins aux même tarifs qu’ailleurs à Strasbourg et son agglomération, ainsi qu’aux baignoires et douches publiques. Un engagement pris par le conseil municipal en juin 2015. En revanche, les espaces santé et bien-être qui comprend les saunas et bains bouillonnants ne sont ne sont pas soumis à une obligation de service public et donc un encadrement des prix.

L’arrière du bâtiment qui devrait accueillir un bassin extérieur (photo JFG / Rue89 Strasbourg / Flickr /cc)

30 ans de délégation(s)

Mais avant de laisser les clés à quelqu’un d’autre, il faudra financer la première phase des travaux. En résumé, l’Eurométropole versera 2,6 millions d’euros (le déficit actuel de la piscine), et cela pendant 30 ans (soit 78 millions d’euros), à la Ville de Strasbourg, propriétaire du lieu. Elle-même déléguera à la gestion du site à la Société publique locale (SPL) des Deux-Rives (société de la Ville et l’Eurométropole normalement en charge de l’urbanisation de l’Est de la ville) dès 2017.

La SPL devra donc trouver « un groupement d’entreprises » à qui confier les travaux, estimés à 30 millions d’euros, et un délégataire pour la gestion du lieu à l’horizon 2020. Elle ne profitera pas des recettes des nouvelles activités qui pourraient en découler. Les 42 agents seront réaffectés à d’autres piscines ou non-remplacés.

Des travaux financés par l’ancien déficit

Pour l’adjoint au maire en charge du dossier Olivier Bitz (PS) ce montage est une manière de faire des travaux sans créditer de nouveaux investissements aux budgets de la Ville ou de l’Eurométropole, la mission qui lui était confiée à l’origine :

« Les travaux permettront de générer un million d’euros d’économies de fonctionnement du site, qui seront donc attribuées au remboursement de l’investissement étalé sur 30 ans. Seuls 1,6 million seront versés pour le fonctionnement. Le fait que les travaux soient pris en charge par nous-mêmes permettra d’avoir des délégations assez courtes, alors que ce n’est pas possible quand on demande au délégataire de les payer, puisqu’il doit les rembourser dans le temps. »

En plus de cela, l’Eurométropole et la Ville vont injecter 4 millions d’euros pour monter à 5 millions le capital de la SPL, présidée par le maire de Strasbourg Roland Ries, dont les collectivités sont les seules actionnaires (respectivement à hauteur de 20% et 80%). Cette somme sera injectée à l’emprunt pour le lancement des travaux.

Pour l’ancienne maire de Strasbourg aujourd’hui dans l’opposition Fabienne Keller (LR), le montage est au contraire complexe et non-nécessaire :

« Dire qu’il n’y avait pas les compétences au sein de la collectivité pour justifier de passer par la SPL est méprisant envers les services. Lors de mon mandat (2001-2008 ndlr) nous avions rénové d’autres bâtiments du même architecte, Fritz Beblo, les écoles Saint-Thomas et Neufeld ou le musée historique sans problème. On va se retrouver à payer 2,6 millions pendant 30 ans, or on voit les problèmes de la DSP de 20 ans à l’incinérateur Sénerval. Et puis la SPL est moins transparente que le conseil municipal. Il y a bien une personne de l’opposition qui y siège, mais on n’a pas eu accès à la dernière étude. Elle a été confiée à EPPC (Entreprises Publiques Privées pour le Commerce), un cabinet qui ne fait que de l’immobilier commercial et ne connait rien aux piscines. »

Ce n’est pas l’avis d’Olivier Bitz, qui estime qu’une piscine ne se rénove pas aussi facilement qu’une école et a répondu en séance qu’EPPC a fait appel à d’autres compétences. Quant à la transparence, il promet que le dossier sera toujours soumis aux débats, tant il est scruté par divers observateurs et que le maire doit rendre compte des activités.

Le plan de financement fait au passage sortir définitivement la piscine la Victoire du « plan piscine 2010-2020 », de 100 millions d’euros, où les bains municipaux n’ont certes jamais figuré, bien que cela était fut un temps promis lors de la campagne municipale.

Une piscine extérieure, un bar cafétéria

Au delà de la rénovation patrimoniale des façades, des toitures, du hall principal, des deux halls et leurs bassins, de l’espace des bains romains, les scénarios étudiés ont conduit à privilégier cinq orientations :

  • L’aménagement d’un nouvel espace de santé et de bien-être (saunas, bains bouillonnants,…) dans l’ancienne buanderie, au sous-sol
  • La création d’un nouveau bassin extérieur dans la cour arrière (comme imaginé dès 2009), dont l’accès se fait avec l’entrée normale.
  • La requalification des espaces délaissés au sein du bâtiment principal
  • La création d’espaces dédiés au sport santé dans l’actuelle chaufferie. L’association Siel bleu, déjà prestataire ailleurs en Sport-santé est pressenti.
  • La création d’un espace « bar-cafétéria »

Au nom des écologistes, qui on voté la délibération, Jeanne Barseghian a plaidé pour que le bar-cafétéria soit confié à une entreprise d’économie sociale et solidaire. Pour Olivier Bitz le bassin extérieur « à vocation sportive » (mais dont les dimensions sont encore inconnues) permettra d’attirer un nouveau public, alors que la fréquentation actuelle est mitigée.

D’après Olivier Bitz, aucun scénario ne sera retenu intégralement. (document Eurométropole)

4 scénarios de rénovation

La SPL a planché sur 4 scénarios de rénovation, dont un hôtel, une maison de retraite ou des logements à l’arrière toujours selon Olivier Bitz, aucun ne sera retenu intégralement :

« Les scénarios économiques n’avaient pas été testés jusqu’ici et aucun ne tient la route. Pour le scénario de l’hôtel, il aurait fallu payer des constructions en plus de la rénovation. »

Résultat, la partie de l’aile médicale sera maintenue en l’état durant cette première phase de travaux. La collectivité réfléchit donc à d’autres utilisateurs des lieux à l’avenir, avant d’engager d’autres travaux, ce que le conseiller municipal d’opposition Éric Senet (sans étiquette) a déploré :

« Il n’y a pas de projet global. On n’engage pas de travaux sans savoir ce que l’on fait sur la deuxième phase. On va avoir pendant 30 ans un coût que l’on trouve trop cher aujourd’hui. »

Ce bâtiment, principalement vide et utilisé par quelques kinésithérapeutes n’est pas réaffecté dans l’immédiat (photo JFG / Rue89 Strasbourg)

La sortie plan de rénovation de toute l’aile gauche du bâtiment n’a pas influencé sur le budget global prévu pour le coût des travaux, qui étaient toujours annoncés entre « 30 et 40 millions d’euros » officiellement, et dont l’étude qui a permis d’arriver à ce chiffre reste inconnue, puisque la précédente tablait sur environ 20 millions d’euros, comme les bains rénovés en Allemagne. « Plus on avance, plus les études sont précises dans leur chiffrement », justifie Olivier Bitz.

La Victoire pour tous toujours vigilant

Si certains membres du collectif « La Victoire pour tous » estiment que le prestataire privé ne pourra pas défigurer le bâtiment ou et que la collectivité pourra être exigeante sur le cahier des charges puisque les travaux seront publics, Liane Zoppas craint que le projet de création d’un établissement hôtelier soit toujours possible plus tard :

« Il aurait été cohérent que l’on installe spontanément le pôle sport-santé dans la partie du bâtiment déjà dédié à la santé. Si la rénovation extérieure est déjà prévue, ils doivent avoir une idée de ce qu’ils veulent mettre dedans. Je suis persuadée que ce sera un hôtel ou des appart’ hôtels dans ce quartier proche des institutions européennes. »

Nul doute que l’attribution de délégation sera très scrutée, mais cela sera pour la fin de mandat. Cette fois-ci, la délibération sur ce sujet sensible au PS et chez les écologistes a même été votée par l’UDI.


#Bains municipaux

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